2/ Brody (2)

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— Waahhh. C'est ça l'enfant prodige de Hank ? ironise-t-elle avec dédain.

En mon fort intérieur, j'admets volontiers qu'elle n'a pas tort, mais son ton égratigne ma fierté et je ne peux retenir ma réplique cinglante :

— Désolé de te décevoir, Princesse !

J'ai craché ces mots avec mépris. Elle se redresse et ses yeux lancent des flèches.

Oups, elle a l'air vraiment énervée par le ton que j'emploie, je ne peux lui en vouloir. Je suis sur le point de faire profil bas lorsqu'elle enchaîne :

— Je t'interdis de t'adresser à moi de cette façon !

Hautaine, elle porte ses mains contre ses hanches et me surplombe, l'air furax.

— Je vois. La princesse a ses exigences.

Et là, je sais que j'ai tout perdu. Je ferme brièvement les yeux : je n'ai strictement aucune idée de ce qui me donne envie de foirer un entretien professionnel qui pourrait m'ouvrir les portes dont je rêve depuis toujours. À part peut-être l'antipathie qu'elle m'inspire... À croire que j'ai envie de me saborder ! Je n'ai sans doute pas les épaules assez larges de toute manière. Pas assez de talent non plus. L'ambition ne fait pas tout...

— Sans aucun doute, la Princesse a ses exigences, commence-t-elle avec un regard noir. Et surtout l'expérience, tu sais, le p'tit truc qui fait toute la différence ? Des types comme toi, arrogant et imbus de leur personne, j'en ai vu défiler des tonnes. Des chansons comme la tienne, j'en ai à revendre à la pelle. Elles ne présentent aucun intérêt !

Ses paroles, bien que logiques, sont comme un uppercut porté droit dans mes gencives.

— Bien. Je pense qu'on peut s'arrêter là. On est bien d'accord, ça ne mènera à rien.

Pas la peine de me ridiculiser davantage. J'ai merdé sur toute la ligne, mais je suis bien incapable de l'admettre à voix haute...

— En effet. On dirait qu'on est au moins d'accord sur une chose, concède-t-elle en se dirigeant vers la porte. Au revoir Mr Clarks !

Je sors sans me retourner, la porte claque dans mon dos, et je retiens un sourire. Ma carrière aura duré à peine quelques secondes avant que je ne l'écrabouille. Fais chier...

Mais après tout, aucun doute : il y aura toujours des personnes nées du bon côté de la barrière et...tous les autres...

Je traîne les pieds jusqu'à ma voiture, déçu, en colère contre moi-même. L'impulsivité est malheureusement un trait de caractère un peu trop présent chez moi, mais là, ça tire carrément vers un sacré manque de professionnalisme !

Je grimpe dans ma vieille Toyota – dont la carcasse ploie sous mon poids tellement les amortisseurs sont usés – et m'empresse de démarrer pour fuir au plus vite ce cauchemar. À peine arrivé sur l'avenue principale, je donne un coup de volant, me parque sur le bas côté et serre le frein à main. J'ai besoin d'une soirée mecs, de détente, de gonzesses. Il faut que j'appelle Connor pour lui proposer de sortir. Je tapote les poches de ma veste, puis à tâtons le siège passager et même le plancher, sans succès.

Bordel ! Où est mon téléphone ?

Il n'y a pas trente six possibilités : soit je l'ai égaré au concert ou près des loges, soit...

Et merde...

Soit il est dans la loge de River. Je grimace et passe la main dans ma chevelure devenue trop longue. Je n'ai strictement aucune envie d'y remettre les pieds, mais mon téléphone est vital, alors le choix est vite fait ! Je me frappe le sommet du crâne contre le volant, avant de faire demi-tour sans entrain, en direction du parking.

Arrivé à destination, je suis scrupuleusement le chemin par lequel je suis passé, sans succès. Aucune trace de mon portable. Lorsque j'arrive devant la loge, le fameux Gustus, ou plutôt, la brute, fait la garde.

— Miss River ne veut pas être dérangée, m'assène-t-il d'une voix gutturale, en posant la main sur mon torse pour me stopper.

Je serre les poings et me force à répondre cordialement :

— Je n'en ai pas pour longtemps, j'ai juste oublié mon portable.

La brute soupire, mais finit par s'écarter pour me laisser passer. J'entre alors dans la loge sans frapper et la parcours les yeux plissés. J'ai un moment de doute, la lumière est tamisée à l'extrême, on ne distingue quasiment rien. Je suis néanmoins soulagé d'apercevoir mon graal.

— Je suis désolé, j'ai juste oublié mon portable, m'excusé-je en l'attrapant précipitamment, avant de me retourner pour prendre la poudre d'escampette.

Aucune envie de traîner ici...

Je pose ma main sur la poignée, mais une légère plainte s'élève du canapé et mon geste se suspend.

— Tout va bien ?

Je me sens obligé de lui poser la question, mais je n'ose pas me retourner vers elle.

Aucune réponse.

Je fronce les sourcils et effectue un léger demi-tour. Mes yeux se sont accoutumés à la pénombre et distinguent désormais une masse allongée sur le canapé. Je m'en approche et repose la question un peu plus distinctement, soudain inquiet.

— Tout va bien ?

— Mmmhh oui..., répond-elle d'une voix lointaine.

Je m'agenouille devant elle et dégage son visage des mèches dorées qui l'encombrent.

— Tu as bu ? demandé-je, incrédule.

Mais il ne me faut que quelques secondes supplémentaires avant de réfléchir. Vraiment. Je suis parti en tout et pour tout, quoi ? Vingt minutes ? Je doute qu'elle ait réussi à se saouler en si peu de temps. De la drogue peut être ?

J'allume la lampe de chevet pour distinguer plus précisément ses traits et remonte ses manches, pour chercher d'éventuelles traces de piqure. Les restes de son maquillage ont coulé le long de ses joues et laissent des traînées noirâtres disgracieuses qui me mettent mal à l'aise. Elle est clairement dans un état second et je commence à paniquer. La logique voudrait que j'appelle les secours, que je prévienne Gustus, n'importe quoi, mais je reste figé, incapable de me mouvoir.

Mes yeux font le tour de la pièce avant de se poser sur la table basse près du canapé: deux boites y sont couchées, ouvertes et vides. Je me penche et mon cœur loupe un battement quand je lis les inscriptions : Alprazolam et Zolpidem.

Je ne suis peut-être pas médecin, mais je connais ces médicaments, ma mère en prenait pour se tranquiliser, à la fin de sa longue maladie.

Le sang quitte mes joues, je sens des fourmis picoter le long de mes doigts.

Putain, elle a fait une tentative de suicide...

***
Coucou !

Voilà l'intrigue qui se met en route !
Comment va réagir Brody ?

Je serai en vacances ce week end, alors la suite arrivera mercredi prochain 💞

Bonne semaine !  😘

Inflamed (Sous Contrat Chez Addictives)Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin