- Qu'est-ce que tu fais ici?
- J'venais jouer aux scrabble avec ta voisine, je lâche ironiquement.
- Sérieusement Anthéa, marmonne le brun en plantant ses iris dans les miennes.
- Rien, laisse tomber, c'était juste pour te dire d'oublier pour tu sais quoi mais j'suppose que t'as pas eu besoin de moi pour le faire, dis-je en jetant un coup d'oeil à son accompagnatrice.
- Tu me fais sérieusement une crise de jalousie?
- T'es personne à mes yeux pour que j'te fasse une crise Ken, tu fais c'que tu veux de ta vie et j'fais ce que je veux de la mienne. Passe une bonne journée et ne t'avise plus de mettre les pieds dans mon appart.

Je me dégage de son emprise et sors en trombe de l'immeuble, rejoignant ma voiture avant de m'attacher et de poser mes mains sur mon volant, mais je ne démarre pas. Je me contente de regarder droit devant moi, les lèvres pincées et le coeur battant.

- Putain mais quel abruti c'est pas possible ça, je marmonne en frappant mon volant.

- Et t'es partie? Conclut Mekra à l'autre bout du fil.
- Ouais, je souffle en m'allongeant sur mon canapé. J'lui faisais pas une crise de jalousie je t'assure Mek, il m'a juste vraiment saoulée.
- Tu sais que la meuf qu'était avec lui c'était Elise?
- Qu'est-ce que ça peut m'faire de connaître son prénom?
- Bah ça peut t'apprendre par exemple que c'est la photographe de la tournée, qu'elle a un mec et que dans notre groupe y'a pas plus friendzone qu'elle, rit-il.
- T'es sérieux là? Ca fait une demi-heure que j'te raconte ce qu'il s'est passé et tu me dis seulement maintenant qui elle est?
- Ouais, ça m'faisait golri' de t'entendre être jalouse, même si tu l'avoues pas parce que tu fais trop la meuf tah innaccessible.
- Ta gueule Mek. Bon et toi alors?
- Quoi moi?
- Bah les amours, fais pas l'mec qui comprend pas.
- Mais t'as serré toi, rit-il. Les meufs c'est toutes des putes.
- T'es au courant que j'ai une anatomie féminine entre les jambes ou j'ai besoin de te le rappeler?
- Non tranquille mais quand j'dis ça j'inclu pas mes potes et la miff tu vois.
- Tu fais le gros dur mais quand tu vas rencontrer la perle rare tu vas te transformer en vrai petit canard.
- Ouais c'est ça ouais, allez j'racroche avant que tu me sortes encore une connerie, lâche-t-il avant de mettre fin à la conversation téléphonique.

Je lève mes yeux au ciel, amusée, avant d'aller me faire un thé et d'enfiler une simple nuisette pour la nuit. Je me pose devant la télé avec ma tasse brûlante et m'endors finalement devant un épisode de Grey's Anatomy.


Ma petite routine, qui consiste à me lever, aller en cours, manger, voir mes amis et aller me coucher, dura un peu plus de deux mois. Deux mois pendant lesquels j'ai vu Thaïs, Eva, Thomas et Mekra pratiquement tous les jours, mais aussi deux mois durant lesquels je n'ai pas vu Ken une seule fois, celui-ci étant parti à Los Angeles, puis au Japon, pour enregistrer quelques sons. Le mois de juin touche à sa fin, mes études aussi. Après avoir mis deux ans à trouver ma voie après la lycée, mon master en journalisme vient finalement de se terminer, et je peux annoncer fièrement que je suis une étudiante diplômée et tout à fait comblée. A vingt-quatre ans, il était temps que je quitte les bancs de l'école tout de même. Nous sommes vendredi soir et pour fêter mon diplôme, mais aussi celui de Thaïs et d'Eva, et pour consoler l'échec de celui de Thomas, on se retrouve tous dans mon appartement pour une soirée qui est devenu un rituel : notre soirée tarte aux pommes du mois. Thomas est assis à même le sol, adossé contre mon canapé avec un verre de whisky à la main, tandis qu'Eva et Thaïs dansent un slow improvisé au milieu de mon salon en faisant attention à ne pas faire tomber leur verre de vin rouge. When We Where Young d'Adèle raisonne dans la pièce, tandis que je me laisse tomber à côté de mon ami, posant ma tête contre son épaule tout en regardant les deux folles dingues qui me servent de meilleures amies.

- Deux mois qu'on se connaît et j'ai déjà l'imression que vous m'êtes devenus indispensable, je lui confie tout bas, attrapant sa main dans la mienne pour entrelacer nos doigts.
- Tu sais, on peut plus vivre sans toi nous non plus, sourit-il largement, me serrant contre lui après avoir prit une gorgée de sa boisson.
- J'vous remercierai jamais assez pour les semaines incroyables que vous m'avez fait vivre Thomas.
- C'était un pur plaisir de te faire rire chaque jours madame Haros, mais tu pars, alors je suppose que je peux tirer un trait sur mon rôle de clown personnel.
- Je vais revenir, tu le sais.
- Mais dans combien de temps Anthéa?

Je ne réponds pas, me contentant de regarder dans le vide en soupirant longuement. J'apporte mon verre de rouge à mes lèvres et le termine, avant de le poser sur ma table basse et de me relever.

- J'ai quelque chose à faire, ne m'attendez pas.

J'enfile mes baskets, m'en fichant pas mal de l'association pas très belle de ma robe et de ces dernières, avant d'attraper un gilet et de sortir rapidement de mon appartement. Quinze minutes de marche plus tard je toque contre la porte en bois, qui s'ouvre finalement sur un Ken à moitié endormi, ce que je comprends aisément vu l'heure qu'affiche ma montre. 1h06.

- Qu'est-ce que..
- Je suis désolée Ken, je le coupe rapidement. J'ai été une meilleure amie pitoyable et je m'en excuse. T'as peut-être fais des erreurs mais depuis que j'ai débarqué à Paris j'en ai fais pas mal moi aussi, alors je te demande pardon.
- Je t'excuse Anthé, mais je..
- Cherche pas à comprendre Ken.

Je lui souris doucement, avant de m'approcher de lui et de plaquer mes lèvres contre les siennes. Il ne met pas longtemps à répondre à mon baiser, ce qui réchauffe instinctivement mon coeur resté endormi depuis mon dernier contact avec lui. Je me recule finalement et le prends dans mes bras, avant de le lacher pour de bon, passant une main dans mes cheveux avant de soupirer un bon coup. Je me permet de le regarder une dernière fois, passant de ses cheveux en bataille à sa bouche ni trop pulpeuse ni trop fine, tout en m'attardant sur son grin de beauté sur la joue, ou encore sur ses poils de barbes mal rasés mais incroyablement attirant. Un doux sourire étire mes lèvres tandis que je me retourne finalement et m'en vais, dévalant les escaliers sans me retourner.

Amitié Destructrice. ksTahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon