7. Une rencontre percutante (version éditée)

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Alinor pénétra dans le grand hall où de nombreux soldats normands étaient rassemblés. Certains étaient attablés devant des chopes d'ale, d'autres lançaient des dés ou conversaient. Plusieurs chevaliers faisaient cercle autour d'une table dans un coin de la pièce. Intriguée, Alinor s'approcha, en prenant garde de baisser la tête pour passer inaperçue. Elle jeta un coup d'œil discret et vit ce qui retenait ainsi leur attention : Gautier de Fougères et son second étaient en train de jouer aux échecs. Rassurée par la présence du baron dans la salle et satisfaite de savoir qu'il allait être occupé pendant un petit moment, la jeune fille rebroussa chemin pour regagner la cuisine. Elle se glissa dans le réduit, en ferma la porte, puis se précipita vers le mur du fond. Elle effleura les pierres à la recherche du levier qui ouvrait le passage secret, puis l'abaissa et poussa le panneau qui se referma sans bruit derrière elle. Alinor n'avait pas pris la peine d'allumer une chandelle, car elle connaissait par cœur les corridors tout comme les passages dérobés de la forteresse. Elle avait mémorisé avec exactitude le nombre de marches à gravir ou à descendre pour atteindre chaque étage ainsi que le nombre de pas à effectuer pour trouver les panneaux secrets.

Avec empressement, elle grimpa l'escalier et s'engouffra dans le boyau qui desservait le premier niveau. Elle s'arrêta devant le mécanisme d'ouverture du panneau qui menait à l'étude seigneuriale, colla son oreille contre la paroi pour être sûre qu'il n'y ait personne avant de tirer sur l'anneau. Le vantail glissa, lui permettant de se faufiler dans la pièce. Elle prit bien garde de laisser le passage ouvert. Avec fébrilité, elle entreprit de fouiller le bureau à la recherche de parchemins. Très vite, elle découvrit deux rouleaux portant le sceau de Guillaume de Normandie. Elle les déroula pour prendre connaissance de leur contenu. Elle eut une pensée reconnaissante pour ses parents qui avaient exigé que tous leurs enfants sachent lire et écrire. Il était assez rare que les nobles saxons accordent autant d'importance à l'instruction de leur progéniture, surtout à celle des filles.

Au fur et à mesure de sa lecture, Alinor sentait croître sa colère contre l'envahisseur normand. Mais, en traduisant le second document, une vague d'espoir naquit en elle. Elle était presque arrivée à la fin, quand elle entendit du bruit derrière la porte de l'étude. Elle replaça hâtivement les parchemins à leur place et se précipita dans le passage. Elle n'eut que le temps de refermer le panneau avant que Gautier et Thibaud n'entrent dans la pièce. Percevant le son de leurs voix, Alinor colla l'oreille au mur, dans l'espoir d'entendre leur conversation, mais en vain ; il lui fut impossible de distinguer leurs paroles.

Profitant du fait que le baron normand était occupé dans le bureau, la jeune fille décida d'aller explorer l'antre de son ennemi. Elle savait par sa mère et Geoffroy que, contre toute attente, le Normand avait laissé l'usage de la chambre seigneuriale à lady Judith se contentant d'investir celle d'Edwin. Son cousin, quant à lui, avait pris ses quartiers avec les autres soldats normands dans les baraquements en torchis de la haute-cour.

Alinor monta au deuxième étage, actionna le levier, puis tira le panneau de bois qui donnait accès à la chambre de son frère. Elle fit rapidement l'inventaire des possessions du chevalier. Il avait relativement peu d'effets personnels. Ses habits étaient de bonne facture, mais simples et sans fioriture. Son équipement de guerrier était ce qui retenait le plus l'attention. D'après ce qu'elle voyait, ce baron était plus un homme de guerre qu'un homme de cour. Ses armes étaient bien entretenues, et il possédait plusieurs sortes d'épées avec de belles lames et des poignées ouvragées. Dans ses coffres, Alinor trouva plusieurs justaucorps de cuir, des tabards ainsi qu'un pourpoint matelassé. Sa cotte de mailles était d'excellente qualité. Son écuyer devait en prendre grand soin, car les anneaux sombres brillaient et il n'y avait aucune trace de rouille.

Combat d'amour - Tome 1 [ 2018 ADA Editions - 2023 auto-édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant