Chapitre I, Luis

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« Lèves toi du con ! »
Un oreiller me percuta de plein fouet, me réveillant brutalement d'un sommeil sans rêve. Je me redressais rapidement pour découvrir mon frère, une lueur sadique imbibée dans le regard et un sourire antipathique sur les lèvres. Ce gamin était vraiment un emmerdeur, je le disais tous les jours à mama et tous les jours elle hochait la tête en me répondant que j'étais pareil à son âge, sans m'accorder plus d'attention. Elle faisait ça tout le temps, ne m'écoutait jamais que quand je venais lui rapporter une mauvaise nouvelle du type : « Je me suis battu... ». J'avais souvent envie de l'attraper par ses épaules et de la secouer violemment jusqu'à ce qu'elle se réveille et se décide à enfin redevenir humaine. Mais non, elle prenait grand soin à ne pas se séparer de sa putain de carapace, qui la transformait en robot.

Je pris le coussin – reposant sur mon ventre – et le lançais tout aussi brusquement en plein dans la tête de mio fratello. Mon projectile atteignit sa cible dans le mille et le petit con ce mit à beugler comme un bébé. Bordel, ce qu'on pouvait être idiot à 14 ans ! En me cherchant il n'avait pas pensé une seule fois que je me vengerais ? Je me levais et étirais mes bras et mes jambes en adressant un sourire tout aussi déplaisant à mon frère. Celui-ci jura, essayant de rattraper le morceau de tissus qui nous servait d'arme, cependant je ne lui laissais pas l'occasion de répliquer et attrapais l'objet, le brandissant au dessus de sa tête tandis qu'il me lançait un regard outré. Ce crétin n'avait pas encore grandit et était très susceptible quant aux remarques qu'on lui faisait à propos sa taille... Mais j'en avait rien à foutre de la sensibilité de ce bambino. Il allait la faire sa poussée de croissance, alors pourquoi se monter la tête avec ça ? Comme à chaque fois qu'il était vexé, il sortit de notre chambre pour aller dans celle de Ilaria, notre sœur. Je savais déjà qu'il allait raconter une tonne de conneries pour qu'elle vienne me reprocher ces choses que je n'avais jamais faites. Mais de toute façon, je me fichais éperdument de ce qu'elle avait à me dire. J'aimais ma sœur, vraiment, mais quand elle me gueulait dessus sans rien connaître de l'histoire, ses phrases, je me les mettais là où je pense.

J'attrapais des vêtements au hasard dans le vieux tiroir grinçant qui me servait d'armoire, à moi, ainsi qu'à mes deux autres frères, puis fonçais dans la salle de bain avant qu'un de ces stronzi ne vienne ma la piquer pendant deux putains d'heures. Je claquais la porte derrière moi et enfilais un t-shirt noir et un jean. Je décidais de faire un effort niveau vestimentaire aujourd'hui et passais un coup de peigne rapide dans mes cheveux noires toujours en bataille. Après tout, aujourd'hui c'était la rentrée, fallait que je sois un minimum présentable ! Même si je savais que me ramener avec les capelli décoiffés plaisait pas mal aux filles. Je ne comprenais pas pourquoi mais elles adoraient ça, comme me l'avaient avoué la moitié des filles avec lesquelles j'avais couché.

Une fois mes dents lavées, je sortais, totalement conscient des tambourinements noiosi que ma sœur n'avait pas arrêté de faire sur la porte depuis que j'étais entré. Elle allait m'engueuler, ce qui ne changeait pas de notre quotidien merdique. À peine un pied dehors qu'elle était déjà sur moi en train de me crier dessus sans que je ne comprenne rien. Je hochais la tête, un air blasé plaqué sur la tronche et descendis les escaliers tandis que je l'entendais s'exclamer d'un ton excédé : « Tu m'as écouté au moins ? ». Je ne répondis pas à cette question inutile, elle connaissait déjà la riposta.

Une fois en bas, je retrouvais mama, Marco et ce deficiente de Ansielmo. Il me fixait comme si je venais de prendre un marteau et de détruire les 3 m2 di merda dans lesquels on vivait. Je m'affalais sur la chaise à côté de mama et en face de Ansé, tout en adressant un signe de tête en guise de salut à mon autre frère. Celui-ci fit de même avec moi et j'entamai une pomme qui se trouvait devant moi. Mia madre ne nous regardait pas, elle se concentrait sur un point non définit au dessus de la tête de Marco. Quelques semaines auparavant, elle avait fait une rechute dans sa dépression et elle était même plus capable de dire un mot. Elle passait ses journées les yeux dans le vide, à fumer un nombre de clopes astronomique qui pompait tout le blé qu'on rapportait de nos boulots après les cours. Pour payer ses médocs, Ila et moi allions devoir postuler pour un bar d'hôtel hyper chic et pretenzioso samedi soir, parce que le taudis dans lequel on servait ne nous rapporterait jamais assez.

Un regard vaut mille motsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant