18. "Soirée"

Depuis le début
                                    

Meredith me fascine, pour une raison étrange je me sens proche d'elle. Il me semble qu'elle et moi sommes pareilles, désargentées, accrochées à Xyrus contre notre volonté. A ceci près qu'il ne me paye pas, pas encore du moins. J'aimerais en apprendre plus sur Xyrus, sur elle, sur leur famille. Le vieux duc m'est toujours apparu comme un vieil oncle bienveillant, mécène du village et président d'honneur des clubs sportifs. Chaque année il donnait une grande fête pour tous les jeunes, à Pâques. L'immense chasse aux œufs dans le parc souvent humide comblait la jeunesse et amusait les adultes qui brunchaient en gardant un œil sur leurs progénitures déchaînées. De mémoire je n'ai jamais vu Xyrus à cet événement, ni aux autres d'ailleurs. Je crois bien l'avoir aperçu lors de certaines rencontres de polo mais je ne puis en jurer. Conservera-t-il ces traditions qui font la joie et l'animation chez nous ? Rien n'est moins sûr. La voiture nous attend et nous conduit hors de la ville.

— Nous n'allons pas au goûter ?

— Si, me répond Xyrus avec un sourire alors que la voiture s'approche d'un grand parc des expositions. Au début, je vous faire cela au siège mais aucune de nos salles n'était assez grande.

— Je n'aurai donc pas le plaisir de visiter les bureaux de ton entreprise.

— Ne t'inquiète pas Ellya, nous pourrons étrenner mon bureau une prochaine fois.

— Hum hum, toussote Meredith tandis que je rougis sous mon fond de teint.

Xyrus ricane puis sort de la voiture en premier. Nous avançons, passons les épais rideaux rouges et pénétrons dans la grande salle. La vue me coupe le souffle. Je lève les yeux vers le plafond et manque d'en tomber à la renverse. Des dizaines d'enfants, d'employés accompagnés de leurs parents tout aussi émerveillés traversent le hall de part en part, au gré des stands.

— Xyrus... c'est magnifique.

Les événements du vieux duc n'avaient pas cet éclat, et pourtant ils ne manquaient pas d'allure, mais celui-ci est vraiment réussi.

— L'équipe de comm a bien fait son boulot, commente Xyrus d'un air satisfait, cela rattrape un peu leur dernière catastrophe.

— A ce point ? J'ai du mal à imaginer des gens ayant eu un tel souci du détail se planter lamentablement.

— Oui, ces mauvais m'ont coûté cent mille livres sterling et on travaille encore à réparer les dégâts.

Je ne veux même pas imaginer ce qu'ils ont pu faire.

— Une « bièreaubeurre » ? me propose Xyrus alors qu'un serveur s'approche, imité par une dizaine des personnes, des employés vraisemblablement.

Tout ce monde qui se presse autour de nous m'angoisse quelque peu. Je vis certes dans une famille nombreuse, j'ai un certain nombre d'amis, et je suis allée à la fac dans des amphithéâtres pleins à craquer mais jamais je n'étais à ce point le centre de l'attention. Sourires et compliments fusent, chacun nous imagine mariés prochainement alors que nous nous connaissons à peine. Je réponds au mieux à toutes ces marques de politesse, l'air détendu ou presque. Je fais au mieux pour sembler à l'aise, mais ma main reste crispée autour du bras de Xyrus. Cette foule de responsables des ressources humaines, de directeurs tous plus généraux les uns que les autres et de chefs de projet est effrayante. Ces hommes et femmes ont tous le même style solennel, dans leurs costumes plus ou moins bien taillés et avec leurs robes sophistiquées. Choisir une tenue moderne s'est avéré être une bonne idée, dans une robe traditionnelle je serais passée pour la provinciale ringarde de service.

Après moult salutations, Xyrus m'entraîne dans l'un des quatre espaces calmes du hall. Des sofas encadrés par de petits box en tissu délimitent des zones feutrées, cosy, aux couleurs des quatre maisons de l'univers dont l'équipe comm s'est inspirée pour ce goûter. Meredith a disparu, elle s'est évanouie dans la foule. Sa présence de faux-chaperon est désagréable, son absence plus encore. Assis face à moi, confortablement assis dans un sofa vert et argent, Xyrus sirote sa bière et jette un œil distrait à travers l'ouverture du box.

Gentlemen and LadiesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant