Chapitre IV : L'arbre blanc (partie 1)

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Une douleur aigüe et fulgurante se déclencha brusquement dans ma tête. Je poussai un cri étouffé effrayant qui ressemblait à un grognement et rebaissai les yeux vers Ike.

J'en ai déjà marre de cet état. Elle va me le payer.

Il m'adressa un sourire désolé et posa un baiser sur mon front. Au contact de ses lèvres, une chaleur douce m'envahit, et je frissonnai. Inquiet, les deux médecins levèrent les yeux vers moi, les sourcils froncés. La femme me colla un objet argenté ressemblant vaguement à thermomètre dans la bouche, qui s'exclama d'une voix mécanique, à ma plus grande surprise : « 39.02 °, température anormal, raison : augmentation du rythme cardiaque et de la circulation sanguine dû au contact d'un corps étranger ». La femme me regarda puis posa ses yeux sur ma main dans celle d'Ike avant de lui jeter un regard courroucé, les mains sur les hanches.

- Monsieur, pourriez-vous s'il vous plaît éviter de déranger la malade ?

Me sentant rougir de honte, je détournai le regard vers le plafond blanc de la chambre. Ike, lui, resta de marbre, totalement indifférent à l'infirmière qui mécontente, retourna auprès de son collègue en marmonnant des paroles en atlazasien. Le médecin en revanche, esquissa un sourire nostalgique puis se remit à son travail.

J'entendis une porte s'ouvrir. La réaction d'Ike fut vive. Il lâcha aussi ma main et se leva en un éclair accueillir le nouvel arrivant. Un vieil homme, dont les yeux verts aux éclats d'argent exprimaient l'inquiétude, s'approcha de moi. Il attrapa d'une main tremblante la mienne. En se penchant vers moi, le bout de sa longue tresse effleura le sol. « Je te croyais à une réunion ce soir » Je savais qu'Ike se chargerait de transmettre le message. Ce qu'il fit.

- Oui, elle vient de se finir, s'excusa-t-il, pardonne-moi de ne pas être venu plus tôt. Mais je ne pouvais en aucun cas décliner cette réunion sauf si bien-sûr Atlazas était attaqué. Je n'ai reçu le message d'Ike qu'une fois sorti du cercle. Par tous les dieux d'Atlazas, pourrais-tu me dire ce qui a pris à Rubi ? Ajouta-t-il en tournant vers Ike des yeux globuleux.

Ike et moi nous nous regardâmes puis détournâmes aussitôt les yeux, gênés. Cet échange n'échappa pas à l'homme à qui rien ne semblait échapper. Ike se racla bruyamment la gorge. Orphyll écarquilla les yeux de stupeur, puis fit un « O » parfait de sa bouche. Il resta dans cette position, muet, pendant plus de cinq secondes avant de retrouver l'usage de la parole. J'aurais probablement ri si je n'avais pas été paralysée.

- Es-tu sûr de toi ?

Je retins mon souffle, le regard rivé sur Ike. Allait-il faire machine arrière ? Me dire que c'était une erreur ? Orphyll m'avait prévenu qu'il était de sang noble, donc certainement privilégié. Pouvait-il se permettre de fréquenter une simple roturière comme moi ? Même Rubi avait éclaté d'un rire mauvais quand elle nous avait surpris tous les deux. Je sentis ma gorge se nouer alors que je guettais la réaction d'Ike.

- Oui Orphyll.

Le regard fixe sur Orphyll, il semblait sûr de lui. Le vieil homme fronça les sourcils, visiblement il lui en fallait plus pour être convaincu.

- Perek, kizaheï Ike ! Ena khama wa improsa.

Ike émit un grondement sourd en levant les yeux au ciel, apparemment agacé.

- Je sais, Orphyll. Je le très bien mais je ne vais pas m'empêcher de vivre pour autant.

- Et Rubi ?

- C'est de l'histoire ancienne. Il faudra bien qu'elle s'y fasse.

Orphyll le considéra longuement d'un œil anxieux dans un silence de plomb. Peut-être était-ce mon imagination, mais même l'infirmière et le soigneur semblaient suivre la conversation avec attention, l'oreille tendue discrètement.

ATLAZAS - A la Découverte d'un Nouveau Monde T.1Where stories live. Discover now