Métro, Boulot, Dodo

Metro - 1

Ils étaient chacun à l'autre bout du wagon. Un tout au fond, une tout devant. Il était assis vers l'avant, elle était assise vers l'arrière. Le wagon accélérait toujours, le bruit habituel résonnait et les empêchait d'entendre la musique de leur écouteurs. Leurs corps se balançaient légèrement, comme si le wagon passaient des petits dos d'ânes sans arrêt.
Elle regardait les affiches, qui étaient toujours les mêmes, des publicités dont elle ne se sentait pas consternées mais qu'elle lisait pour passer le temps, pour ne pas penser. Puis elle le remarqua. Lui qui était tout simplement assis là et dont la vie avait fait qu'il monte dans ce même wagon à cette même heure. Qu'elle ne savait rien de lui, qu'elle allait bientôt le quitter des yeux et très certainement l'oublier. Elle lui jeta un coup d'œil, lui qui attendait tout au fond, le dos appuyé contre une affiche publicitaire. Elle le fixa sans détacher son regard, perdue dans ses pensées mais consciente que ses yeux étaient fixés sur lui. Il la regarda à son tour, elle détourna les yeux. Elle se dit qu'elle n'était vraiment pas discrète et fit comme si elle regardait les sièges vides, qui avaient l'air très intéressants à examiner tout à coup. Puis elle jeta un regard par la fenêtre. La fenêtre où s'échappait seulement parfois les lumières du souterrain et quand elle était ouverte, un grincement infernal. Elle le vit. Son reflet était posé sur la vitre, comme s'il était derrière, ou comme une photo. Il ne la regardait plus. Il regardait quelques mètres devant lui, pensant sûrement à sa journée ou à ce qu'il envisageait de faire de sa soirée ou des jours à venir. Le wagon ralentit, la gare défilait maintenant derrière la fenêtre. Elle se leva, posa sa main sur la poignée, prête à l'enclencher. Elle le regarda une dernière fois. Il faisait de même. Un bruit de sifflement retentit, ils ouvrirent leurs portes respectives puis s'en allèrent de leur côté, un à droite, l'autre à gauche.
Loin du métro parisien.