Chapitre 2 : la rencontre

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— Pardon, excusez-moi. Pardon...

Il devenait de plus en plus difficile de circuler librement dans les rues de New York. À croire que tout le monde dans cette ville s'était donné rendez-vous au même endroit.

— Pardon, pardon, excusez-moi, ai-je crié à tue-tête. Pardon, je suis pressée.

Mais rien à faire. Je n'arrivais pas à me faufiler entre tous ces gens agglutinés au milieu de la rue. Et crier ne faisait pas avancer les choses. Les gens n'en faisaient qu'à leur tête. Et de toute évidence, je n'étais pas la seule à avoir été rattrapée par le temps.

Tout autour de moi, des dizaines et des dizaines d'individus en complet strict ou tailleur chic s'égosillaient pour tenter de faire avancer les plus récalcitrants. En vain... La foule a fini par se mettre en mouvement.

Elle a progressé assez rapidement, mais au bout de quelques instants, elle s'est de nouveau arrêtée. Je me suis frayée tant bien que mal un passage entre deux grandes armoires à glace soudées à leur téléphone portable et me suis retrouvée au bord du trottoir.

De l'autre côté de l'avenue bondée, le feu pour les piétons était repassé au rouge.

Un coup d'œil à ma montre m'a informée que mon retard s'accumulait. Ce maudit feu rouge ne pouvait-il pas se décider à passer au vert pour que je puisse traverser ? La foule était impatiente. J'étais impatiente.

Je ne voulais surtout pas être en retard... Pas encore. Pas aujourd'hui. Pas cette fois. J'étais pourtant partie à l'heure.

Je ne devais pas être la seule à ronger mon frein au feu rouge. Des gens poussaient dans le fond et d'autres rouspétaient. Certains arrivaient même à faire les deux en même temps. Et plus étonnant encore, d'autres parvenaient à tenir à la fois leur téléphone portable, leur attaché-case et leur thermos de café, le tout en poussant les gens, en rouspétant et en tenant une conversation polie avec Dieu sait qui au bout de la ligne.

Tout le monde parlait en même temps – criait en même temps.

Une véritable cacophonie.

Le témoin lumineux est repassé au vert. Enfin ! Mais avant même que j'aie pu faire un pas en avant, les gens pressés ont poussé derrière moi. Une marée humaine, qui s'est déversée d'un trottoir à l'autre comme une force de la nature implacable.

J'ai dû lutter pour m'extraire de la masse une fois de l'autre côté de l'avenue. Dès lors, libre, j'ai pris la première rue qui se présentait sur ma gauche et l'ai remontée sur plusieurs mètres avant de bifurquer au carrefour suivant. Là, j'ai redoublé d'effort jusqu'à ce que ma destination soit enfin en vue : une volée de marches menant à une porte en verre.

L'entrée d'une petite brasserie située juste au coin de la rue.

Le Palace des Anges.

À l'intérieur, c'était l'effervescence.

Je comprenais mieux à présent pourquoi il y avait tant de monde dans les rues : c'était l'heure du déjeuner. Et le Palace des Anges méritant bien sa réputation, rien d'étonnant à ce que presque toutes les tables soient occupées. Les serveuses étaient débordées.

La porte d'entrée venait à peine de se refermer derrière moi quand j'ai vu une silhouette féminine, drapée d'un tablier bleu, se détacher de la foule et s'avancer vers moi. Lorsque j'ai reconnu son visage, je l'ai rejointe à mi-chemin et me suis aussitôt confondue en excuses avant qu'elle n'ait eu le temps de me faire le moindre reproche :

L'âme ÉgaréeWhere stories live. Discover now