Chapitre 6

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A l'arrière de la décapotable d'Élise, offerte par ses parents quelques semaines plus tôt pour ses dix-huit ans, je pensais à mon vélo qui me servait de moyen de locomotion.

La vie était injuste.

Les parents d'Élise gagnaient très bien leurs vies, son père était cadre dans une usine du coin et sa mère pharmacienne. Quant à Madenn, les siens étaient divorcés depuis deux ans et au lieu d'être désemparée comme certains, elle avait très bien pris la chose. Pour elle, "divorce" rimait avec deux fois plus de cadeaux, deux fois plus d'argent de poche et deux fois plus de moyens de pressions. Elle se plaisait à dire qu'elle n'avait jamais été aussi heureuse depuis que ses géniteurs luttaient sans merci pour avoir le privilège d'être dans ses bonnes grâces.

—Quand je pense à l'autre abruti...

Et voilà Madenn et sa litanie. Son copain sublime un jour, abruti les autres jours.

—Quand vas-tu comprendre que ce mec n'est pas pour toi ? grogna Élise en démarrant la voiture.

—Si tu avais la chance d'être passé dans son pieu, tu ne poserais pas cette question débile...

Je souris et n'entendis pas la réponse acerbe d'Élise.

J'avais toujours cru que je commencerais réellement à vivre quand je serai à l'université. Mais voir ma mère partir sur ce brancard fut comme un déclic. Je ne devais pas attendre même quelques mois, c'était maintenant ! Maintenant que je devais m'amuser et faire la fête. Maintenant que j'allais apprendre à vivre pour moi et non pour ma mère.

En fait, je pensais vivre les trois mois les plus longs de ma vie, mais je prenais désormais ces quatre-vingt-dix jours comme une chance de m'amuser avant l'université.

La salle des fêtes se trouvait à moins de deux kilomètres de chez moi, à la sortie de la ville. Et en coupant par l'étendue d'herbe, j'étais chez moi en quinze minutes à pied. Je l'avais fait si souvent quand je devais partir plus tôt que mes petits camarades, à l'heure où la fête commençait réellement. Vérifier que ma mère ne traînait pas n'importe où, ou bien décidait de foutre le feu à la baraque. Et ce soir, je me promis de partir quand je serai trop épuisée pour continuer à danser.

Beaucoup de voitures étaient garées, ainsi que des motos et scooters. Élise jura et nous cracha :

—Nous avons quinze minutes de retard !

Madenn soupira et je fis de même.

Les filles descendirent de voiture, je tentais de me calmer pour ne pas perdre mon sang froid et courir jusqu'à chez moi pour enfiler un bon vieux jeans.

—Ce soir tu t'amuses ! ordonnai-je à la moitié de mon cerveau qui avait envie de rentrer sous terre.

Un pied, deux pieds et j'étais dehors.

De la musique électro agressa mes oreilles et Madenn nous prit chacune un bras.

—Allez, les gonzs ! Regardez nous ! Ce soir, la nuit nous appartient !

J'éclatai de rire et Élise leva les yeux au ciel sans pouvoir retenir un sourire.

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—Madenn !

Thomas venait vers nous, le Thomas où plutôt "l'abruti"d'aujourd'hui. Madenn releva la tête, serra mon bras plus fort et continua d'avancer.

—Putain Madenn ! Arrête de faire ton emmerdeuse !

—Tu me gaves ! Lâche-moi ! Ce soir, j'ai décidé que j'étais célibataire !

Rien que 3 mois... Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant