3. Mais... Il ne venait pas pour moi !

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Trois jours après, je descendis afin d'aider aux cuisines. Lizzy, une domestique, était en effet malade, et il manquait une personne pour la confection du repas. Et, chose excitante, mon père avait réussi à trouver des fruits frais afin de faire une tarte !

Impatiente, je me présentai aux cuisines, et fus accueillie par Madge, la cuisinière, qui me jaugea d'un œil amusé :

« - Moi, je sais c'qui vous amène ici, mamzelle Jeanne ! »

Un sourire m'échappa, mais je haussai les épaules d'un geste innocent :

« - Je suis seulement venue aider, Madge !

- Et aussi préparer une tarte en mangeant tous les fruits ?

- Moi ? Non, jamais je ne ferais cela ! »

Elle eut un regard amusé pour moi, et je finis par rire :

« - D'accord, c'est vrai ! Mais je saurai être raisonnable. »

Elle soupira, mais s'écarta pour que je puisse rentrer dans les cuisines. Je remontai aussitôt mes manches, et souris en apercevant la pâte déjà prête et les fruits qui semblaient m'attendre. Ravie, je m'écriai en tapant dans mes mains :

« - Des pêches ! Et des abricots ! C'est fantastique !

- Essayez d'en laisser un peu, mamzelle Jeanne. Ne mangez pas tout ! »

J'acquiesçai, amusée. Madge me connaissait depuis mes douze ans, année durant laquelle j'étais arrivée ici avec mon père. Et elle ne m'avait jamais grondée, lorsque je chapardais de la nourriture dans le cellier.

Tandis qu'elle se replaçait devant les fourneaux, j'étalais la pâte dans un moule, afin d'éplucher les fruits. Très vite, une bonne odeur de soupe flotta dans l'air, et je soupirai :

« - Ça sent si bon, Madge !

- Je sais. Je vous ai fait vot' soupe préférée, avec des morceaux de viande dedans. »

Je la remerciai d'un regard, avant de me reconcentrer sur ma tâche. Et très vite, malgré mes résolutions, enivrée par le délicieux parfum des pêches, j'en pris un morceau dans ma main, que je portais à ma bouche. Aussitôt, Madge se mit à gronder :

« - Mamzelle Jeanne, j'vous ai vue ! J'étais sûre ! »

Sa remarque m'arracha un éclat de rire, et j'essuyai le jus qui coulait de ma bouche en répliquant :

« - Je n'y peux rien. C'est si bon ! »

Je n'eus qu'un grognement comme réponse, et un sourire amusé m'échappa. Je m'attaquai ensuite aux abricots, dont j'enlevai le noyau, avant de les découper en fins morceaux. Et encore une fois, je portai un fruit entier à ma bouche. Et immédiatement, Madge s'écria :

« - N'en mangez pas trop ! Après, y'en aura plus assez pour faire vot' tarte !

- Ne t'inquiète pas, je sais m'arrêter.

- Ou pas. J'vous connais, mamzelle Jeanne ! »

Je pouffai de rire, me retournant rapidement pour la regarder. Elle me fixait, les mains sur ses hanches épaisses. Malgré ses sourcils froncés, son visage respirait l'amusement. Elle frotta ses mains l'une contre l'autre :

« - Bon, j'dois aller voir si Beth est pas en train de faire n'import'quoi avec les draps. J'vous laisse, mais mangez pas tout !

- Promis ! »

Raison ou sentiments ? ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant