Chapitre 10

10K 494 155
                                    

« On n'échappe au désir que pour être repris par le désir. »

         J'ai toujours su lire dans les gens, d'une façon ou d'une autre, mais Hayden est bien plus compliqué que ce que j'ai pu imaginer. J'ignore si il me fait la gueule parce que son égo en a pris un coup, ou seulement parce que je l'ai poussé dans la piscine comme un malpropre en lui aboyant dessus. Peut-être les deux.

Le truc, c'est que je ne suis pas du genre à faire le premier pas. J'ai la fâcheuse tendance à laisser ma fierté prendre le dessus et à chercher des torts aux autres.

En attendant qu'il se décide à dire quelque chose, je fais donc mon travail de mon côté. Je range un rayon et j'essaie d'aller le plus vite possible, histoire d'être débarrassée. Hayden fait exactement la même chose un peu plus loin, tout en m'ignorant comme si j'étais transparente.

Quelques minutes plus tard, je m'efforce de faire abstraction des éclats de rire d'Ashley — pour ne pas dire gloussements — qu'elle pousse à chaque fois qu'il ouvre la bouche. Est-ce qu'une femme de trente-trois ans est en train de faire les yeux doux à un jeune de dix-huit ans, ou je rêve ? Qu'est-ce qu'il a qui plait autant, au juste ?

Je lève les yeux au ciel, agacée, et je me redresse. Je donne un coup de pied dans le carton vide pour pouvoir le ramener dans la réserve sans avoir à le porter. Le bruit retentit dans toute la boutique et les deux tourtereaux se retournent subitement vers moi. Désolée de vous déranger, hein.

Je suis sortie de mes pensées quand un groupe de garçons agités et en maillot de bains débarquent dans la boutique. Je jette un œil vers Ashley qui a le réflexe de se rendre immédiatement à la caisse. Ils font le tour de la boutique bruyamment. Je vérifie qu'aucun carton ne traine dans les rayons et au moment où j'ai fini de faire mon petit tour, on m'interpelle.

— Excuse-moi ? lance l'un des mecs.

Je lui souris poliment juste parce que c'est un client, mais quand on est une fille, on n'est jamais vraiment à l'aise face à un groupe de mecs.

— Oui ?

Je prends sur moi quand j'entends ses petits copains ricaner juste derrière et là, tout de suite, je suis heureuse de porter ce vieux tablier moche qui couvre mes cuisses.

— Tu sais où est le rayon des crèmes solaires ?

Son petit sourire narquois me donne la gerbe.

— C'est le deuxième rayon juste derrière toi.

— Tu pourrais me montrer ? Je connais pas trop la boutique.

Bien sûr. Ils viennent tout juste de faire le tour de la boutique, mais il n'est pas capable d'y aller tout seul. Je m'éclaircis la gorge en acquiesçant et il m'emboite le pas. Je ne me sens pas du tout à l'aise, surtout avec toute sa bande qui n'est pas très loin.

— C'est ici.

— Et sinon, t'as un numéro ?

Je roule discrètement des yeux.

— Non, dis-je sèchement.

— Ne fais pas la désirée, je suis sûr que t'as un numéro.

— Pas pour toi, je réponds du tac au tac.

Tous ses potes éclatent de rire. Son visage se décompose.

— Madame a du caractère, lance-t-il.

— Et madame n'a pas de temps à perdre, alors va tenter de relever ton pari ailleurs qu'ici.

Je pourrais m'écraser et disparaitre, mais non.

The Summer JobOù les histoires vivent. Découvrez maintenant