Mon histoire à la Roméo et Juliette!

Chapitre 1

- Fighting!

Le bras levé je cris cette phrase haut et fort, le meilleur moment de la journée vient de commencer et rien ne saurait me le gâcher.

- Euh mec... C'était quoi ça?

- Ta gueule Pete, tu sais bien que la chef et dans sa période truc coréen, parait qu'ils disent ça dedans, cherche pas à comprendre.

- C'est quoi ce truc encore?

- Ta gueule Pete!

Sauf ça.

Ça, ça a vraiment le don de me mettre de mauvaise humeur. Je me retourne brusquement vers cet idiot de Pete Sulliman et l'attrape par le col de son ridicule polo rose.

- T'as un problème?

- Nan chef... Sorry chef....

Je le relâche brusquement sur la table bondée de malbouffe et de bière et retrousse les dents.

L'ambiance du bowling est la même que d'habitude, odeur de clope et d'alcool, gens bourrés ou si cons qu'on pourrait penser qu'ils le sont. Lieu sombre, chaleur étouffante et lumières virevoltantes sur la piste de danse juste à côté. Collés serrés et roulages de pelles. En gros, l'envers du paradis.

Je tire une bouffée de ma clope et la tend au type à ma droite, me redresse d'un mouvement souple et attrape la boule que me tend le type de gauche puis me mets en position.

Après une seule seconde de concentration je fonce vers la piste de bowling et envoie ma boule de toutes mes forces dans une trajectoire calculée d'avance.

Je m'essuie le front avec le bandana rouge noué en haut de mon bras et souris du coin des lèvres en me retournant, sachant déjà très bien quel sera mon score.

- Alors? Z'en dites quoi les gars?

- Strike comme d'habitude! C'était parfait chef!

Je m'écroule sur le divan à côté de la piste, toujours le sourire aux lèvres, et tape dans les mains de les partenaires.

Vous l'aurez compris, c'est moi le chef, la seule et unique Rom', ou Rommie pour les intimes (bon en gros personne quoi). À la tête du gang du lycée Kapullet, l'imbattable femme au point d'acier.

Comment ça vous ne nous connaissez pas? Honnêtement faudrait mieux pour vous, une fois que vous êtes la cible des Kapullets vous ne ressortez pas indemne, loin de là, et surtout vous ne nous oubliez jamais.

Le lycée d'où je viens c'est pas le rêve, c'est pas ces lycées avec des pompom girls partout et des mecs trop sexy de l'équipe de football. Nan. Moi mon lycée c'est la jungle, une seule règle: Bouffe ou fais toi bouffer. Simple, clair et net, parfait pour des types sortis d'un milieu pauvres ou les gamins jouent dans la rue à longueur de journée. Et même pour une fille comme moi la seule solution c'est de survivre, et c'est ce que j'ai fait.

J'ai appris à me battre et à me de fendre seule, à survivre et a ne pas me faire bouffer. La rue, c'est l'enfer.

Après ce que je viens de vous raconter, vous pensez sûrement que je suis une fille mal élevée, rebelle et sans aucun avenir. Et vous avez sans doute raison.

Mal-élevée je ne peux pas dire, disons plutôt que j'ai pas été élevée du tout.

Rebelle c'est à 100% vrai, totalement rebelle et libre, c'est ma devise.

Mais sans aucun avenir non. J'ai beau me battre (sens propre) pratiquement 24h/24, je bosse pour avoir le métier dont je rêve, et j'exige la même chose de mes gars. Je veux qu'on s'en sorte tous vivant, qu'on se batte jusqu'au bout, qu'on est un avenir, au moins.

Mais pour rien au monde, non, pour rien de ce que vous pourriez me donner, ne me défait arrêter de me battre, aussi bien au sens propre qu'au figuré.

Je me battrais jusqu'au bout et je gagnerais.

Je récupère ma clope, et laisse mon esprit dériver. Etrangement c'est une soirée plutôt calme. Sans emmerdeur pour venir gâcher mon petit plaisir, et c'est d'ailleurs plus qu'anormale. J'interroge un vigil du regard, ceux-ci sont censés nous prévenir lorsqu'un gang adverse arrive, enfin, aujourd'hui nous n'avons plus qu'un seul rival (sachant qu'on a déjà écrasé tous les autres), les Monttags ? Un gang de riche venant du lycée Monttag, des fils à papa qui n'ayant rien d'autre à faire se battent et ont fait de leur lycée de riche une école de gang. Je les déteste à un point inimaginable, alors qu'ils ont tout pour eux, il faut qu'ils viennent nous emmerder.

Je soupire et m'étire de façon peu gracieuse, en attendant de pouvoir faire un nouveau Strike. J'écrase ma clope sur la table (une par soir, je tiens à ma vie quand même), et sirote un verre de coca. Je suis certainement la seule à en boire ici, ils ont tous 18 ans et plus, moi je reste à 17, même si j'ai hâte de passer la barre de la majorité. Mais si je le voulais je pourrais en boire, de l'alcool je veux dire, qui irait vérifier ?

Je sens une vibration dans la poche arrière de mon treillis moulant, puis près quelques secondes une deuxième plus une troisième. Je lance un regard au vigil de tout à l'heure et celui-ci secoue la tête de haut en bas, une seule fois.

Merde !

Je tape un grand coup du poing sur la table, faisant au passage tomber une multitude de canettes et d'assiettes en carton, attirant tous les regards vers moi.

Les Monttags arrivent.