No zob in job

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Le rendez-vous avec mon agent s'est très bien passé. Ce type est adorable. Sous ses airs d'ours mal léché, Monroe est un vrai chamallow. Il a fait un super boulot ici. C'est lui qui est venu me chercher après avoir craqué sur la version française de mon manuscrit, qui a fait traduire The Star and Me à ses frais tant il y croyait et qui a contacté les maisons d'éditions américaines. Et c'est encore lui qui a négocié mon rôle de consultante avec la Warner. J'ai donc accepté ses nouvelles conditions. Maintenant que le roman va être adapté, je trouve ça normal. Et puis je l'aime bien.  

Cela fait maintenant vingt minutes que je suis arrivée au restaurant. On m'a installée à une table ombragée en terrasse. J'étais en retard, mais John Barett, le fondateur des éditions Barett, la maison qui me publie ici, l'est encore plus que moi. Je commence à m'impatienter. Aujourd'hui, on doit discuter de la tournée promotionnelle qui va être mise en place pour soutenir le roman à la suite de l'annonce de son adaptation au cinéma. Il a insisté pour qu'on déjeune ensemble. Nous ne nous sommes rencontrés qu'une fois, lors du lancement du roman à New York et, si j'en crois mes souvenirs, ce John était plutôt pas mal. Et zut  ! Je ne ressemble à rien habillée comme ça. J'aurais pu enfiler une robe et des chaussures dignes de ce nom si je n'avais pas été tant à la bourre  !

—  Hey, Aurore  !

C'est lui, et... Purée de petits pois  ! Il est encore mieux que dans mes souvenirs  ! Je suis mortifiée. Dans son costume bleu marine impeccable, il est vraiment sexy, alors que moi je ressemble à une vieille chaussette.

Il me tend la main et me décoche un sourire digne d'une pub pour dentifrice. Je le lui rends et oublie immédiatement son retard.

—  John  !

 —  Je suis vraiment désolé. J'ai eu un problème de dernière minute à régler au bureau.

—  Oh non, ce n'est rien  ! On aurait pu reporter le déjeuner...

—  Certainement pas  ! Je n'aurais manqué ça pour rien au monde  ! me répond-il en plantant ses yeux noisette dans les miens.

Je rêve ou il est en train de me faire un numéro de charme  ? Tout à coup, j'ai très chaud. John Barett est incontestablement un homme très séduisant.

—  Vous buvez quelque chose  ? Une coupe, peut-être  ? Mademoiselle, s'il vous plaît, deux coupes de champagne. Je suis sidérée. Il n'a même pas attendu ma réponse. Très séduisant, et très sûr de lui. Je réplique immédiatement.

—  Non merci, pour moi ça sera de l'eau  !

D'un air de défi, je plante à mon tour mes yeux dans les siens. Il soutient mon regard, un sourire au coin des lèvres. Ok.   Il me fait son numéro  ! La serveuse est encore là et attend toujours de savoir quelle boisson servir.

 —  Mademoiselle, apportez-nous deux coupes de votre meilleur champagne,mademoiselle Dioubois et moi-même devons trinquer à son succès, insiste-t-il sans cesser de me fixer.

La pauvre serveuse me regarde et attend ma réponse. Je lui adresse un sourire pour lui signifier que c'est bon pour moi.

—  Parfait  ! conclut-il victorieux.

Mon joli, je t'ai laissé gagner cette fois-ci, mais tu ne paies rien pour attendre  ! Son téléphone sonne. Il s'excuse et répond. Il ne me regarde plus et j'en profite pour l'observer. Il doit avoir la quarantaine, mais les quelques petites rides qui se dessinent au coin de ses yeux quand il sourit le rendent encore plus craquant. Il est châtain clair, presque blond et, surtout, il a le style dans la peau. John Barett porte le costard comme personne. James Bond, mon pote, tu peux aller te rhabiller  ! D'ailleurs je ne suis pas la seule à le trouver à mon goût. La serveuse, qui ne doit pas avoir plus de vingt ans, est déjà de retour avec nos coupes, et si elle continue de se pencher comme ça, il va bientôt finir noyé dans le silicone de son décolleté. Il raccroche.

—  Excusez-moi... Aujourd'hui, c'est un peu la panique au bureau  ! Il me refait son irrésistible sourire Ultra Brite.

Décidément, cet homme me plaît. Mais je ne veux pas qu'il s'en rende compte car, comme on dit, no zob in job ! Il lève sa coupe.

—  À nous et à notre succès  !

Nos verres s'entrechoquent. Nos doigts s'effleurent. Je frissonne. Déstabilisée, j'enchaîne immédiatement.

—  Alors, cette tournée  ?

Il commence à m'énumérer une liste de villes, à me donner des dates. Entre deux explications, il trouve même le moyen de nous commander deux salades Caesar. Il ne s'arrête plus, il parle sans discontinuer. Il est passionné par son métier, ce qui le rend d'autant plus attrayant. Après quelques instants, je ne l'écoute plus vraiment. Je pense à mon bain ce soir... Je pense à...

 —  Aurore, tout va bien  ? Oups, j'ai complètement décroché.

—  Oui, oui, excusez-moi. Je suis en plein jetlag. Et puis le champagne m'a un peu sonnée...

Et bim  !

 —  Je suis désolé, je n'aurais pas dû insister...

J'ai réussi à lui faire perdre un peu de son assurance. Je jubile.   Je regarde ma montre.

—  Je vais devoir y aller...

—  Déjà  ? Vous avez à peine grignoté. Vous ne voulez pas regarder la carte des desserts  ?

Tiens, il me demande mon avis, maintenant  ?

—  Non, merci, je dois vraiment y aller.

—  Très bien, comme vous voudrez...

Il laisse sa phrase en suspens comme s'il voulait rajouter quelque chose. Mal à l'aise, je continue comme si de rien n'était.

 —  Vous m'envoyez toutes les informations de la tournée par mail et on se rappelle pour confirmer tout ça  ?

 Il ne me répond pas, mais me fixe de ses yeux de velours.

—  John  ?

—  Aurore... Accepteriez-vous de m'accompagner à une soirée, demain  ?

 —  Euh... Je ne sais pas. Enfin si, je crois que je préfère qu'on s'en tienne à une relation professionnelle...

Mais qu'est-ce que tu fous, Aurore  ? Comment peux-tu refuser l'invitation d'un tel canon  ?

—  Entendu... Je comprends.

Quoi  ? C'est tout  ? Je suis déçue. J'aurais aimé qu'il insiste un peu plus.

—  Merci infiniment pour ce déjeuner. Je vous appelle dès que j'ai jeté un œil aux documents.

—  D'accord, mais promettez-moi de réfléchir à mon invitation.

Ah, quand même  !

 —  C'est promis.

Je me lève et sors du restaurant pour m'engouffrer dans mon taxi personnel qui m'attend bien sagement dans un espace de parking réservé.

—  Aux studios Warner, s'il vous plaît  ! je lance au chauffeur qui, je viens de le remarquer, a une tête aussi carrée que celle de Bob l'éponge.











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Superman, mon éditeur et moi ( sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant