*Chapitre 4*

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J'ouvre les yeux, regarde autour de moi et je découvre que je suis dans le salon du manoir. Il n'y a personne... Qu'est-ce que je fais ici ? Tout est sans dessus-dessous et il fait nuit noire. Le temps que mes yeux s'habituent à l'obscurité, je détaille ce qu'il y a autour de moi. Rien n'a changé à part la fenêtre cassée. D'ailleurs, un froid glacial traverse la pièce et me donne la chair de poule. Je commence à avancer mais à une vitesse extrêmement lente. Chacun de mes pas résonnent en écho rapide et saccadé malgré ma lenteur. Je me sens très fatiguée et garder les yeux ouverts est un supplice. Ma tête commence à tourner et un bruit aigu envahit mes tympans quand j'allume la lumière de la pièce. Je continue de marcher jusqu'à la porte d'entrée mais elle est verrouillée. Ma respiration s'accentue et je me fige quand j'entends un chuchotement à peine audible à ma droite puis un souffle dans mon cou.

Je me retourne rapidement mais ne vois rien. Ma tête tourne de plus en plus et je commence à avoir mal au cœur. Où sont tous les autres ? J'ai l'impression d'être seule dans le manoir mais j'ai aussi cette sensation que je suis observée. Les chuchotements s'accentuent tandis que je m'écoule sur les genoux. Qu'est-ce qui m'arrive ? Je ne suis pas aussi faible d'habitude !

Crois-moi que pour une sirène, tu es minable.

Cette voix... Je l'entends chaque fois que je reprends mes esprits et quelques secondes avant de devenir incontrôlable. Je secoue la tête pour la chasser mais cette phrase continue de tourner en boucle dans mon crâne. Puis d'un coup tout s'arrête. Silence total. Je relève la tête en entendant des petits pas. Je tombe face à une petite fille. Elle doit avoir cinq ou six ans. Elle a une robe de chambre blanche et des cheveux bruns qui lui arrive au niveau des reins. Elle me regarde dans les yeux tout en serrant sa peluche contre sa poitrine. Elle ressemble à quelqu'un que j'ai déjà vu mais pas moyen de me rappeler qui c'est. Je me redresse et lui demande.

- Qui es-tu ?

- Où est Théo ?

Elle n'a pas répondu à ma question. Pourquoi elle me demande ça ? Je monte mon regard rapidement vers le plafond en entendant un frottement sourd, comme si l'on traînait quelque chose sur le sol. Je la regarde de nouveau et remarque qu'elle a aussi levé la tête vers le bruit.

- Qu'est-ce que c'est ? je demande dans un murmure.

Elle jette plusieurs regards autour d'elle avant de se pencher vers moi comme pour me confier un secret.

- Tu veux vraiment savoir ?

Je hoche la tête mais sans vraiment le vouloir. Au bout de quelques secondes, un sourire digne d'un film d'horreur apparaît sur son visage. Elle relâche sa peluche pour la tenir à bout de bras.

- Alors, suis-moi.

Je ne suis plus sûre de vouloir la suivre, en fait. Mais une force invisible me pousse à marcher sur ses pas alors que je n'en ai aucune envie. Je suis en plein cauchemar ce n'est pas possible ! Avant de commencer à avancer, elle se tourne de nouveau vers moi.

- Au fait, je m'appelle Lore.

Nous arrivons devant les escaliers au moment où la fillette se retourne vers moi, toujours son sourire scotché sur le visage, et met son index sur sa bouche.

- Chut... Il ne faudrait pas la déranger.

Quoi ? Qui ? Déranger qui ? Je ferme les yeux et souffle un coup. Je gravis les marches une par une. Après deux minutes qui semblent être des heures, on arrive devant une porte. J'arrive à entendre des frottements et des gémissements d'agonie depuis celle-ci. Mon pouls s'accélère et ma respiration se saccade. Non, je ne veux pas y aller !

