Le crime parfait

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Quand nous sommes enfants, nos parents nous lisent des contes où les gentils triomphent toujours, nous parlent de la vie de façon merveilleuse, pour nous consoler nous apprennent qu'il faut toujours persévérer car « demain sera toujours meilleur qu'aujourd'hui ».

Ils nous élèvent avec l'idée qu'en nous battant, qu'en travaillant toujours plus et bien, on aura notre « place au soleil ».

On grandit avec les proverbes et autres sagesses ancestrales du type :

« Tout vient à point à qui sait attendre »
« Il n'y a que les tonneaux vident qui font du bruit »
« La violence c'est pour les faibles »
« Même après la nuit la plus noire, le jour finit toujours par se lever »
« On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre »
« Le bout de bois aura beau durer dans l'eau, il ne deviendra jamais caïman »

Bref, vous voyez le genre.

Pour nous les femmes, nos mères nos enseignent comment tenir une maison, comment cuisiner, les bonnes manières, les attitudes à ne pas avoir en public, la manière de s'asseoir, la façon de se laver, de faire la vaisselle, se maquiller, s'habiller, les bonnes marques de lessive, de vêtements, de sous-vêtements, comment faire des nœuds de cravate, comment prendre soin d'un bébé, d'enfants... En résumé, elles nous apprennent à être « elles » en oubliant pas de nous recommander d'éviter x ou y choses qui n'ont pas fonctionnées dans leurs vies.

Elles veulent bien sur le meilleur pour nous mais dans le même temps ne veulent pas nous ôter nos illusions, pas toujours simple... Donc à tous les niveaux, en plus de ce que nous apprenons à l'école et à la maison, la vie, notre vie se charge également de nous éduquer. Parfois de manière violente, brutale et sans concession...

J'avais pourtant tout mis de mon côté, j'avais été une brillante élève, une amie sincère, une fille et sœur présente, j'avais une vie équilibrée entre activités scolaires, para scolaires et loisirs. J'étais restée vierge jusqu'à mes 21 ans, bien qu'ayant un petit-ami. Il était parfaitement à l'aise avec ça car il disait toujours qu'il adorait l'idée qu'il m'apprendrait tout, une fois mariés et qu'il aurait l'assurance au moment de nos vœux à l'Eglise, que nous étions purs...

Avais-je songé même une fois à remettre en cause sa sincérité, son intégrité ? Non, jamais. Nous étions ensemble depuis que j'avais 15 ans, il a été mon premier flirt. Il a 3 ans de plus, c'est l'ami de mon cousin (élevé par mes parents). Tout le monde chez moi le connaissait et l'appréciait.

C'est le gendre idéal, BAC à 18 ans, il a fait Finance à Londres, où il a direct été engagé dans un grand Groupe International. Il est beau, élégant, polie, serviable, intelligent, drôle et un amant formidable. Bon c'est vrai, je n'ai pas de référentiel mais quand je discute avec d'autres femmes, que je lis les descriptions sur des forums et autres, je crois que ce tsunami émotionnel et physique que je ressens quand il me fait l'amour et/ou me baise (oui, oui, il me baise aussi, notre sexualité est très libérée, il m'a initiée à plein de choses, m'a même appris à me masturber...).

Nous nous sommes fiancés l'année de mes 23 ans et mariés celle de mes 25. Notre premier enfant est né l'année suivante, un an après les jumeaux et la dernière alors que j'avais 28 ans. Nous avons eu des « escaliers » lol. C'était voulu, nous voulions les avoir tôt et rapproché ! C'était notre « planification », comme quasiment tout le reste, des études au pays où nous vivions, l'Angleterre, et même la date à laquelle nous devions repartir sur le Gabon. Tout était calculé et nous avons maintenu notre « programme ».

C'est donc l'année de mes 40 ans, après 20 ans passés à Londres, Lagos puis Shanghai, que nous sommes rentrés définitivement au pays.

Nos enfants étaient en pleine adolescence et nous voulions qu'ils connaissent leurs racines avant de quitter le nid pour repartir vers d'autres contrés...

Nous avions une excellente situation financière, j'étais l'heureuse directrice de la filiale d'un groupe de communication à la renommée internationale.

