Faute professionnelle

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Aujourd'hui, un de mes patients n'est pas venue à son rendez-vous. Depuis ce matin j'essaie de le contacter mais sans résultat. Isolé, solitaire et dépressif je crains qu'il ne soit retombé dans ses travers, qu'il ait cédé à ses démons. C'est un alcoolique bien trop fragile pour vivre seul.

Mon portable vibre sur le bureau.

"T'es où ? On t'attend pour commander ?"

"Je ne vous rejoins pas, déjeunez sans moi. Je vous retrouve ce soir chez Alex."

Je m'inquiète, ce qui est tout à fait permis dans cette situation. J'hésite à prévenir les secours, ne pouvant pas légalement me rendre à son domicile. J'ai essayé les numéros d'urgence communiqués dans son dossier mais personne ne semble vouloir me répondre. J'ai également demandé de l'aide à l'un de mes confrères encore en exercice. Se moquant royalement de ce que ses patients risquent, il m'a conseillé d'envoyer une équipe du SAMU.

J'ouvre une des fenêtres. Est-ce qu'il fait chaud à ce point ? J'ai l'impression que ma chemise est serrée.Je déboutonne les deux premiers crans. Au même moment, mon téléphone fixe sonne.

Le SAMU est arrivé au domicile de mon patient qui était évanouie. Je me laisse tomber sur la chaise derrière le bureau. Je soupire et cogne ma tête sur ma main.

"Ce n'est pas vrai..."

On me demande la marche à suivre mais que pourrais-je bien en savoir ? Je leur demande de le conduire aux urgences. Je crains le coma éthylique et j'espère qu'il n'aura pas consommé de médicaments. Médicaments que bien sûr je lui ai prescrits.

Je savais que ça pourrait arriver, je ne suis pas responsable d'une rechute. Malgré tout, j'aurais dû remarquer lors du dernier entretien que mon patient était à bout de force. Il n'a aucune raison de rester sobre, aucune raison de sourire, rien qui lui permettrait de reprendre goût à la vie.

Ça sonne encore mais en ligne avec le médecin des urgences je retourne mon portable pour en éteindre la sonnerie. Je communique aux médecins le peu d'informations que j'ai sur notre patient. Je lui demande de me tenir au courant.

Ça sonne toujours et j'éteins le portable. Trop concentré à lire et relire le dossier que je connais déjà sur le bout des doigts, ne me rappelant plus de celui qui reste au bout du bureau. Le médecin m'explique que je peux passer aux urgences dès demain.

« Je vous remercie... Je... Oui je passerai vous donner une copie du dossier.

⁃ Ne culpabilisez pas docteur, nous ne pouvons pas sauver tous les patients.

⁃ Vous avez raison. Nous ne sommes pas responsables de tous nos..."

Patient ! Quelqu'un a sonné plusieurs fois à ma porte. Ce n'était pas la sonnerie de mon portable mais celle de l'interphone.

« Je vous remercie." Je raccroche et quitte précipitamment le bureau. Voilà près d'un quart d'heure que l'interphone a sonné pour la dernière fois. J'ouvre la porte d'entrée (ou de sortie), je traverse le jardin et ouvre la porte donnant sur la rue.

Bien évidemment il n'y a plus personne. Je soupire et tape du pied par terre. Rien de bon aujourd'hui, rien de bon... !

Un coup d'œil à droite puis à gauche et je m'apprête à claquer la porte lors qu'une portière s'ouvre. Je réprime un sourire de soulagement.

Emma sort de sa voiture. Elle me regarde, prête à repartir mais je lui fais signe de s'approcher. Je ne peux pas aller la chercher, je n'ai pas pris la télécommande pour la porte et je n'ai pas les clés. Je lui fais signe de nouveau mais elle reste figée. Alors qu'elle s'apprête à se rasseoir dans la voiture, je perds tout sens ce logique.

Thérapie illégale (sous contrat d'édition M.E.C)Onde as histórias ganham vida. Descobre agora