CHAPITRE IX

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Ce dimanche matin, je suis réveillée à cinq heures du matin, comme l'indique le réveil sur ma table de chevet. A mon grand désespoir, je me rends compte que je ne retomberai pas dans les bras de Morphée. Allongée sur le dos, à fixer le plafond quelque peu décrépi au-dessus de ma tête, je décide de me lever et d'aller courir.

Je n'en ai pas eu souvent l'occasion depuis que j'ai emménagé ici, mais il est temps que je me rattrape. J'enfile mon pantalon de course, une brassière et le tee-shirt de l'équipe d'athlétisme du lycée auquel je faisais partie. Je lasse mes baskets. Dans le fouillis du meuble de ma salle de bain, je récupère un élastique et en descendant les escaliers, je réunis mes cheveux en une queue de cheval haute bien serrée.

Je passe le seuil de l'immeuble. L'air frais du début de matinée, mêlé à celui de l'automne me fait frissonner mais il m'encourage à vite me mettre à courir. Je décide d'aller courir là où Julian m'a emmené il y a deux jours. C'était un lieu apaisant et je doute qu'à cette heure-ci il soit bondé.

Malgré mon essoufflement, je persiste. Peu à peu, je retrouve mes aptitudes et les sensations qui me gagnent quand je cours. J'aime courir. J'aime sentir l'adrénaline circuler dans mes veines. J'aime sentir l'envie d'aller plus vite me guider. Et ce sentiment d'invincibilité, de puissance. Plus rien ne peut m'arrêter.

J'ai commencé à courir avec mon père très jeune. Et j'ai vite compris que l'on partageait plus qu'un moment ensemble. Alors je n'ai plus arrêté. Lors de ses missions, quand j'allais courir sans lui, je pouvais l'imaginer à l'autre bout du monde, dans son paysage de guerre et j'avais encore cette impression de connexion entre lui et moi. J'avais la sensation de pouvoir lui transmettre tout mon courage même à travers les centaines de kilomètres qui nous séparaient.

J'arrive sur la grande allée. En face de moi le soleil se lève, dorant peu à peu le ciel de ses rayons lumineux. Au bout, je parviens à distinguer le manège. Toujours aussi imposant. Ma soirée avec Julian me revient en mémoire.

Avec le recul, je ne sais plus quoi en penser. J'ai vraiment apprécié ses petites attentions et le fait qu'il cherchait à me draguer en douceur. Je n'ai pas du tout voulu pousser les choses pour rendre jaloux Thomas. Non, je me suis laissée portée. Mais le fait, que je le fasse avant tout pour mon ex, continue de me trotter dans la tête. Je ne voudrais pas blesser Julian.

Seulement, je suis perdue sur les sentiments que j'éprouve pour Thomas. Sont-ils réels ? Sont-ils ceux d'il y a trois ans ? Parce que ce n'est pas le Thomas d'aujourd'hui que j'aime. Pour chasser toutes ces réflexions, j'accélère et pique un sprint dans l'allée, vide.

Au bout d'une heure de footing, je rentre à l'appartement. Je prends le temps de m'étirer en effectuant soigneusement les gestes que mon père m'a appris. Les anciennes mèches de ma frange, collent sur mon front et mes muscles sont encore en ébullition. Je me sens dégoulinante de sueur mais avec le sentiment du devoir accompli.

Dans ma petite cuisine, je remplis un bol de céréales et verse le lait par-dessus. Je le dévore tout entier avant d'aller prendre une douche.

Sous l'eau tiède, je peux sentir les couches de sueur se retirer de ma peau et détendre mes muscles. Je pourrais passer autant de temps sous la douche qu'il m'en a fallu pour me retrouver dans cet état. Enroulée dans une serviette, je me sens déjà envahie par cette plénitude que l'effort me procure toujours. Je suis prête pour réviser des heures mes statistiques.


J'ai rendez-vous à la bibliothèque universitaire avec Ricki dans quinze minutes. Quand j'arrive, c'est moi qui suis en retard pour une fois. Elle me tourne le dos, assise en face d'une fenêtre donnant sur le jardin de l'école. C'est très sympa ces grands arbres qui se parent des couleurs orangées de l'automne.

DIS-LE (nouvelle version)Where stories live. Discover now