CHAPITRE V

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Le lendemain matin, j'émerge seulement à onze heures et je suis rapidement gagnée par une sorte de nostalgie quand je pense que c'est mon premier samedi matin toute seule à Angers. Je ne prends mon service qu'à quatorze heures.

Avec douleur mais courage, je m'extraie de mon lit pour me servir un verre d'eau et j'en profite pour avaler un comprimé pour calmer ma migraine. Je me poste devant l'unique fenêtre du séjour qui est aussi la pièce principale et tente d'ouvrir les rideaux. Mais la lumière qui en émane me pique les yeux et je les referme aussitôt.

Abattue, je me rallonge sous la couette en pensant à mettre mon réveil à sonner si jamais je me rendors d'ici là. Seulement je suis à deux doigts de retomber dans les bras de Morphée quand mon portable sonne.

J'hésite à répondre et finalement je me dis que j'en ai besoin. Entendre la voix de sa maman c'est toujours rassurant et peut-être réussira-t-elle à faire disparaître ma petite déprime de lendemain de soirée.

- Maman.

- Alors comment s'est passé ta soirée ? Raconte, je veux tout savoir.

Il fallait que je m'y attende. A chaque fois elle me tanne pour que ma langue se délit sur tout ce qu'il s'est passé.

- Amusante, je prends le temps de choisir mon mot.

- Tu as fait de nouvelles rencontres ?

Evidemment elle entend par-là, des garçons.

- Des beaux jeunes hommes ?

Qu'est-ce que je disais.

- Oui mais on n'a pas beaucoup échangé.

Ce qui est vrai. J'ai bien rencontré ce garçon qui a accepté de danser avec moi mais on n'a pas eu le temps de se taper la causette. Je ne sais même pas comment il s'appelle.

- Comment fais-tu pour ne pas avoir de petits amis ? A ton âge, et à l'université qui plus est, je les enchainais sans scrupule, elle rit de bon cœur.

- Ils ne sont pas pour moi, c'est tout.

- Tu ressembles tellement à ton père. Il savait très vite si les personnes qu'ils rencontraient deviendraient ses amis.

- Il m'a appris à voir le bien chez les gens. Mais à avant tout savoir si elles ne seraient pas nocives pour moi.

Un silence s'en suit comme chaque fois que l'on évoque papa. Et à ma grande surprise, c'est elle qui reprend la parole la première.

- Tiens, j'y pense. Devine qui j'ai croisé ce matin au marché.

Comme je n'en sais rien et que je n'ai pas trop la tête à jouer aux devinettes, je donne deux ou trois prénoms avant de m'avouer vaincus.

- Virginie, la mère de Thomas.

Oui je sais qui est Virginie. Une boule d'anxiété me prend la gorge en entendant son nom. Je ne l'ai pas revu depuis que Thomas et moi avons rompu et je me portais très bien jusque-là.

- Ah, je lâche mollement.

- Elle m'a dit que son fils était dans la même université que toi. Tu l'as sûrement croisé.

Plus que tu ne peux te l'imaginer maman, j'ai envie de lui répondre. Mais je n'en fais rien. Cela ne ferait qu'alimenter la conversation et si on pouvait parler d'autre chose, ça m'arrangerait grandement.

- Sûrement.

- En plus il est en sociologie comme toi. Mais tu sais, il a bien changé depuis vos années collèges. Elle m'a montré une photo. Il est devenu vraiment mignon.

DIS-LE (nouvelle version)Where stories live. Discover now