Chapitre 2

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Je flotte au cœur du néant, ne vois rien et ne parviens pas à bouger mes membres ou ma tête.

— Réveillez-vous.

Un murmure perce enfin les ténèbres où je baigne. Au moins, un de mes sens n'est pas totalement détruit. Je ne suis donc pas morte.

Un élancement intolérable à l'épaule me fait regretter mes tentatives de mouvements, je ferais n'importe quoi pour que cela s'arrête.

Un cri de douleur m'échappe, vite étouffé par une paume pressée sur ma bouche.

— Chut, pas de bruit.

Mes yeux s'écarquillent d'effroi et fouillent l'obscurité sans percevoir un soupçon de lumière. La main se retire et l'homme s'excuse :

— Désolé, vous devez rester silencieuse. Nos assaillants se trouvent juste au-dessus de nous.

Une odeur de musc mélangée à de la transpiration atteint mon nez lorsque je discerne un frottement près de moi, l'homme se rapproche.

Je balbutie :

— Mal...

Le sang dans ma bouche me cause une forte quinte de toux. La secousse me tire un nouveau râle.

— Vous êtes-vous fait mal ? demande la voix rauque.

— Partout.

Je tressaille au moment où ses mains se posent sur mon ventre. Il me palpe à l'aveuglette :

— Désolé, je veux vérifier si vous avez quelque chose de cassé. Ne bougez pas.

Je serre les dents et anticipe l'onde de douleur qui risque de me transpercer d'un instant à l'autre. Les doigts inconnus courent sur mes hanches, appuient avec délicatesse sur mes côtes et manipulent mes bras.

— Argh...

— Pardon, pardon.

Le toucher se fait plus précis, et j'imagine un visage concentré qui me surplombe.

— Votre épaule est démise, je la sens plus basse que la normale. Je dois la ramener dans son axe.

— Non...

— Vous souffrez à cause de la luxation. Je sais comment vous soigner, me rassure la voix bienveillante, mon petit cousin faisait du rugby et j'ai dû lui replacer l'épaule plusieurs fois. Je suis une sorte d'expert.

L'homme rompt le contact. Inquiète, je le supplie :

— Ne me laissez pas.

— Je ne vous abandonnerai pas. Croyez en moi.

Le ton assuré de sa voix me calme. Je l'entends fouiller, peut-être dans un sac, avant de ramper à nouveau vers moi.

— Je vais vous donner à boire.

L'homme glisse une main derrière ma tête, la relève avec un soin infini, ce qui m'arrache tout de même un gémissement, et le plastique d'une bouteille frôle mes lèvres. J'en prends une goulée et la recrache aussitôt. Le sang dans ma gorge me donne la nausée. L'inconnu m'essuie le menton à tâtons à l'aide d'un tissu rêche et me verse à nouveau de l'eau dans la bouche. Cette fois, je parviens à avaler.

— Vous allez mordre ceci, m'explique-t-il tout en approchant l'étoffe de mes lèvres, et serrer très fort. À trois, je tirerai un grand coup sur votre bras

Je me retiens de geindre. Cette solution est ma seule alternative, j'ai passé assez de temps sur le terrain pour le comprendre. Nous ne savons pas quand les secours arriveront. Si jamais ils arrivent.

Crois en Moi (HUGO POCHE & LA CONDAMINE - 13/09/2018)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant