Chapitre 2 :

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« À quiconque trouvera ce journal, sachez que si vous êtes en sa possession, il est possible que je sois mort. Si tel était le cas, je vous en prie, faites en sorte que ces précieux écrits ne tombent pas dans l'oubli ! Nous sommes en l'an 43 sous le règne de Lylian et Hora, les deux tyranniques. On me couperait la tête si on m'entendait dire ça, mais je prends le risque.

Mon nom est Peter Monroe et je viens d'un petit village du nom de Bormäl, sur la planète Gereos. J'ai toujours su que ma place n'était pas ici, c'est pourquoi mes compagnons Thomas, Erik, James et moi-même avons décidé de tout quitter pour partir en quête d'Agartha, la planète légendaire du système Nenan. Après des années de recherche nourries par notre obsession commune, nous avons enfin convenu de partir cette année, au premier jour de l'automne. Nous bouillonnant d'impatience en pensant à notre aventure, mais les préparatifs semblent si longs ! Pour nous qui n'avons jamais quitté notre planète, traverser le système Nenan semble être de la pure folie. La promesse d'un monde meilleur suffira à nous porter tous les quatre, j'en suis certain !

Seul problème : la planète Naniorh est la plus grande planète de notre système et de loin la plus dangereuse. D'après ce qu'on raconte, elle serait peuplée de créatures nommées legendys, gardiennes envoyées des Cieux pour protéger Agartha des âmes impures qui chercheraient à fouler son sol. Je ne saurai dire si elles existent vraiment. Pour être honnête, je ne crois pas aux créatures divines, pas plus qu'à la notion d'impureté des êtres humains. Néanmoins, mes compagnons et moi serons armés en conséquence, juste au cas où.

Ce sera difficile. Personne avant nous n'a jamais entrepris le voyage vers Agartha, ou si c'est arrivé, personne n'en a jamais laissé aucune trace. En rédigeant ce journal, j'espère que je parviendrai à convaincre d'autres aventuriers intrépides de tenter ce périple. Peut-être qu'ainsi, poussés par l'espoir d'un changement radical ou la possibilité d'une vie meilleure, les gens se décideront à renverser l'autorité de l'Empire. Peter, l'un des premiers hommes à avoir marché sur Agartha... Ça sonne si bien ! Je me demande ce que cette planète cache ? Peut-être des trésors inestimables, ou des races d'animaux exotiques aux viandes succulentes ? James est un vrai cordon bleu, je suis certain qu'il arrivera à nous préparer des mets exquis.

Si je devais vous parler de ma vie actuelle, cela prendrait à peine quelques lignes. Fils de mineur depuis au moins trois générations, je suis censé être destiné à reprendre le flambeau familial. En réalité, nous faisons tous partie de la même équipe de mineurs, et avec les autres, j'aspire à bien mieux que de briser des cailloux à longueur de journée. Je dois avouer que mon village natal va me manquer. Je me suis habitué aux odeurs âcres de terre, au bruit cadencé des pioches contre la roche, à la moiteur souterraine des mines... En décidant de laisser tout ça derrière, je fais également un trait sur un possible futur ici. Je n'aurais pas de femme, pas d'enfant, pas d'héritage si ce n'est d'avoir l'honneur de vivre là où personne n'a réussi. La seule raison pour laquelle je tiens ce carnet entre mes mains, c'est parce que j'ai payé des cours à un type louche pour apprendre à écrire. Ça m'a pris du temps, même si je dois avouer que j'apprends particulièrement vite. C'est pourquoi relater mes histoires sur ces quelques feuilles de papier me procure un bonheur d'autant plus intense. »

Ambre me fixe impatiemment, attendant la suite. J'aurais volontiers continué s'il n'était pas l'heure d'aller se coucher. Je me suis rendu compte, en levant les yeux vers la fenêtre, que j'avais servi le repas trop tard et qu'il est déjà l'heure pour ma sœur d'aller dormir. Avec mes parents absents, je devrais me lever tôt demain pour assurer leur travail. Fait chier. Je borde alors ma sœur tendrement, et lui embrasse le front. Je lui promets de continuer l'histoire demain, puis je quitte la pièce pour rejoindre mon lit. Le sommeil peine à venir, je me tourne et me retourne sans cesse dans mes draps. Les mots « les murs ont des oreilles » me trottent dans la tête jusqu'à m'obséder. Pourquoi ces cinq mots ridicules m'ont-ils autant marqué ? Je retourne la question dans ma tête jusqu'à finalement trouver le sommeil, bercé par le bruit sourd des flocons de neige tourbillonnant au-dehors.

Agartha - L'appel de l'inconnu [Terminé]Where stories live. Discover now