Lui dire adieu

Depuis le début
                                    

- Peut être que c'est lui, je veux dire, peut être que c'est Hayes? Il est là depuis le début de la cérémonie et n'est toujours pas parti. 

Il me dévisage longuement avant de me répondre

- Je ne crois pas à ces trucs là, souffle t'il.

- Et moi j'ai envie d'y croire, murmurais-je

Tout le monde est parti. Il n'y a plus que nous deux. Mon père nous attend à l'extérieur du cimetière et nous laisse le temps qu'il faut. On est toujours assis sur ces chaises pliantes, a l'ombre de ce saule pleureur. Cet endroit est paisible. Idéal pour un repos éternel. Son repos éternel. Un coup d'œil vers le haut confirme que l'oiseau est toujours là, nous surveillant du haut de son perchoir. Il ne bouge presque pas, se contentant de remuer sa tête de temps à autre. Je continue de le regarder pendant un moment puis détourne mon regard vers la tombe de Hayes. 

Puis, de nouveau, les images de cette journée à l'hôpital. De l'après. J'avais eu le feu vert du médecin pour sortir de l'hôpital dans la soirée. Médicalement, j'étais apte. Moralement, je ne l'étais pas. Mais entre rester et être sous médicaments ou rentrer chez moi, le choix fut vite fait. Je voulais rentrer. Retrouver mes repères, même s'il manquait quelque chose d'essentiel. Même si nous n'étions plus que deux. On était partis, en nous retournant presque à chaque pas, comme si on allait nous rattraper et nous dire de revenir, qu'il s'était réveillé. Que c'était une erreur. Mais non. On s'est retrouvé dehors, sur le parking, avec l'espoir que ça pouvait encore arriver avant qu'on atteigne la voiture. Mais rien ne s'était produit. 

Jamais Storm n'avait roulé aussi lentement. Lui aussi espérait. Lui aussi y croyait. 

L'appartement nous a paru bien vide lorsque nous avons franchi la porte d'entrée. Le silence était oppressant. Je m'attendais à voir surgir Hayden, et qu'il se jette dans nos jambes tel un boulet de canon. Son rire me manque aujourd'hui. Il me manque terriblement. Sans un mot, je m'éloigne de Storm, et m'avance dans le couloir qui mène aux chambres. Je passe sans m'arrêter devant la notre, puis stoppe devant celle qui aurait du être la sienne. Celle qu'il aurait partagé avec Hayden. La porte est fermée. Je pose la paume de ma main à plat dessus et la pousse légèrement. Sans un bruit, celle-ci s'entrouvre et mon regard tombe aussitôt sur le petit lit à barreaux qui restera vide.

Au bout d'un temps qui semble interminable, nous nous levons. Ensemble. Et approchons lentement. De plus en plus près. Jusqu'à ce que le bout de nos chaussures touchent les fleurs qui jonchent le sol.

- Il y a tellement de fleurs, souffle Storm

Oui, il y en a tant. Beaucoup trop même. Elles sont arrivées de partout. De chaque état où se trouve un chapitre du club. Des mots les accompagnaient, nous avons pu en lire quelques uns, mais pas tous. C'était trop douloureux de voir ces mêmes mots, qui se répétaient d'un message à l'autre. Nous les lirons plus tard, quand nous serons prêts à le faire.

Storm dépose un baiser sur le sommet de mon crâne, et resserre son bras autour de mes épaules. Je lève mes yeux vers lui et l'observe. Le manque de sommeil se voit sur lui. Il n'a pratiquement pas dormi depuis plusieurs jours et est sur le point de s'effondrer. Je me demande de quelle façon nous allons surmonter ça. Si nous y arrivons.

- Tu crois qu'il le voit tout ça? murmure t'il, le regard rivé sur les fleurs. Qu'il se rend compte à quel point il aurait été aimé? A quel point il nous manque?

Seules les larmes qui coulent le long de mes joues répondent à sa question. Oui il le voit. Oui il le sait. Il nous manque tellement...

La chambre parait si vide d'un seul coup. Je continue de fixer ce petit lit qui restera vide à jamais, puis cette table à langer qui ne servira pas. Les paquets de couches étaient déjà là, prêts à être utilisés. Tout comme les lingettes, puis la crème pour l'après change. Tout comme...Je ferme mes yeux et chasse les larmes qui perlent, une fois de plus, au bord de mes paupières. Je sens la présence de Storm derrière moi. Puis ses mains qui m'enlace. Sa joue se colle à la mienne et nous restons là, à regarder ensemble, cette chambre qui, désormais, ne sera plus que le refuge d'une seule personne. 

Black Angels Tome 2 (Version n°2 suite)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant