XI

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A la seconde même ou Monsieur Rachitique sonne chez nous en ce samedi, je me suis mise à regretter très amèrement ma semaine. Une chose est sur, elle ne fut pas assez longue. J'ai eu toutes les peines du monde à quitter Caym vendredi et encore plus Monsieur Kalingo, surtout lui en fait. Cet homme aux allures d'ours mal léchés me fait terriblement rire, il a un humour brut et ses mots sont parfois crus mais il me fait rire, parfois je me dis que ce n'est pas possible ce n'est pas un tueur, mais si. Son dossier l'atteste, il a tué de sang froid.


Triste réalité, vraiment.


Avant de faire mon apparition je me regarde une dernière fois dans le miroir de ma chambre, je suis terriblement fade, tristement fade, avec ma jupe droite et mon chemisier sans parler de mon chignon de petite fille sage. Je détourne mon regard, j'ai bien trop honte de ce que je suis. Je ne m'aime pas, pas comme ça, je me préfère au pénitencier. Là-bas toutes mes brides s'envolent, je peux répondre sans aucune craintes des représailles, je peux aussi bien aimer le son de ma voix que ce qui en découle. Le seul hic, c'est que mon image ne colle pas avec ma véritable personnalité, ni ici ni là-bas.

Qui suis-je vraiment ? Celle aux habits impeccable ou celle à la voix forte ?


J'empoigne mon portable et le déverrouille du même geste, j'ai envie d'appeler quelqu'un et de lui hurler tout mon mal être. Mais qui ? Et pour dire quoi au final ? Tout cela me semble si futile tout d'un coup ... Je jette ce petit appareil qui atterrit rapidement sur mon lit, je souffle et me dirige sans me presser vers ma porte de chambre.

Je tourne les talons et me précipite sur ce dernier et je me dépêche à écrire ces quelques mots pour mon frère.

" Que ferais tu si allait partager un repas avec le grand méchant loup ? "

Je le remets à sa place et sors enfin de cette pièce sans grande conviction. Le spectacle qui m'attend en bas me laisse sans voix. Père, un verre de scotch à la main, sourit et congratule, ce qu'il pense être son futur gendre, mère remue dans tout les sens, seule ma petite sœur reste en retrait dans un coin de la pièce principal. Elle observe les moindres faits et gestes de l'intrus sans vergogne, elle le dissèque et du haut de ses onze petites années elle ferait presque peur.

Mère est la première à me remarquer, elle m'observe de haut en bas et d'un bref coup de tête je sais qu'elle approuve ma tenue, rien que pour la contrarier j'aurais du mettre le jean offert par Christophe. Je pense vraiment que leurs tête a tous aurait été épique. A coup sur ils m'auraient renié ...


Pourquoi n'ai-je mes bonnes idées qu'âpres coup ?


- Bonjour Jeanne comment allez vous ?
Ose me demander Monsieur Rachitique avec son plus beau sourire.
- Bien, je vous remercie et vous ? Je ne lui retourne la question que par pur politesse et surtout parce que nous sommes observés, en ce moment père et mère ressemblent a des vautours guettant leurs proie d'un œil avide.
- Pouvons-nous y aller ?

Je lui réponds d'un sourire, le plus faux que j'ai en réserve, puis prends ma veste. Lucie vient nous embrasser avant de partir, enfin elle me fait une bise puis jette un regard par dessus son épaule quand elle remarque que nos parents ne la regardent pas elle regarde de haut en bas Andy et se détourne sans aucune forme de politesse. Je sers les dents pour ne pas rire fasse a l'effronterie de cette petite.


Avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit je lui attrape le bras et le dirige doucement vers la sortie, le tout avec des yeux de biches. J'ai souvent vue mère le faire avec père, et je dois bien avouer que c'est une stratégie qui fonctionne.

Puis c'est pour Lucie alors je peux, non, dois le faire.

l'envol du cygneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant