Rêves de Rêves

1.4K 46 0
                                    


Alors qu'il était adossé a sa chaise et qu'il griffonnait quelques mots sur un papier, Victor Hugo sentit que ses paupières se faisaient plus lourdes, et ferma ses yeux. Lorsqu'il les rouvrit, il était toujours assis a la même place, devant son bureau. Devant lui, sa feuille, son encrier et sa plume. Mais cette dernière, avec laquelle il écrivait tantôt, s'envola, portée par le vent qui s'engouffrait dans la pièce. Elle tournoya, tourbillonna et l'écrivain contempla alors cette plume se métamorphoser en une magnifique et majestueuse colombe qui s'enfuit par la lucarne.

Suivant du regard l'oiseau dont la silhouette s'évanouissait derrière les nuages, Victor Hugo sentit quelque chose envelopper ses chevilles. Il baissa la tête et se rendit compte que de l'eau se répandait dans toute la chambre. Il chercha la source de l'inondation, en vain. Le niveau de l'eau monta jusqu'à ses genoux, puis sa taille, et son cou, pour finalement submerger totalement le pauvre homme. Cherchant désespérément une issue, son regard affolé se posa sur une ombre devant lui. Scrutant l'obscurité, il put reconnaître une silhouette qui lui était familière. Le corps inanimé était celui de sa fille aînée. Elle le regardait avec des yeux glacés, sa peau était pale comme la mort et dans sa main était emprisonnée une plume noire, maculée de sang frais. Le poète regardait avec détresse la défunte. Mais il sentit rapidement ses poumons brûler dans sa poitrine. Il avait besoin d'air. Il se débattit, lutta et réussit enfin a émerger. Il pouvait de nouveau respirer. Sa main heurta une surface solide. Il s'y agrippa avec peine et put sortir de l'eau.

En ouvrant les yeux, il découvrit une vaste étendue d'eau autour de lui. Il était assis dans une barque, flottant au milieu d'un immense lac. A sa gauche, un louveteau, qui le regardait fixement, baissa alors la tête. Un bruissement au loin alerta l'animal qui scrutait l'horizon. Victor Hugo vit alors s'approche une seconde barque. Sa femme y était installée. Quand elle l'aperçut, son visage s'adoucit, et elle esquissa un sourire. Mais Victor Hugo remarqua une deuxième personne a ses cotés, qui lui lançait des coups d'œil assassins. L'homme, que l'écrivain ne put identifier, agrippa la main de la demoiselle près de lui, et contempla avec passion. Soudain, le lac s'agita, les barques tanguèrent, et l'eau bleu azur n'était plus. Elle avait laissé place a un liquide noirâtre. Le vent se leva. Une gigantesque vague jaillit et engloutit les deux amants. Victor Hugo était convaincu d'être le prochain. Il ferma les yeux et inspira une dernière fois. Mais une main chaude et chaleureuse lui empoigna le bras, et l'entraîna dans sa direction d'un coup sec. Il manqua de peu la vague qui s'écrasa sur le lac.

Alors qu'on le tirait toujours, son pied put enfin toucher la terre ferme, et il vit se dessiner autour de lui un champ de Magnolias. Le poète courait, écartant les fleurs de son passage. Apres quelques instants, il ralentit. La femme qui était venue a son secours se tourna vers lui, mais Victor Hugo n'eut pas besoin de la regarder pour la reconnaître. Son parfum, ses mains, sa peau, c'était elle. Celle qu'il aimait. Il la dévisagea, la dévorant du regard. Il contemplait ses scintillants yeux bleus, passant sa main abîmée par le temps dans ses longs cheveux châtains. il posa son autre main sur sa joue rosée et promit qu'il ne la quitterait plus. Ils s'allongèrent cote a cote au milieu des fleurs, quand un hurlement de loup retentit.

Le vieil homme se réveilla, le sourire aux lèvres et les yeux étincelants.


Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Dec 24, 2016 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Un rêve de Victor HugoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant