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Pendant plusieurs jours, plus personne n'entendit parler du cambriolage : nos amis s'étaient partagés l'argent, avaient vendus les objets et Soufiane avait reçu sa part accompagné du bonus de la revente du collier.
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Et puis un jour, coup de théâtre.

Krimo rentra comme une balle dans la chambre de Saïd. Celui-ci sauta carrément de son lit :

-J'VAIS T'BAISER TA MÈRE TOI, D'OÙ...
-SOUFIANE IL EST BÉ-TOM ! le coupa Krimo.

Saïd resta un long moment ahuri : il n'en croyait pas ses yeux. Soufiane ? Soufiane était tombé ? Le même Soufiane qui avait mit le nez dans leurs affaires ? Soufiane la tappette était tombée ? Ce qui voulait dire que Saïd et son groupe était, à ce jour, menacés eux aussi.

-Attend, attend, attend, commença t-il en se frottant les yeux. T'es en train de me dire que ton bouffon d'petit frère s'est fait chopper ? Attend, attend... Pas à propos de notre histoire quand même ?

Krimo ne répondit même pas : son silence acquiesça à sa place.

-Tu t'fous d'ma gueule ?
-Mais attend wesh ! J't'explique !
-M'expliquer ? M'expliquer ?! MAIS M'EXPLIQUER QUOI LE CON DE TA MÈRE ?! cria t-il en jetant violemment son téléphone par terre. J'VAIS T'BUTER KARIM ! WALLAH J'VAIS T'ÉGORGER TAH LES MOUTONS D'L'AÏD ! J'T'AVAIS DIT QUOI ?! Y'A UN PROBLÈME J'M'EN PRENDS À TOI ! C'EST UNE PIPE TON FRÈRE PUTAIN ! UNE PIPE ! IL VA NOUS BALANCE ! MAIS MÊME ! J'VAIS L'BAISER ! IL A FAIT QUOI POUR S'FAIRE SOULEVER ?! WALLAH J'VAIS L'ENCULER ! AVEC TOI AUSSI KARIM !
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C'était très tôt ce matin, que notre tappette s'était faite soulevée. La police était venue perquisitionner chez lui à 6h tapantes : Soufiane n'avait même pas eu le temps de comprendre ce qu'il lui arrivait, qu'il était déjà au poste.

-Bon, p'tit bougnoule, commença un des officiers. On sait que t'as pas pu faire ça tout seul. Alors balance nous les...
-NAN ! SUR LES DEUX YEUX D'MA MÈRES J'BALANCE TCHI ! T'ES UN FOU TOI ! J'VAIS T'BAISER TOI ET TA FEMME ! WALLAH T'ES UN HOMME MORT.

Et il lui cracha au visage. Comme nous, les deux policiers furent d'abord totalement choqués. Mais, reprenant vite ses esprits, l'agent concerné lui répondit par une lourde droite et le prit violemment par le col.

-T'AS CRU QUE J'RIGOLAIS AVEC TOI, SALE ARABE DE MES DEUX !, il serra son col encore plus fort. MOI J'PEUX FAIRE S'QUE J'VEUX AVEC TOI ! ALORS TU M'DIS LES NOMS OU SI NON J'TE VIOLE ET C'EST PAS DES PAROLES EN L'AIR.

Et notre tappette répliqua dans la seconde :

-OK ! OK ! C'EST BON ! J'vous l'dis mais s'il vous plaît, me faites pas de mal...

Les policiers s'arrêtèrent et attendirent la réponse du criminel :

-Si j'vous dit, ma peine sera moins lourde ? J'prendrais combien au max ?
-Si tu nous dit, c'est qui l'cerveau du bordel, tu prendras peut-être deux mois au lieu de 12.
-C'est Saïd...
-Saïd quoi ?

Il inspira et :

-Saïd Youssefa.
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Et comme convenu, quelques jours plus tard, Saïd rentra pour 3 ans fermes. La nouvelle fit le tour du quartier aussi vite qu'une balle sortant d'un pistolet: "T'sais quoi ?" "Nan." "Saïd, là, il est tombé."
Personne, en dehors de nos 3 amis et du concerné, n'était au courant que c'était Soufiane qui l'avait balance.
Et quand la nouvelle vint aux oreilles d'Abou, celui-ci fut prit d'une rage folle. Déjà que c'était pas un mec calme Abou, mettez le vraiment en colère et on verra. Il sortit de chez lui, frappant (ou plutôt fracassant) tout ce qui se trouvait sur son passage, et arriva enfin devant le bloc où se trouvait Karim. Il allait le niquer, lui baiser sa famille de tappette, lui éclater l'cerveau à ce con.
Il cria à son intention :

-KARIM ! VIENS LÀ DEUX SECONDES !

