Prologue. Mademoiselle, je vous en prie...

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Je me réveillai en sursaut en entendant des coups frappés à la porte. Même si c'était la lourde porte d'entrée, les bruits résonnaient dans le silence de la nuit. Je repoussai mes épais cheveux roux de mon visage, le cœur battant à tout rompre. Les coups se firent plus insistants. J'hésitai un instant, avant de me lever. Le sol sous mes pieds nus me fit frissonner, alors je passai une robe d'intérieur, mes mules, et nouai rapidement ma chevelure en un chignon avant d'ouvrir doucement ma porte.

Silencieusement, je traversai le corridor, sursautant à chaque coup sur la porte. Qui cela pouvait-il bien être ? Brusquement saisie d'un mauvais pressentiment, je m'arrêtai, paniquée. Et si c'étaient des catholiques ? Je me plaquai une main horrifiée sur la bouche, et soufflai lentement, avant de secouer la tête. Jamais des ennemis n'auraient frappés ainsi. Ils auraient forcé la porte, avant de tous nous tuer dans notre sommeil.

Je resserrai les pans de ma robe d'intérieur en dévalant les escaliers. Pourquoi père ne s'était-il pas réveillé ? L'angoisse étreignit mon cœur, mais je la repoussai en me postant devant la porte. Je pris une grande inspiration, essayant de me calmer. Puis, j'enlevai la poutre qui maintenait le battant fermé avant d'ouvrir la porte. J'eus instinctivement un mouvement de recul en voyant ce qui semblait être une troupe de soldats à cheval. Mais je relevai le menton en croisant mes bras devant moi, et demandai d'un ton peu amène :

« - Que voulez-vous ? »

L'un des hommes descendit de sa monture et s'avança vers moi. Il ôta son chapeau à plumes d'un geste élégant, avant de s'incliner légèrement devant moi et de se présenter :

« - Pardonnez cette intrusion, mais... Mes hommes et moi cherchons un endroit où nous reposer. »

Dans la nuit, je ne distinguais pas très bien son visage. En revanche, j'entendais parfaitement sa voix, chaude et grave. Je me redressai avant de déclarer d'un ton froid :

« - Il est hors de question que vous dormiez ici.

- Mademoiselle, je vous en prie... »

Je m'apprêtais à répliquer par la négative quand j'entendis derrière moi :

« - Que se passe-t-il, Jeanne ? »

Mon père se posta à côté de moi, scrutant la nuit. Je voulus l'envoyer se reposer, mais l'homme s'inclina de nouveau :

« - Je me nomme Baptiste Carpenter. Mes hommes et moi sommes à la recherche d'une habitation où nous pourrions nous reposer.

- Bien. Jeanne, retourne te coucher.

- Quoi ? m'exclamai-je. Mais père...

- Va te coucher. »

Son ton était sans appel. Je remuai la mâchoire, agacée, mais tournai malgré tout les talons. La voix de l'homme sembla me poursuivre, alors je m'empressai de retourner m'enfermer dans ma chambre. J'ôtai mes mules, ma robe d'intérieur, et vint me lover sous les couvertures. Qui étaient ces hommes ? Pourquoi mon père ne les avait-il pas renvoyés ?

Je tendis l'oreille pendant un long moment, mais n'entendis rien de plus que le bruit de la grande porte que l'on refermait. Lentement, je me détendis. Ce ne pouvaient être des catholiques. Jamais ils n'auraient été aussi courtois, même si mon père avait la réputation bien connue d'être neutre dans ce conflit. Ce qui n'était pas mon cas. J'étais fidèle au roi, et il était hors de question qu'une simple bande de rebelle le détrônent ! L'inquiétude quitta mon être, et je m'endormis rapidement, dans le silence de la nuit.


Raison ou sentiments ? ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant