Partie 3

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Cela faisait six mois.

Six mois qu'elle supportait les moqueries.

La plupart s'étaient tus, mais un groupe de 3 continuaient, encore et toujours.

Léa ne disait rien. Elle supportait. Faisait face.

Mais au bout de six mois de lutte, ses nerfs étaient à bout.

Alors lorsqu'on la traita pendant la pause du midi, Léa se leva avant même d'avoir mangé quoi que ce soit, et partit.

Ses amies vinrent la voir et tentèrent de la réconforter, même s'ils ignoraient la raison de ses pleurs, mais rien ne l'aidait.

Elle leur en parla, vida son sac, vaincue. Les filles en face d'elle furent horrifiées.

L'une d'elles eut les larmes aux yeux de ne pas avoir vu avant que Léa souffrait.

La seconde se mit à gronder Léa, lui demandant pourquoi elle ne lui avait rien dit.

La troisième ne dit rien, mais son visage blêmit de rage.

Elle entraîna alors Léa vers la salle d'histoire, entra dans la classe où la professeur mangeait, et lui demanda si elles pouvaient parler, toutes les trois.

Surprise, et d'abord un peu agacée, quand elle vit le visage de son élève baigné de larmes, elle s'adoucit et lui demanda ce qu'il se passait.

Léa tenta d'expliquer la situation, en vain. Sa gorge se noua et elle avait l'impression que chaque mot qu'elle prononçait était synonyme de faiblesse.

L'adulte demanda pourquoi elle n'en avait pas parlé avant, pendant ces six mois. Pour Léa, les raisons étaient évidentes.

Premièrement, si elle en avait parlé, les moqueries auraient redoublé, on l'aurait vue comme une lâche.

Ensuite, elle avait honte.

Honte de pleurer, honte de subir, honte de le mériter, surtout.

Enfin, elle refusait d'en parler car ce n'était pas à elle de se plaindre.

Chacun a un rôle ici bas.

Léa était persuadée que le sien était d'aider les gens, de les accompagner, de rendre leurs fardeaux un peu moins lourds à porter.

Elle n'avait pas à se plaindre. Ce n'était pas à elle de le faire.

La professeur ne se doutait tellement pas de la raison pour laquelle Léa supportait tout ça.

Elle voyait une jeune fille timide, sérieuse, exemplaire, une petite fille modèle.

Or Léa savait qu'elle était tout sauf ça.

Être timide, Léa le faisait seulement parce qu'elle ne voulait pas paraître du genre à s'étaler.

En soi, Léa n'était pas timide, non, ce n'était la que l'un de ses masques.

Sérieuse, Léa l'était peut être bien, après tout elle était du genre a écouter en classe, par nécessité de faire fonctionner ses méninges.

Mais exemplaire, elle ne l'était absolument pas. Elle avait fait tellement de bêtises, de choses interdites à une enfant de son âge, qu'elle aurait été incapable de montrer l'exemple dans quoi que ce soit.

L'après midi fût étrangement calme pour Léa. Elle était comme déconnectée, la Terre pouvait tourner sans elle, Léa avait l'impression d'être spectatrice de ce qui se déroulait sous ses yeux.

Elle se repliait sur elle même. Se rentrait dans sa carapace.

Évidemment, quand la journée de cours se termina, elle refixa bien vite son sourire, personne d'autre ne devait être au courant.

Ses parents ne se sont douté de rien, Léa y veillait, elle était particulièrement douée pour cacher ce qui ne devait pas être découvert.

Les jours qui suivirent furent paisibles, ses craintes commençaient à disparaître, mais ce n'était sûrement pas fini.

Elle se faisait encore insulter, ouvertement, devant tout le monde sans aucune gêne.

Il n'y avait rien de plus humiliant que ces instants, aux yeux de Léa.

Mais hors de question de se plaindre a nouveau. C'est mérité. Du moins c'est ce qu'elle pense.

LéaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant