Cameron
L'espace est encore brut, les murs nus, mais l'air est chargé d'une énergie électrique. Je sens chaque pas, chaque murmure comme une décharge. C'est mon monde qui se dévoile, peu à peu, sous mes yeux.
Arzy est là, fidèle, rigolard comme toujours, lançant des blagues qui font rire tout le monde, même si je sens la tension partout. Katrina grimpe sur une échelle pour ajuster la lumière. Je la regarde, admirant sa force tranquille, sa détermination sans faille. Ashley, elle, tient sa tablette comme un chef d'orchestre, organisant chaque détail avec une précision chirurgicale.
Et puis il y a Alana. Elle est l'œil qui calme la tempête, la main qui me ramène quand je vacille.
- Tu crois que tu es prêt mon amour ? Je l'entends me demander doucement
Je ne sais pas vraiment. J'ai peur. Une peur profonde, viscérale. Mais c'est une bonne peur, celle qui pousse, qui fait avancer. Je prends une profonde inspiration et je réponds
- J'ai peur. Mais c'est une bonne peur. Une qui pousse. Je vais enfin dire ce que je suis, avec mes couleurs, mes trous, mes colères... ma vérité.
Elle me serre la main, un geste simple, mais qui m'ancre. Je sais que je ne suis plus seul.
Ce cri suspendu entre ces quatre murs, c'est notre cri. Et dans trois jours, tout le monde va l'entendre.
Je décroche doucement le drap qui cache un autoportrait. Brut. Honnête. Le regard qui ne fuit pas. Le pinceau dans une main, un masque fracassé dans l'autre. C'est moi. Tout simplement.
La nuit enveloppe notre espace d'une lumière tamisée. Seuls quelques néons restent allumés, jetant des ombres dans les coins vides. Je reste là, au milieu, les mains dans les poches, le regard fixé sur les toiles.
Le silence est lourd, presque pesant. Je sens le poids de tout ce que je m'apprête à dévoiler pas seulement au monde, mais à moi-même.
Arzy me fait une tape dans le dos, son rire un peu forcé pour dissiper la tension. Katrina ajuste une dernière fois une lumière, le visage concentré. Ashley vérifie une dernière fois le programme, les invitations, le moindre détail.
Alana est près de moi, sa présence douce, rassurante. Je prends sa main, et dans ce simple contact, je puise une force nouvelle.
Demain, je ne serai plus Swann l'ombre.
Je serai Cameron, l'homme brisé mais debout.
Celui qui peint pour guérir, pour dire, pour exister.
Je ferme les yeux un instant. Le trac monte, la peur aussi. Mais je choisis d'avancer, de me tenir face à tout ça, prêt à me montrer tel que je suis...
Le lendemain
La lumière crue révèle chaque toile accrochée avec soin. La foule s'agglutine, murmures excités, regards curieux. Je sens les battements de mon cœur s'accélérer à mesure que les visiteurs entrent.
Les premières personnes s'arrêtent devant mes œuvres. Je vois leurs yeux se plisser, leurs sourcils se froncer, certains sourient, d'autres sont émus. Je remarque des doigts effleurer les cartels, chercher à comprendre.
Alana est à mes côtés, un sourire discret, protecteur. Arzy plaisante avec des invités, détend l'atmosphère. Katrina veille au grain, prête à intervenir. Ashley navigue entre les groupes, coordonnant le déroulement.
Les flashes crépitent dès l'entrée, aveuglants.
Les journalistes sont là, appareils photo en main, micros tendus, prêts à capter chaque parole, chaque émotion. Leurs questions fusent, parfois intrusives, parfois sincères.
Un journaliste s'approche, micro en avant
- Swann, ou plutôt Cameron, comment ressentez-vous cette révélation publique de votre identité ?
Je prends une profonde inspiration, le regard posé sur l'assemblée, puis je réponds calmement
- C'est un soulagement. Un poids en moins. Peindre dans l'ombre, c'était nécessaire, mais aujourd'hui, je veux être vu tel que je suis, avec mes blessures et mes forces.
