20 mai 1915

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Mon cher mari bien aimé,

Le journal ne dit rien vraiment de ce qui se passe en Champagne et j'attends tes lettres chaque jour. As-tu reçu mon mandat, tu ne m'en dis rien et la gniole aussi que tu me demandais et que j'ai envoyé à Mourmelon.

Mais j'apprends que tu es parti pour le Nord depuis le 9 mai.

Ton travail dans le génie cycliste est-il moins dangereux ? Tu me dis avoir tes journées libres et ne travailler que de 8 heures du soir à 3 heures du matin. Si seulement tu pouvais toujours creuser des galeries et ne pas avoir à sortir à découvert pour couper les barbelés.

Cette guerre finira-t-elle un jour ? On dit qu'avec les italiens à nos côtés cela devrait aller vite mais je ne crois plus à rien et j'attends chaque jour en priant la sainte vierge qu'elle te garde en bonne santé. J'essaie d'avoir autant de courage que toi qui fais ton devoir.

Je t'envoie une glace et un peigne comme tu me l'as demandé et j'espère que la vermine te laissera plus tranquille. Tes dents aussi qui te font souffrir et t'empêchent de manger de la viande.

Nous avons planté les pommes de terre et le maïs. C'était pénible car il faisait très chaud mais notre petite Jeanne a aimé ces premières sorties au soleil. La nature est bien belle cette année avec tous les pommiers en fleurs dans les vergers, les papillons et les oiseaux. Les bords de l'Isère m'ont fait repenser à nos promenades ensemble. Comme cela me paraît terriblement loin.

Mes pensées te suivent au bord de la mer, si loin de notre pays savoyard.

Ta femme Joséphine qui t'embrasse tendrement


De Joséphine à CélestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant