3 - Un imprévu (2)

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Vince

La nuit n'a pas été bonne. Impossible de penser à autre chose qu'à Caroline, à son regard troublant, à sa silhouette longiligne et à ses douces lèvres. Ça va devenir une obsession, ce qui n'est vraiment pas une bonne chose. Être attiré par elle n'est pas un problème en soi, faut juste pas que je perde la tête. Le meilleur moyen est encore d'y succomber. Parfois, le fantasme dépasse la réalité. Résister peut aggraver cette situation, alors autant goûter au fruit défendu le plus vite possible.

Je passerai vite à autre chose après.

Au bureau, je convoque Scott et Serge. Ces deux hommes connaissent tout de ma vie. Ils sont là pour me protéger, protéger les intérêts de ma boîte, et répondre à toutes mes demandes.

Scott est sportif, fan de conduite, il sait piloter n'importe quel avion. Il a suivi une formation pour être garde du corps. Serge, quant à lui, est beaucoup plus discret, plus âgé, plus réfléchi. Il a travaillé pour les renseignements avant de prendre une retraite anticipée. Le bonus ? Il a gardé pas mal de contacts là-bas. Son expérience du terrain compense la tête brûlée de Scott, leur duo fonctionne ainsi depuis sept ans.

Ils ont toute ma confiance.

— Je veux un topo complet sur LFA, leur dis-je une fois qu'ils se sont installés face à moi. Sa direction, les différents services, son passé et les actions en cours. Je veux comprendre comment cette femme en est arrivée là.

— Bien, Monsieur, acquiesce Serge en notant mentalement mes demandes.

— Je voudrais en savoir le plus possible sur un dénommé Gaëtan. Nom de famille inconnu, mais c'est visiblement un proche de Caroline Beaulme. Peut-être travaille-t-il chez LFA. Il me faut ses antécédents et tous renseignements sur sa relation avec elle.

Scott hoche la tête et me lance un drôle de regard. Des deux, c'est celui qui agirait le moins en professionnel. Là où Serge se contente de faire ce que je demande, Scott veut souvent savoir pourquoi, maîtriser le moindre détail, connaître tous les tenants et les aboutissants. D'habitude, ce trait de caractère m'amuse et crée un lien de confiance entre nous. Seulement, concernant l'affaire Caroline, je ne souhaite pas leur donner trop d'informations, non plus. Du moins, pour l'instant.

— Autre chose ? me demande Serge, prêt à se lever.

— Non, précisé-je fermement en jetant un regard noir à Scott.

Celui-ci semble comprendre, car il n'ajoute rien et se lève sans un commentaire avant de suivre son collègue vers la sortie.

Je soupire, agacé de m'être senti mal à l'aise en évoquant mon intérêt pour Caroline. Le téléphone posé sur mon bureau clignote et je me frotte les yeux quelques secondes avant de décrocher.

— Monsieur Malt, je suis désolée de vous déranger, commence Mélanie, ma secrétaire personnelle. J'ai Mademoiselle Silice au téléphone. Dois-je vous la passer ?

— Oui, Mélanie, je vais la prendre. Merci.

— Vince, tu es un beau salaud !

— Bonjour, Chloé.

— Tu m'as lâchement abandonnée hier, reprend-elle, furieuse. Tu m'as bien utilisée. T'es content ?

— Tu sais que ce genre de soirée n'est pas ma tasse de thé.

— T'aurais pu me raccompagner toi-même au lieu d'envoyer ton gorille ! T'as passé la nuit avec elle, c'est ça ?

— Mêle-toi de tes affaires, grondé-je, agacé par cette crise de jalousie.

— Mais merde, j'ai le droit à une explication, non ? J'ai tout fait pour que nous soyons invités à cette foutue soirée et tu me lâches pour cette planche à pain ?

— Chloé, tu savais pourquoi je venais là-bas, rappelé-je plus calmement. Et je ne suis pas rentré avec elle.

Silence au bout du fil.

— Je suis désolée, murmure-t-elle d'une voix mielleuse. À plus tard alors.

— C'est ça.

Je raccroche en soupirant. Coucher avec elle était une erreur. Elle se croit tout permis, maintenant. Une amie devrait rester une amie. Ce n'est pas bon de mélanger.

J'ai à peine le temps de finir quelques dossiers que mon téléphone sonne encore. Mais, cette fois, c'est mon portable. Une sueur froide coule dans mon dos lorsque je vois le numéro s'afficher. Même si je n'ai pas voulu l'enregistrer, je le connais par cœur.

Je décroche, sachant déjà que ma journée vient d'être plombée.

— Monsieur Malt ?

— Inspecteur. Que puis-je pour vous ?

— Vous êtes bien familier avec le gang de Krismore, n'est-ce pas ?

Putaing.

Ma respiration se bloque quelques secondes et je me force à inspirer calmement. Je hais ce nom, il me rappelle tellement de mauvais souvenirs. Une période que j'aimerais bien effacer définitivement de ma mémoire.

— Oui, réponds-je finalement.

— Alors, j'aurais besoin de vous. Rapidement. Une opération se prépare, je voudrais votre analyse.

— J'arrive ce soir.

Après avoir raccroché, je contacte Scott pour qu'il prépare le jet. Je préviens ensuite Mélanie de mon absence et j'apprécie sa discrétion. Elle ne me pose aucune question, se contentant de gérer mon agenda en déplaçant mes rendez-vous.

Je prends l'ascenseur pour accéder à l'appartement au dernier étage de l'immeuble. Cet endroit me sert de refuge. Je ne prends pas toujours le temps de rentrer chez moi, surtout quand je bosse tard. Seuls Scott et Serge sont autorisés à venir ici. Avec les horaires que je leur impose, ce trois-pièces est à leur disposition vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

J'enlève mon costume et ma cravate, puis enfile une tenue simple. Un jean, un tee-shirt et une veste en cuir noire. Je prépare rapidement quelques affaires que j'entasse dans un sac tout en essayant de maintenir mon passé à distance. En pure perte.

Alors que la voiture m'emmène vers l'aéroport, des images de mon enfance surgissent. Je revois le visage de mon frère, son insouciance que j'ai essayé de préserver malgré le milieu dans lequel nous évoluions. Je ressasse sans cesse les épisodes de notre adolescence et la trahison qui l'a anéanti. Un goût amer me reste en bouche, j'enfile mes lunettes de soleil.

Le jet atterrit quelques heures plus tard. Je reste insensible au nom de la ville qui s'affiche en grosses lettres. Marseille est désormais un lieu comme un autre. Je ne veux plus associer ma vie à ces quartiers délabrés et malfamés. J'en suis sorti. Revenir ici n'est pas une partie de plaisir. Je me fais violence. J'ai un objectif que je veux atteindre plus que tout. Ce foutu gang qui a pourri mon adolescence va tomber, quoi qu'il m'en coûte.

Scott me conduit au poste qu'il commence à connaître comme sa poche. En route, je réfléchis à la suite à donner avec Caroline. Il faut que j'aille plus loin dans la séduction. Voir si elle est vraiment capable de coucher avec quelqu'un qui détient des intérêts dans sa boîte. Et pour ne pas perdre la tête, je dois limiter nos rapports à quelques semaines. Ce serait moins risqué.

Ma décision est prise.

Cette perspective me réjouit...

Caroline Beaulme, nous allons nous amuser.

*** 

Alala... parfois, il me fatigue... 🤦‍♀️

Love target (sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant