Chapitre 5

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RIVER

Ma chambre attitrée a beau être d'un minimalisme extrême, elle est toujours plus luxueuse que ce dans quoi j'habite. Cette pièce carrée me fait penser aux décors futuristes décrits dans certains livres rescapés de la Catastrophe que j'ai pu lire. D'un blanc immaculé, ses murs sont brillants, comme recouverts de verre. Un grand lit double trône contre le mur du fond, encadré par deux tables de chevet blanches. Du même acabit, je trouve une commode, une bibliothèque, un canapé. Ma chambre comporte également deux portes. L'une renferme un dressing rempli de vêtements chics ou casuals à ma taille, l'autre donne sur une petite salle de bain privatisée. Une douche, des toilettes, un lavabo et un petit meuble dont les étagères sont remplies de serviettes de bains et autres accessoires en tous genres. Je ne peux m'empêcher de penser à ma mère. Qu'est-ce qu'elle penserait de ces pièces ? Est-ce qu'elle s'y sentirait bien et reposée ?

Un bip sonore interrompt mes pensées, me faisant pivoter vers l'une des tables de chevet où est posé un petit engin cylindrique, éclairé d'un halo bleu. Je le prends en main et en cherche le bouton, comme sur la tablette que je manipulais tout à l'heure. Sauf que sur ce cylindre, je ne vois aucun bouton, aucune grosseur. Et puis je comprends qu'il est tactile, quelques symboles sont lumineux. Une enveloppe clignote, je pose mon doigt dessus. Je sursaute lorsqu'une image – si je peux l'appeler ainsi – en sort. Littéralement. Ce n'est pas comme la télé : la forme prend place dans l'air, dans le vide, dans le rien ! Bordel !

Je passe ma main au travers, l'image défile, sans que je ne sente quoi que ce soit au bout des doigts. Je prends un petit moment à m'adapter à ce nouvel objet qui me paraît si irréel, avant de m'asseoir et de considérer le message que j'ai reçu. C'est une vidéo. Une jeune femme qui semble trop parfaite pour être humaine apparaît. Son visage paraît étrange : il est synthétique. Elle n'a aucun défaut, tout est symétrique : de son grain de peau lissé à son nez ni trop grand ni trop petit, en passant par sa bouche parfaitement dessinée. Ses yeux sont d'un bleu perçant, ses cheveux noirs d'une brillance extrême.

— Bordel, t'es qui, toi ? lancé-je, émerveillé.

— Bonjour River Hadley. Je suis Kira, votre assistante de vie.

Est-ce que ce machin peut me voir ? Je lève mon bras au-dessus de ma tête, son regard suit le mouvement. Je n'en reviens pas.

— Est-ce que tu es réelle ?

Son visage sourit poliment.

— La technologie fait des merveilles. Elle rend l'impossible possible. Alors oui River, je suis réelle, bien que tu ne puisses pas me toucher ni me rencontrer.

Et elle se dit réelle ?

— Qu'est-ce que tu es ? Une sorte d'alien ?

Une fois, alors que je courais près de l'ancien centre-ville, j'ai trébuché sur quelque chose. En m'abaissant, j'ai trouvé un livre dont la couverture était en cuir, mais confectionnée et rafistolée par quelqu'un, c'était flagrant. Il pleuvait – comme souvent – alors il était trempé. Je l'ai apporté à la maison, l'ai laissé séché près de la cheminée et quand je l'ai ouvert pour la première fois et que j'ai vu ces lignes noires, mon sourire s'est agrandi. J'ai passé une journée entière à le lire : une histoire géniale qui parlait d'aliens. Ils avaient pris possession de la Terre, savaient tout des humains, ils les dominaient intellectuellement et, bien sûr, se révélaient malintentionnés.

— Je suis une intelligence artificielle, répond Kira. Je suis là pour répondre au moindre de tes désirs ainsi qu'à toutes tes questions. Je suis aussi là pour te rappeler certaines choses importantes et pour te transmettre des messages.

Elle est un peu intrusive, celle-là. Est-ce qu'elle peut lire dans mes pensées ? Ma question me paraît stupide, mais pour être sûr, je préfère m'en assurer. Je pense le plus intensément possible.

ALCYON (Sous contrat d'édition) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant