— Tu penses vraiment que le maquillage est nécessaire ? lui demandais – je en sachant déjà la réponse.

— Évidemment !

Elle se concentre sur mes yeux en ajoutant du noir par petite touche. Quand elle a terminé, je me retourne pour me regarder dans le miroir. Je dois avouer que même si je n'étais pas très emballée par cette séance maquillage, le résultat est plus que concluant. Je me sens presque jolie avec ce smoky eye argent et noir.

— Tu en dis quoi ? me demande – t – elle en s'attaquant à son propre visage.

— J'aime beaucoup !

Je commence à angoisser de plus en plus en attendant Lexie. Ce n'est qu'une soirée, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que je vais peut – être perdre ce travail qui me tient tant à cœur. Durant le trajet en taxi, je m'agite sur mon siège incapable de me calmer, j'ai un mauvais pressentiment concernant cette présentation.

— Calme – toi Brook, tout va bien se passer, me rassure Lexie.

— Et si je perds mon job ? dis – je paniquée.

— Ils ne vont pas se débarrasser de leur meilleure lectrice, me flatte – t – elle.

J'inspire et expire profondément et je commence à me détendre. Seulement, lorsque le chauffeur s'arrête en nous annonçant que nous sommes arrivées, je me mets à angoisser de plus belle. Nous descendons du taxi et l'endroit où nous mettons les pieds est loin de me mettre à l'aise. Une immense salle de réception, énormément de personnes sont présentes et se bouscule pour entrer. Tous portent des vêtements impeccables et je me sens ridicule dans ma robe rouge qui pourtant me plaisait tout à l'heure. Elle me paraît désormais bien terne face aux tenues des autres femmes. Je suis la seule à avoir osé la couleur et je m'en mords les doigts, plusieurs regards se font insistants sur moi, alors que j'aurais préféré me fondre dans la masse. Nous entrons côte à côte, moi et Lexie. La salle est déjà bondée de gens, des serveurs slaloment entre eux, un plateau à la main. J'entraîne mon amie dans un petit coin, je n'aime pas me mélanger à toutes ses personnes. Je reconnais quelques têtes que j'aie croisées durant mon stage notamment Leslie avec qui j'étais à l'université, qui est aujourd'hui correctrices et traductrices de manuscrits. Quand elle me repère au coin de la grande pièce, elle s'empresse de venir me rejoindre avec ses longues jambes que j'envie tant.

— Brook, s'exclame – t – elle en me prenant dans ses bras, je suis heureuse de te revoir, comment vas – tu ?

— Bien et toi ? Ca fait tellement longtemps.

— Ça va, mais dis – moi, je ne pensais pas te voir ici, tu as fait le déplacement exprès ?

J'acquiesce en lui présentant Lexie.

— Tu ne vas pas être déçu du voyage, m'assure Leslie, notre nouveau PDG est absolument craquant.

Ma meilleure amie me donne un léger coup de coude dans les côtes avant de murmurer à mon oreille :

— Tu vois cette robe est le meilleur choix que tu puisses faire.

Pour toute réponse, je lui souris.

— Tiens, regarde Brook, il arrive !

Je suis les yeux de Leslie vers cet homme, et le moins que l'on puisse dire c'est que je suis sous le choc. Une mâchoire carrée, de larges épaules, une barbe de trois jours et des cheveux en bataille, je l'aurais reconnu même dans la nuit la plus sombre. Je suis proche de l'asphyxie alors qu'il se rapproche pour saluer chaque personne, une par une.

— Eh bien, siffle Lexie, je voudrais bien travailler pour lui et même faire des heures supplémentaires tant qu'elle se passerait dans son bureau.

— C'est clair, confirme Leslie.

— Arrêter, vous ne le connaissez même pas, je m'emporte.

Toutes les deux posent sur moi un regard intrigué, bien sûr, elles doivent s'attendre à ce que je sois d'accord avec elle. Sur tous les hommes de la terre, il a fallu que ce soit lui qui reprenne l'entreprise pour laquelle je travaille. Il se rapproche de plus en plus de nous, et moi j'ai qu'une envie, me cacher dans un trou de souris. George Crawford présente chaque personne à monsieur cheveux en bataille qui s'avère s'appeler Hugo. Je resserre mes mains sur ma pochette. J'ai énormément de mal à respirer, j'ignore si c'est à cause de tous ces gens ou si c'est sa présence à lui qui me met dans cet état, mais je suis oppressée.

— Tu penses qu'il viendra nous voir ? demande Lexie en s'adressant à Leslie.

— Oui, son père va sûrement lui présenter Brook.

J'écoute leur conversation, mais je suis incapable d'y prendre part. Mes membres sont paralysés, mon dos touche désormais le mur à force que je recule. Il n'est plus qu'à quelques mètres de moi prise de panique, je lance :

— Je vais me chercher un verre !

Et je disparais vers le bar pour échapper au malaise qu'allait forcément produire ce face à face.

— Un shoot de tequila, demandais-je aux barmaids.

— Désolé, nous ne servons que du champagne, répond celui – ci d'un air désolé, voulez – vous une coupe ?

— Oui, merci.

D'ici, je remarque que Lexie serre la main de mon amant, une étincelle dans le regard. Je fulmine de colère de la voir à ce point baver sur lui. Mais, comme avec cette blonde dans le bar, le mois dernier il n'y prête pas attention. J'attrape la flûte de champagne que me tend poliment le barmaid. Une multitude de conversations ont lieu autour de moi, mais je reste attentivement fixer sur ce qui se passe de l'autre côté de la salle. George et Hugo sont déjà passés aux personnes suivantes, je vais pouvoir reprendre ma place auprès des filles. C'est immature, je le sais, mais je n'ai aucune envie de lui parler et de vivre ce malaise qui va forcément se produire si on nous présente. Une main imposante se referme sur mon bras nu. Prise au dépourvu je me retourne sèchement.

— Salut ma belle, me salue Raphaël

Je souris en constatant que ce n'est que lui. Raph est le fils de George. Il a toujours été là pour moi durant mon stage dans les locaux de Crawford Éditions. À cette époque, il venait uniquement pour foutre le souque dans les affaires de son père. Ce soir, vêtu d'un costume flambant neuf, et d'une nouvelle coupe de cheveux encore plus près du crâne que la précédente, il paraît moins juvénile.

— Salut Raph ! dis – je en souriant.

— Alors comme ça mon père t'a traîné de force à Chicago, enfin, je ne vais pas le mépriser, ça me fait plaisir de te revoir.

— A moi aussi, mais j'avoue que je ne pensais pas te voir ici et surtout pas dans cette tenue !

Il me fait un clin d'œil en affichant ce sourire insolent que je lui connais si bien.

— En fait, je suis venu pour soutenir mon frère et draguer les petits culs qui passent par là.

J'étouffe un rire en avalant une gorgée de champagne.

— Je ne savais pas que tu avais un frère, dis – je en admirant ses magnifiques yeux bleus.

Il hausse les épaules.

— Je parle rarement de lui aux filles, je ne voudrais pas qu'il me les vole.

— Mais moi, c'est différent, ce n'est pas comme si j'étais l'une de tes conquêtes.

— Ça aurait pu il y a quelques années, dit – il légèrement irrité.

Je me souviens de cette époque où il voulait plus qu'être ami avec moi. Mais moi, je n'ai toujours vu en lui un fidèle ami, rien de plus. Je ne peux m'empêcher de lorgner mon ami même s'il est beau garçon, sa beauté n'a rien à voir avec le physique d'Hugo.

L'inconnu et moiWhere stories live. Discover now