Karim, remarquant immédiatement l'immense haine qu'Aboubacar possédait en lui, fit une chose assez étonnante : il prit ses jambes à son cou, décidément, la traîtrise s'était de famille. Mais Abou réagissa vite et se mit à lui courir après. Commença alors une assez longue course poursuite dans toute la cité: la peur donnait de l'endurance à Karim, et chez Abou, c'était la rage qui s'en chargeait.

-MAIS POURQUOI VOUS VOULEZ TOUS ME TAPPER ! C'EST PAS DE MA FAUTE PUTAIN D'MERDE ! cria Krimo, tout en courant.
-ARRÊTE DE COURIR J'VAIS TE BAISER TA MÈRE KARIM !

Krimo contourna une tour, il passa sous un préau, tourna à droite, encore à droite, à gauche, et puis là, bordel de merde un cul de sac.
Il était bloqué, Abou ne mit pas énormément de temps à rappliquer.

-Écoute, khey, commença notre arbi.

Il plaça ses deux mains devant lui, en signe de paix.

-On parle ?
-PARLER DE QUOI TA RACE ? SAÏD IL EST TOMBÉ À CAUSE DE TA PUTAIN DE GUEULE ET TOI T'ES LÀ ! TU TRAINES EN BAS DES BLOCS !
-À CAUSE DE MOI ? ZE3MA C'EST À CAUSE DE MOI ! C'EST À CAUSE DE SOUFIANE, WESH !
-Ah ben oui c'est vrai ! Et attend, c'est qui Soufiane déjà ? TON FRÈRE PUTAIN !
-ET ALORS ! C'EST PAS D'MA FAUTE S'IL FAIT QUE MERDER, BORDEL ! T'AVAIS QU'À MIEUX LE SURVEILLER TOI AUSSI !

S'en fut trop pour Abou, il s'approcha tellement rapidement de Karim que celui-ci ne le remarqua que quand sa main serra étroitement le col de son polo. Il allait le buter d'abord lui et ensuite son frère, il n'avait qu'à effectuer un petit craquement au niveau de sa nuque et tout ça c'était fini. Il était capable de le faire, il allait le faire. Et ça, déjà Karim il le savait, mais surtoût il le sentait. Heureusement pour lui, quand Abou était sur le point de mettre à terme ses projets, son téléphone sonna. Il le regarda un dernier instant, Krimo aussi et partit en se retournant pour répondre. C'est pas grave, il butera d'abord son frère.

-Allahu Akbar..., chuchota Karim qui venait d'échapper à la mort.

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Quand Badr apprit la nouvelle, il eût, lui aussi, un moment de haine incontrôlée, enfin, plutôt incontrôlable.
Tous ce qui passait sous ses mains finissait broyés, déchiquetés, hachés, détruits, à la fin carrément inexistant. Mais essayez de ressentir sa peine: son frère jumeau, sa moitié, sa vie, son pilier venait de tomber. Vous dire que Saïd et Badr se ressemblaient comme deux gouttes d'eau serait vous mentir : ils étaient totalement différents. Ils ne se ressemblaient pas, que ce soit au niveau du physique, qu'au niveau du mental. Saïd était maigre, basané, bruns, intelligent, calme, réservé alors que Badr lui était plutôt baraqué, clair aux cheveux noirs et il adorait se faire remarqué. C'était le genre de mec qui sortait en boîte, en chicha, et qui, avec un joli polo Dior et un magnifique sourire trompeur, en faisait tomber plus d'une. Mais ce jour-là, le Badr qui venait d'apprendre la nouvelle n'était pas du tout le même que celui qui se trouvait habituellement dans les chichas. Il voulait tout niquer, défoncer ce putain de Soufiane oula je sais pas quoi là tah khla qui avait balancé son frère, décidément, tout le monde avait la haine contre ce p'tit merdeux.

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أمينة
@GhettoYouth_

À suivre...

[CC] Triste BitumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant