— Très bien. Suivez-moi, je vais vous faire traverser.

Ganadi glissa furtivement sa dague à sa ceinture et se leva. Soudain, il vit poser sur une caisse en bois près d'une lampe à huile le dessin d'un portrait. Ce n'est qu'en s'approchant qu'il comprit que c'était l'acte de recherche qu'il avait vu il y a peu affiché à Saro. Posant la main sur le manche de sa dague, son regard croisa alors celui de l'homme qui voulait les faire traverser

Ensuite, tout s'enchaîna de façon très rapide. Le gros homme chauve se jeta sur Ganadi, les mains en avant. Il l'évita de justesse en roulant sur le côté, et rejoignit Yergan. Les deux amis avaient leurs couteaux en main. La femme sanglotait bruyamment dans un coin de la maison.

— Que nous voulez-vous ? lança Ganadi.

— Petit, nous sommes désolés mais nous ne pouvons pas te laisser partir, dit-il d'une traite, le regard mauvais. Le roi a mis ta tête à prix, et le double si tu es ramené vivant, reprit-il, le visage rouge.

— Vous êtes fous ! répondit-il. Nous voulons juste traverser le fleuve avec votre barque, et nous vous payerons honnêtement. Inutile d'en venir aux mains.

L'homme prit un couteau à viande posé sur un meuble, et s'approcha pas à pas des deux jeunes hommes, la mine sévère. D'un coup il chargea comme un mufle, l'arme en avant et au dernier moment les deux amis s'écartèrent, puis Ganadi fondit sur lui et lui asséna un coup du plat de sa dague derrière la tête, et l'homme tomba lourdement sur le sol.

— Vous... vous avez tué mon mari, dit la femme en sanglotant. Vous l'avez tué !

— Calmez-vous, répliqua Ganadi, il est juste assommé, il reviendra à lui dans un moment. Et c'est lui qui a essayé de nous tuer, si vous n'aviez pas remarqué. Nous voulions juste traverser, et vous nous avez trahis. Nous partons avec la barque. Prenez cela en guise de dédommagement.

Il laissa quatre pièces d'or sur la table et sortit, son ami sur les talons, laissant la femme seule. Ils prirent leurs armes au passage, et s'installèrent dans la barque plutôt étroite.

— Tu devrais me passer les rames, proposa Yergan, qui avait l'habitude de naviguer sur une barque.

Ganadi vit que son ami avait le teint blafard.

— Tu as eu peur ?

— Oui, je ne suis pas très courageux, se lamenta-t-il. Tandis que toi, tu n'as pas hésité une seconde à assommer cet homme. Si j'avais été seul, il m'aurait capturé sans problème. Je ne suis qu'un poids pour toi, je vais uniquement te ralentir.

— Et moi je suis sûr que tu te trompes. Tu as d'autres talents, comme la pêche. Sans toi, la traversée du fleuve serait bien plus longue. Tu deviendras courageux Yergan, j'en suis sûr, répondit chaleureusement son ami en lui mettant un coup de poing sur l'épaule.

***

La traversée fut calme, et arrivés de l'autre côté, les amis accostèrent sur un petit rivage non loin de Kola.

— Voilà le village ! s'exclama Yergan en désignant les habitations plus loin devant eux de l'index.

— Nous y voilà donc. Il nous faut acheter des provisions. Soyons brefs et discrets, c'est un petit village où le commerce est florissant, alors ne nous faisons pas remarquer. Ici aussi, je suis recherché, nous en avons fait les frais un peu plus tôt. Il nous faut cacher nos armes. La forêt n'est pas loin, allons les mettre dans le creux d'un arbre, le temps de nous procurer ce qu'il nous faut, puis nous continuerons notre route.

Ils tirèrent la barque sur le rivage, de façon à la dissimuler derrière une épaisse motte d'herbe. À quelques pas de là, à l'orée de la forêt se dressait un vieil arbre, avec un tronc énorme. Entre les racines, plusieurs trous apparaissaient, parfaits pour y cacher quelque chose. Ils déposèrent donc presque tout à cet endroit -gardant néanmoins une dague chacun qu'ils dissimulèrent sur eux-, et se mirent en route pour la ville.

Ganadi - Tome I : Le pays de Ménaiحيث تعيش القصص. اكتشف الآن