Je me retourne pour partir quand je tombe face à un mur. Non, il y avait un escalier il y a à peine une minute ! Je m'avance vers lui et le touche pour voir si c'est bien réel ou si c'est moi qui délire. Malheureusement, je ne délire pas.

- Trop tard. Tu as voulu savoir, maintenant tu ne peux plus revenir en arrière.

Je profite d'être dos à elle pour pouvoir laisser les larmes couler silencieusement. Une fois calmée, je me retourne et avance vers la porte. D'une main tremblante, j'attrape la poignet et la tourne. Quand elle est ouverte, j'apporte ma main à ma bouche. La pièce est tout en longueur et sur le sol est placé des draps. Et sous ces draps, je distingue des corps. Je m'approche vers le premier draps sur ma gauche et tends la main pour voir qui se trouve en dessous. Je hurle de terreur quand je vois le corps ensanglanté d'Heaven.

- Non, non, non, non, non...

Je recule jusqu'à ce que mon pied percute quelque chose de dur. Je regarde le sol et vois que mon pied a tapé sur le bassin squelettique de Jessica. Un cri m'échappe à nouveau tandis que je regarde autour de moi. Les draps ont disparu. J'avance tant bien que mal en regardant les cadavres à tour de rôle. Mélania, Devil... Je bloque pendant plusieurs minutes quand je vois les quatre autres corps devant moi. C'est un cauchemar ! Un putain cauchemar !

Je m'avance vers le dernier et m'écroule sur le sol.

- Non, non, non, pas toi...

Je pose ma tête sur son torse et hurle de douleur. Mes cris durent pendant plusieurs minutes tandis que je serre le tee-shirt rempli de sang de Théo dans mes mains. Je sursaute violemment quand je sens une main se poser sur mon épaule. Je me retourne rapidement et tombe face à la fillette de tout à l'heure. Mes larmes continuent de couler quand elle prend la parole.

- Tu peux encore changer tout ça.

J'ouvre grand les yeux. Elle a une voix de femme et je la connais.

- Elios...

Dès que j'ai prononcé son prénom, les traits de la petite fille se transforme tout autant que son corps pour devenir une femme. Une magnifique femme au regard assassin. Je recule comme je peux jusqu'à ce que mon dos cogne contre le mur.

- Si tu n'arrêtes pas ce que tu entreprends de faire, voilà ce qui va se produire.

Elle fait un geste circulaire de la main pour indiquer les corps gisant sur le sol.

- Tu peux décider de tout arrêter et de m'amener le grimoire ou tout empirera pour toi, ma jolie.

Je secoue la tête et la regarde avec dégoût tout en me levant. Je la regarde dans le yeux avec toute la haine que je peux quand je vois une lumière bleue apparaître devant elle. Cette lumière devient peu à peu une silhouette pour devenir quelqu'un que je connais.

- Clara, je t'en supplie. Sois raisonnable. Arrête toute cette folie.

Je continue de secouer la tête.

- Rentre avec moi à la maison et redevenons comme avant.

- Non ! Tu n'es pas Théo ! Tu n'es pas lui ! Il ne m'aurait jamais dit d'abandonner ! Et je sais qu'il est encore vivant !

En un quart de seconde, Elios passe à travers le "fantôme" de Théo et me transperce le ventre.

- Pour l'instant.

Je me redresse en hurlant de toutes mes forces, trempée de sueur. Je vois quelqu'un entrer en trombe dans la chambre et me prendre dans ses bras.

- Chut... Calme- toi, c'est moi. C'est tout, c'est terminé, il me susurre.

Je continue de sangloter dans ses bras pendant qu'il me caresse lentement les cheveux. Je commence à me rendormir donc il me lâche et me replace doucement sous les couvertures. Il commence à partir quand je lui attrape le poignet.

- Reste avec moi.

Il sourit faiblement avant de se glisser dans les couvertures et de m'attirer contre lui. Je pose ma tête sur son torse quand il me murmure.

- Jusqu'à la fin de l'univers.

Ange déchu Where stories live. Discover now