Au cours des années et de nos passages réguliers, nous avions pris soin d'acquérir un terrain à la Sablière où nous avions fait construire notre résidence.

Bref, ce n'est pas ça le but de mon propos.
Nous étions rentré depuis bientôt dix ans quand mon mari s'est épris de politique, au début, ça ne m'a pas trop alarmé, j'étais plus occupé à gérer l'installation de notre dernière aux USA qui devait y poursuivre ses études donc au départ, je n'ai pas pris garde à l'ampleur de son implication.

Ce n'est qu'une fois seuls dans notre maison, vue que tous nos enfants étaient à l'étranger, que je réalisai qu'il assistait à toujours plus de réunion, toujours plus de voyage vers l'intérieur. J'en parlai avec lui et il me dit qu'il aimait bien et que je n'avais pas à m'inquiéter, il resterait toujours dans l'ombre qu'il secondait juste son père. En effet, son père était un grand notable de leur région, rien ne se faisait sans lui...

J'étais sceptique et avais un mauvais pressentiment. Et j'avais bien raison !!!

Il se trouve que mon mari parle en dormant, ou plus exactement, il lui arrive de parler en dormant, principalement quand il est sujet à un grand stress. Ceux sont des murmures donc je ne suis quasiment jamais dérangée par ça. Je ne le sais que parce que je fais rarement une nuit complète sans faire ma pause pipi...
Environ un an après le départ de notre dernière, il a commencé à avoir un sommeil plus qu'agité, il faisait des cauchemars visiblement horribles, mais le matin, il ne s'en souvenait pas. Puis j'ai constaté qu'il buvait plus que d'habitude, mon mari qui me parlait de tout était devenu cachotier, fuyant.

J'ai d'abord pensé à une autre femme mais très vite, ses cauchemars et ses murmures nocturnes m'ont appris l'impensable. Je ne pouvais y croire, j'étais atterrée, choquée, j'avais peur et ne savais quoi penser ou faire.
Après plusieurs semaines de doute, je me décidais à l'interroger sur ses rêves, à la façon violente dont il me rabroua, je su...

Je ne saurai vous dire au bout de combien de temps je décidai de tuer mon mari, tout ce que je sais, c'est que je ne pouvais le laisser continuer mais je ne pouvais l'exposer, nous exposer et surtout exposer nos enfants à la honte, la culpabilité, l'éclaboussure macabre !
Je commençais à mettre toutes nos affaires en ordre, puis chaque jour, je distillais, dans le repas, le produit qui devait le délivrer de cet engrenage.

Il fit plusieurs attaques, c'était voulu, car notre entourage devait le savoir « fragile ». J'ai tout prévu, je me suis arrangée pour que nous rendions visite à chacun de nos enfants, que nous ayons des moments privilégiés avec chacun d'eux.

Vous me trouverez certainement aussi criminelle qu'eux, aussi cruelle qu'eux mais cet homme, je l'aime plus que ma vie, je ne peux supporter que le monde le voit autrement que l'être merveilleux qu'il a été les ¾ de sa vie !

Que son image soit associée aux crimes rituels ? Aux enlèvements ? Au trafic de clitoris et autre ? Non, je ne peux pas l'accepter.

Je suis sa femme, son amie, sa complice, son tout... Je me dois de le protéger, même de lui-même !Sinon, à quoi auraient servi tous ces sacrifices pour arriver à construire notre foyer?

Voilà, il fallait que je me confesse, j'ai choisi ce forum d'anonyme, demain, on va nous trouver... quoi, vous pensiez que je le laisserai partir sans moi ?! Mais vous n'avez vraiment rien comprend !

Je nous « suicide » depuis des mois, je mange tout ce qu'il mange, nos cœur ont désormais la même fragilité. Ce soir, j'ai ajouté le médicament fatal. Mon mari est déjà tombé de sa chaise, je vais terminer mon repas dès que je vous laisse et on me retrouva à ses côtés.

Ils concluront à une crise cardiaque dû au retard de son opération pour lui (oui, je me suis arrangé pour qu'elle ne se fasse jamais, je suis celle qui a toujours tout gérer dans cette maison) et une crise cardiaque de chagrin pour moi... Tout le monde a toujours vu dans quel état ses crises me mettent !

Je vous dis adieu et merci de m'avoir lue...

Fin.

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