Chapitre 50 : Après

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~ "Doubt thou the stars are fire" Hamlet ~



Setsuha passa absentement les contrôles de sécurité, patienta devant des portes verrouillées jusqu'à ce que le déclic de l'ouverture électronique l'autorise à les franchir et se retrouva enfermée dans un box hautement sécurisé du parloir. Sous l'œil des caméras, elle prit place face à l'hygiaphone. L'appréhension pesait sur sa poitrine, étouffant tout soupçon de joie ou d'impatience.

Enfin, du mouvement se produisit de l'autre côté de la vitre. Aucun son ne lui parvint jusqu'à ce que Atsuhiro, en tenue réglementaire de détention, se fut installé et activa le micro. La gorge serrée, Setsuha l'étudia.

On lui avait retiré sa prothèse, l'obligeant à nouer la manche flottante de sa tunique. Sous la lumière crue, il avait les traits tirés et le regard terne, mais demeurait rasé de près, ses boucles propres et bien définies. Elle fouilla ses yeux noisette, tâchant d'anticiper l'accueil qu'il lui réservait avant qu'il ouvre la bouche.

Il la contemplait comme une image réconfortante, avec une nostalgie attendrie. Se fendant d'un infime sourire, il prit la parole le premier :

— Je n'étais pas sûr qu'ils te laissent venir.

— Ils n'ont pas de raison de m'en empêcher. Désolée, je ne t'ai pas appelé avant. J'avais besoin de te voir en face.

Il haussa les épaules d'un air dégagé.

— Les appels sont hors de prix, de toute façon.

— Comment ça va ? Tes blessures, je veux dire.

Atsuhiro se recula quelque peu sur sa chaise et souleva sa tunique. Couvert de films post-opératoires et de sutures, perforé de tuyaux, son flanc entamait à peine la cicatrisation.

— Oh, Atsu, souffla-t-elle devant les séquelles de ce qu'il s'était auto-infligé.

— J'en ai encore pour des mois, mais je vais me remettre, l'assura-t-il.

Il replaça sa tunique et garda un instant le silence, sa mine traduisant une attente informulée.

— Et toi ? reprit-il. J'ai accès aux informations, je sais comment... tout s'est terminé. Mais pour le reste... ta famille va bien ?

— Il leur est rien arrivé. Disons que ça a été deux semaines pleines de chamboulement. La réputation de Kaya a explosé. Elle est devenue la photographe de la crise. Mais pour le moment, elle récupère. Enfin, elle essaie. C'est dur pour elle de clore tout ça. Je pense qu'elle a besoin de voir Tõya pour entamer le deuil de ce qui s'impose.

Une expression peinée plissa la figure de Atsuhiro. Il se rencogna contre son dossier avec un soupir.

— J'aimerais pouvoir t'en dire plus, vu qu'il est là aussi, mais j'en sais sûrement moins qu'elle.

— Sa famille communique avec Kaya. Jusqu'à présent, il était pas en état de recevoir des visites. Ils ont passé des jours à lutter pour le garder en vie.

Atsuhiro émit un souffle ironique et arqua un sourcil.

— Pourquoi faire ? Le confiner ici jusqu'à la fin de ses jours ? Je veux dire : je n'ai pas envie de perdre l'un des derniers compagnons qu'il me reste, et je sais à quel point la fratrie serait dévastée. Mais qu'est-ce qui l'attend ? Pourquoi lui se battrait ?

Setsuha se redressa avec un frémissement d'ailes.

— Justement, il y a quelque chose que je voulais t'annoncer. Une commission de vérité et de réconciliation est en train de se former. Il va y avoir un processus d'enquête pour retracer officiellement ce qui a pu mener à la guerre civile. Il ne s'agit pas seulement de décortiquer les agissements de All for one, mais aussi de lever le voile sur les défaillances du système héroïque.

𝐃𝐑𝐀𝐌𝐀𝐓𝐈𝐒 𝐏𝐄𝐑𝐒𝐎𝐍𝐀𝐄 ᶜˡⁱᶠᶠʰᵃⁿᵍᵉʳ ᵗᵒᵐᵉ ²Where stories live. Discover now