Ganadi - Tome I : Le pays de Ménai

Chapitre quatre

Une dague dans chaque main, Jen était prête à combattre. Ganadi encocha une flèche et banda son arc. Son ami en revanche avait pâli. Il semblait terrifié.

— On a faim. On veut juste vot' cheval. Et vos sous. Vos vêtements ont l'air chauds aussi, siffla la fille en haillons entre ses dents sales.

— La ferme ! tonna le premier qui avait pris la parole. Ne perdons pas de temps. Si vous vous laissez faire, vous n'aurez presque pas mal, dit-il à l'égard des trois amis. Par contre, si vous résistez, ça fera... très mal. Un rire roque sortit alors de sa gorge.

Jen décida alors de prendre les choses en main et chuchota à Ganadi :

— Tu penses pouvoir en éliminer un avant que l'on combatte ? Vise bien.

Les trois détrousseurs semblaient perdre patience, quand soudain la fille en haillons se mit à charger follement, avec un air hystérique. Elle fila droit vers Yergan qui ne semblait pas réagir. Au dernier moment, il hurla et para le coup de justesse avec son sabre, ce qui le fit tomber à la renverse. La folle parut déconcertée, et Jen en profita pour se jeter sur elle, la lacérant de ses deux dagues. Au même instant, Ganadi décocha une flèche sur celui qui semblait être le frère de la folle, qui l'atteignit en plein front. Il tomba, net.

L'homme costaud avec une cicatrice sur la joue hurla en courant :

— Vous faites une grave erreur ! Puis se jeta sur Ganadi, lequel était en train de prendre une flèche dans le carquois tombé au sol. Il n'eut pas le temps de se reculer, que déjà l'homme abattait ses deux lames sur lui. Soudain une masse se dressa entre son adversaire et lui, et un bruit mou se fit d'entendre suivi d'un cri. Il ne réfléchit pas davantage, attrapa une flèche et la planta dans le genou du géant, qui s'effondra. Jen lui tomba alors dessus avec le sabre de Yergan, qu'elle lui planta dans le dos. L'homme s'effondra alors sur le côté, dans un dernier souffle.

Ganadi se releva avec peine, et regarda autour de lui. La masse qui lui avait sauvé la vie gisait au sol. En effet, son ami le regardait, les larmes aux yeux, une épaisse tache de sang sur son épaule gauche.

— Yergan, non ! hurla-t-il en s'agenouillant à ses côtés. Pourquoi as-tu fait cela ?

— Cela quoi ? Te sauver la vie ? Dit-il avec beaucoup de peine, en essayant d'imiter Mélina. J'ai voulu être courageux. Je voulais parer son coup, en fait. Mais je n'ai paré qu'une épée. Pas très malin de ma part. Mais je vais m'en remettre. Laissez-moi souffler dix minutes. Puis il ferma les yeux, et son souffle ralentit peu à peu.

— Il faut désinfecter la plaie. Mais avant, on doit se mettre à l'abri, dit Jen d'un ton inquiet. Nous ne sommes plus très loin du pied de la montagne. Il y a de nombreuses grottes. Stupides détrousseurs. Avançons encore un peu, je vais trouver de quoi le panser. Maintenons-le assis sur le cheval ; il tiendra, ne t'en fais pas.

Ganadi avait les larmes aux yeux. Une fois de plus il avait failli se faire tuer. Une fois de plus il avait eu de la chance. Sauf que cette fois, quelqu'un en avait fait les frais.

— Tiens bon mon ami, murmura-t-il pour lui-même.

Une fois remis en marche, ils avancèrent doucement. En effet, le cheval commençait à être assez chargé, et il ne s'était que brièvement désaltéré au cours d'un ruisseau dans la forêt.

Finalement, ils arrivèrent au pied de la montagne en moins de deux heures. Ganadi avait attrapé quelques lièvres sur le chemin, et Jen avait récolté de la sève, des feuilles et des écorces, pour permettre à Yergan de cicatriser.

Arrivés au pied d'un grand arbre, elle proposa :

— Faisons une halte ici. Nous allons devoir trouver ou dormir. Et demain matin, nous repartirons. En marchant rapidement, vers midi, nous y serons. Après quoi tu seras partiellement en sécurité Ganadi. Tu es quelqu'un de courageux, tu sais. Et de particulièrement adroit avec un arc.