CANDY FLAVORED LIPS

I • A Glass of Stars

Sa cuisine était loin d'être sale malgré les trois habitants de la maison. Même pas un grain de poussière ne s'y laissait voir. Tout brillait, le haut du frigo où son père aimait cacher ses friandises favorites, la plaque de cuisson et même les poignées des tiroirs. Tiroir dont Nami sortit un cookie. En le portant à sa bouche elle coupa de son bras la trajectoire d'un faisceau de lumière. Il traversait la pièce de long en large. De sa naissance à la fenêtre jusqu'à sa mort à la surface lustrée du passe-plat, il semblait transporter des millions de particules.
Son biscuit entre les lèvres, Nami se dirigea vers la fenêtre qui éclaboussait la pièce de lumière. Le rivage était lointain mais déjà visible. A sa nouvelle vue, Nami s'y était déjà vite habituée.

Ses bottines l'attendaient face à la porte d'entrée. Nami se déplaça jusqu'au porte manteau ou elle décrocha simplement un foulard blanc cassé. En s'asseyant sur la marche elle ajusta ses bottines et foulard et finit d'une bouchée son cookie avant de quitter son appartement.

Le vent soufflait peu ce jour-là. Rapidement, Nami rejoint la route en pavé. Elle s'y aventura un moment avant de voir enfin les premiers mâts de bateaux côtiers apparaître.

Presque tous les appartements possédaient des fenêtres ouvertes. Les immeubles de la ville respiraient la fraîcheur de la mer. Nami profitait des parfums exaltants de l'eau salée en progressant vers le rivage quand elle arriva face au café du port. Le serveur entonnait l'air de pop qui passait à la radio en sortant les chaises sur la devanture.
Son père lui avait conseillé de chercher à y travailler, pour sa période de vacances.

« Excusez-moi...»

Il relevait son visage vers la jeune fille et sembla coupé dans son élan.

« J'ai pensé que peut-être vous rechercheriez une aide pour les vacances...

- Tu veux dire que tu aimerais travailler au café pour ces vacances?»

Le garçon de café la regardait avec attention et avec une certaine complaisance mais même si Nami l'avait déjà croisé au village, elle n'était pas capable de le regarder dans les yeux.

«  Oui ! Enfin... Si vous avez de la place pour moi. Elle leva son regard furtivement vers le serveur mais le reposta aussitôt sur ses bottines rouges.

- Je vois ! Il prit un temps de réfléxion comme pour analyser Nami qui paraissait paralysée sur ses chaussures. Hmmm... Il va falloir que tu me donnes ton nom et tes coordonnés par contre. Tu me suis?»

Comme si cela avait signifié qu'elle était d'ores et déjà embauchée, Nami avait levé le menton aussitôt et avait acquiescié avec passion. Le serveur l'avait regardée faire et s'était tourné vers l'intérieur du café en souriant discrètement. Nami l'avait suivi en tripotant nerveusement son léger foulard.

Sur le bar trônait quelques feuilles blanches et un stylo caractéristique des cafés.

« Tiens, écrit-moi ton nom, ton lieu de domicile et ton numéro de téléphone. Pendant qu'il tendait le stylo à Nami, une idée lui revint.

- Mais, dis-moi, tu as bien 18 ans? Parce qu'ici on fait pas travailler les enfants !»

Nami lui retira le stylo des doigts et commença à remplir la feuille blanche.

« Evidemment que j'ai 18 ans ! Parce que j'ai l'air d'une enfant...»

Elle ajouta les informations sur la feuille, quelque peu agacée mais surtout embarrassée.

Le serveur patientait le coude appuyé au bar jusqu'à ce qu'elle lui assure avoir terminé de fournir ses coordonnées. Elle glissa la feuille sur le passe-plat jusqu'au coude du garçon.

«  Très bien, très bien... Dit-il en finissant de lire les caractères inscrits sur le papier.

- Alors je te recontacterai ! Il plaqua le papier contre le bar comme s'il venait d'élucider une affaire.

- Oui, merci...»

Nami avait rougi une fois mais ses joues revenaient à leur couleur originelle. Et c'est ce qui importait.
Le garçon la raccompagna jusqu'à la terrasse et la salua avec un sourire presque déjà typique.

En refaisant le chemin pour la maison, Nami s'imaginea déjà servir des citronades aux voyageurs en terrasse. Elle se voyait avec la tenue du River of Stars apporter des sorbets et des pâtisseries. Elle était déterminée à faire de son mieux, même si cela implique de rougir à la moindre attention. Ça finirait bien par passer et puis, on ne peut pas refuser un dessert face à la mer.