Une autre journaliste enchaîne, un sourire professionnel
- Certaines rumeurs disent que cette exposition est aussi une réponse à l'interview de Zachary. Que répondez-vous à cela ?
Je choisis mes mots avec soin
- Cette exposition, c'est avant tout mon histoire. Je ne combats rien ni personne. Je peins ce que je ressens, ce que je vis.
Les caméras tournent, les micros captent, et je sens que cette nuit sera un tournant.
Alana me serre la main, un signe silencieux de soutien. Je suis prêt.
Un critique d'art s'approche, l'air sérieux, scrutant une toile en particulier mon autoportrait fracassé. Il hoche la tête, murmure quelque chose à sa collègue. Plus loin, une jeune femme s'essuie furtivement les yeux.
Un visiteur m'aborde timidement.
- C'est... puissant. Brut. On sent la douleur et la beauté mêlées.
Je lui réponds simplement, le souffle un peu court
- Merci. C'est tout ce que je voulais.
La soirée avance, les voix s'élèvent, les applaudissements fusent au moment où je prends la parole. Je parle peu, mais chaque mot est sincère, pesé. Je dévoile un peu de moi, de Swann, sans masquer les cicatrices.
À la fin, une ovation. Je sens la chaleur humaine, la reconnaissance. Je ne suis plus l'ombre que je fuyais. Je suis là. Entier.
Alana
Je regarde Cameron au milieu de la foule, ses traits tendus sous la lumière, mais ses yeux brillants d'une vérité nouvelle. Chaque tableau raconte une part de lui, chaque couleur semble parler directement à mon cœur.
Autour de nous, les gens chuchotent, s'émeuvent, s'arrêtent, touchés. Je vois des larmes furtives, des sourires admiratifs, des mains qui caressent doucement les œuvres comme pour y puiser une force.
Cameron, cet homme que j'aime, s'ouvre enfin au monde, et moi, je ressens une fierté immense, mêlée d'une tendresse bouleversante. Il n'est plus seul dans son combat. Il est là, entier, vulnérable, courageux.
Je lui serre la main, un contact léger mais chargé d'émotions. Sans un mot, nos regards se croisent et tout est dit. C'est le début d'un nouveau chapitre. Pour lui. Pour nous.
La foule s'est dissipée, les échos des conversations s'estompent doucement. Nous restons seuls dans la grande salle, entourés par les toiles, témoins silencieux de ce que Cameron vient d'offrir au monde.
Je m'approche de lui, le cœur battant, cherchant à capter ce qu'il ne dit pas. Il baisse les yeux, hésitant, comme si la vulnérabilité qu'il a exposée sur les murs l'atteint maintenant personnellement.
Je glisse mes mains dans les siennes, chaudes, réelles.
- Tu as été incroyable, dis-je doucement.
Il relève les yeux, et dans son regard, je vois la fatigue, mais aussi une lumière nouvelle.
- C'était effrayant, confesse-t-il, mais je ne regrette rien. Pour la première fois, je me sens libre.
Je souris, soulagée, et sans réfléchir, je l'attire contre moi. Le monde extérieur s'efface, il n'y a plus que nous, le bruissement discret des toiles et nos souffles mêlés. Il pose ses lèvres sur mon front, un geste tendre, presque silencieux.
- Merci d'avoir cru en moi, murmure-t-il.
- Toujours mon chéri
Je ferme les yeux, sentant enfin que malgré tout, l'espoir peut renaître. Que nous pouvons avancer, ensemble, avec la lumière et les ombres...
YOU ARE READING
A fleur de toi (Tome 2)
Teen FictionUn mariage, un enlèvement...De retour après plusieurs mois loin de chez lui, Cameron est décidé plus que jamais à reconquérir le cœur d'Alana.
~Chapitre 41~
Start from the beginning
