Chapitre 3 - 2e Partie

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Le 26 Novembre 2015, Prétoria.

La voiture s'arrête pour la quatrième fois en moins de dix minutes, et je suis sur le point de fulminer contre le chauffeur. Celui-ci abaisse la vitre teintée qui nous sépare et sourit, contrit.

« - Vous devez perdre patience, Monsieur Dramani. Nous arrivons dans quelques minutes, par un autre parcours. »

Je hoche crument la tête et me concentre sur mon conseiller, assis en face de moi, les yeux rivés sur son dossier. Il se redresse lorsque je me racle la gorge, puis me résume le déroulement que prendra la conférence ainsi que les conclusions tirées après la crise qu'a connu le pays. La plupart des régions assistant à l'assemblée ont été affectées par le virus et devront présenter les conséquences de la crise sur leurs politiques. Ensemble, nous devons trouver une solution pour rétablir ce qui a été troublé. J'ordonne les feuilles concernant le bilan de notre pays dans ma pochette et la referme, écoutant précieusement les paroles de mon conseiller. Quelques minutes plus tard, la voiture se gare enfin devant le bâtiment où a lieu la réunion. J'entre et accède rapidement à la salle des conseils. Je serre les mains des quatorze dirigeants déjà installés avant de m'asseoir.

Le président de l'Afrique du Sud, hôte de la conférence, prononce un discours d'introduction ; il remercie tous les dirigeants et représentants de s'être déplacés et présente quelques notions importantes à propos de la cause de la crise. Le représentant de la Sierra Leone, remplaçant la présidente débordée, ouvre la conférence. Près de quatre mille personnes sont décédées lors de la crise qui a frappé ce pays. Il expose les restrictions dont ont souffert les déplacements internationaux, les marchés, les activités agricoles. Le départ des travailleurs étrangers par peur de la maladie a ralenti l'activité minière. Tous ces troubles ont affecté fortement l'économie du pays.

Deux dirigeants à ma droite discutent brièvement avant que le président de la Guinée ne se lève et regarde chaque personne, une par une. Il énonce que plus de deux mille cinq cent guinéen sont morts des suites d'Ebola. Cet épisode meurtrier a poussé le gouvernement à fermer les frontières, mais a aussi causé de nombreuses altérations au pays ; la croissance a diminué, les exportations agricoles ont chuté après la désertion des campagnes et la pauvreté nationale s'est accrue. Cela a provoqué un fossé économique entre la capitale et la province. Pour terminer, il déplore le crash important du niveau de bien-être et des revenus des habitants, de leurs consommations alimentaires et de la hausse du chômage ainsi que de l'écroulement de la scolarité des enfants du pays. Toutes ces irrégularités ont été déclencher par la peur de la contamination.

Je rassemble toutes mes idées et me lève à mon tour, quelques instants après que le président se soit installé de nouveau. Je jette un dernier coup d'œil rapides aux feuilles posées devant moi avant de m'adresser à tous :

« - Aziz Dramani, président de la République du Sénégal. L'épidémie foudroyante d'Ebola qui a débuté en Décembre 2013 en Guinée, et qui s'est figée il y a peu a eu des conséquences sur l'économie sénégalaise. Les flux touristiques ont largement chuté, entrainant ainsi le PIB à une baisse annuelle de 1%. Plusieurs conférences importantes qui devaient avoir lieu à Dakar ont été annulées alors que les vols à destination du Sénégal sont moins fréquents. La maladie n'a fait que très peu de cas et, favorablement, il n'y a eu aucune contamination majeure. La croissance et le PIB ont tout de même diminué, alors que la pauvreté nationale a augmenté. »

Je remercie faiblement le président de l'Afrique du Sud en me rasseyant. Il demande à un autre représentant d'exposer le bilan de son pays ; la dirigeante libérienne se dresse et hésite plusieurs secondes avant d'établir les conséquences de la crise sur le Libéria. Ce pays a été la région la plus touchée par la catastrophe qui a affecté l'Afrique de l'Ouest de 2013 à 2015. Quatre mille huit cent libériens ont succombé à la maladie à virus Ebola. Une baisse a affecté le revenu intérieur et l'emploi et est due à la peur de la contagion. La présidente annonce la fermeture de deux grandes compagnies minières et la perturbation de l'agriculture, ainsi qu'une chute violente des vols commerciaux par semaine. Pour finir, elle parcourt un historique des réservations de tous les hôtels du Libéria, et déplore que les de nombreux hôteliers ont perdu leur emploi. Elle clôt sa prise de parole par le niveau de croissance actuel de son pays.

Enfin, d'autres présidents tels que ceux de la Gambie et du Nigéria relatent des bilans improductifs ; la clientèle du secteur commercial a fortement diminué, 65% des réservations hôtelières ont été annulées, les dépenses du gouvernement ont fortement augmentées pour lutter contre la maladie, les investissements directs étrangers dans le domaine du tourisme et de l'hébergement ont été reportés voir complètement annulés alors que la circulation des citoyens des pays est réduite.

Le dirigeant de l'Afrique du Sud, assis en bout de table, échange quelques mots avec son conseiller et la présidente libérienne. Un silence formel s'abat sur la pièce alors que nous attendons son bilan final. Il se lève quelques instants plus tard, accompagné de son conseiller.

« - Après avoir entendu et compris les conséquences propres de la crise sur vos pays, les répercussions similaires et écrasantes de la maladie Ebola sont : les correspondances avec le monde sont quasiment inexistantes, le PIB a chuté ainsi que la croissance économique, la dette souveraine a explosé. Tout ceci à amener de nombreux pays à voir leur taux de pauvreté s'accroître. Aujourd'hui, nous devons prendre des mesures économiques vitales. »

Il énonce les mesures déjà appliquées, telles que les contrôles de santé obligatoires ou les plans de relance économique, comportant une restriction administrative, le développement d'accords compétitivité-emploi, ainsi que la suppression des dépenses publiques inutiles. Puis, il nous donne la parole. C'est ainsi que, deux heures plus tard, nous quittons la salle avec un plan détaillé et possiblement fonctionnel. Ce plan est constitué d'une campagne officielle pour apaiser les craintes de la population, d'un appel aux habitants pour le retour des enfants à l'école, de mesures et contrôles sanitaires hospitaliers obligatoires, de la divulgation d'informations sur la maladie aux populations et de réformes économiques pour relancer la croissance.

Je relâche mes épaules en voyant ma voiture se garer en double file, puis m'installe sans ouvrir la bouche. Cette assemblée nous a montré à quel point la situation est grave. Et, même si nous avons trouvé les réformes qui doivent nous permettre de surmonter cette crise, rien ne garantit leur mise en place. C'est aujourd'hui que notre gouvernement va devoir être exemplaire, et sauver le pays.

EBOLAWhere stories live. Discover now