- Ouais... L'autre. »

La poignée se baisse et mon cœur semble chuter d'un étage voire deux ou trois, il est là.

Il est toujours là.

Ce garçon que j'ai choisi pour voisin de table sans savoir ce qui m'attendrait par la suite, ce même garçon qui hante mon esprit avec ses expressions me causant des insomnies.
Mes pas se font plus lents, comme pour profiter du spectacle qui m'est offert en cet instant présent. Cet instant où les bruits sonores de fond n'existent plus, où mes amis ne deviennent que des ombres à la limite de l'invisible et où cet être scintille timidement à la manière de la lune exclue et fragile.

Je le contemple au ralenti lui et sa beauté introvertie, sa mâchoire finement tracée établie un lien avec ses oreilles parfaitement percées.
Et mes yeux ne peuvent s'empêcher de fixer ses lèvres tremblantes tandis que sa main pianote sur sa table dans un mouvement répétitif et synonyme de nervosité.

Certaines fois il remet ses cheveux sur son visage pour mieux se cacher, pour se fondre dans la masse. Son pied droit tape en continue sur le sol et son regard cherche une direction ou peut-être une boussole.
Il semble seul face au monde, personne ne lui parle, personne ne le regarde, il est délaissé et ça me fait mal.

« - Chan, pourquoi ce gars est tout le temps seul ?

Mon ami s'arrête de parler pour me regarder, ses pupilles dégagent un éclat que je ne leur connaissais pas. Il s'approche légèrement de moi et dépose ses mains sur mes épaules, je devine qu'il est sérieux et que ce qu'il compte me répondre est important.

- Ce mec est pas fréquentable Jisung, il est dangereux. Il faut que tu évites de lui parler d'accord ? Tu pourrais amèrement le regretter, c'est un... monstre.

- Mais qu'est-ce qu'il a fait pour mériter autant de haine ?!

- Ce qu'il a fait ?... Chuchote-t-il en s'écartant pour s'adosser contre un mur, il est venu au monde. »

La sonnerie retentit et les étudiants oublient le plus important pour s'assoir à leur place seulement moi je n'oublie pas, les paroles de mon aîné restent bloquées dans ma tête pleine de tracas.

Ce n'est que lorsque le professeur arrive que je m'assois, mes yeux dérivent trop facilement sur mon voisin qui lui ne dit rien.
J'entends l'homme déblatérer contre son propre discours un peu usé à force d'être utilisé même lui en a l'air fatigué. Et mes yeux ne quittent malheureusement pas mon camarade, ils fixent ce qu'ils arrivent à discerner sous cet amas de cheveux indéterminés.

Je l'entends respirer de manière déchirante, un souffle saccadé qui ne peut qu'attiser ma pitié.
Alors dans un geste peut-être un peu trop maladroit je déchire un morceau de papier de mon cahier pour y écrire ce que me dictent mes pensées.



« Salut ! On a encore jamais eu l'occasion de parler, comment tu t'appelles ? :) »




Il tourne la tête en ma direction et l'espace d'une seconde, j'ai l'impression que son regard s'humidifie. Je pourrais y plonger et m'y noyer sans peine, ses pupilles m'hypnotisent.

Je lui adresse un sourire que je qualifierais de rassurant et à l'abri de toute autre attention je lui tends la main sous nos tables espérant secrètement qu'il me rende cette poignée banale.

The Words Untold [MINSUNG OS]Where stories live. Discover now