51. A simple plan

Depuis le début
                                    

Elle rit et passa les mains sur son visage.

— Donc, dans ton... film, tu seras Clark, et je serai ta co-équipière. Loïs, c'est ça ?

— Pas avec des cheveux verts.

— Non, d'accord. Pas avec des cheveux verts. Noirs. En chignon. Peut-être que je devrais aussi mettre des lunettes. Tu comptes mettre ton slip au-dessus de ton pantalon ?

— Est-ce que c'est obligatoire ?

Elle gloussa de plus belle. 

— Tu es mignon. Mais il reste le problème des papiers. On n'est pas journaliste parce qu'on le prétend. Il nous faut une carte de presse. Une preuve. Et Miles est sur les dents, il va contrôler et surcontrôler chaque personne qui se pointe. L'idée est belle, mais me semble peu réaliste. On aurait beaucoup plus de chances de rentrer par les cuisines. Ils ont besoin de trente-six serveurs, hôtesses et autres marmitons, dans ce genre de situations. Mais je suis plus ou moins sûre que les listes sont aussi vérifiées des décennies à l'avance. Si ce ne sont pas des EBAs, en réalité. Franchement, profiter de la foule pour casser une vitre et entrer par une fenêtre me semblerait tout aussi efficace. Sans appui, nous n'y arriverons jamais.

— Alors je ferai pression sur Max, murmura Hector, pensif.

— Je propose que tu le fasses tout de suite.

La voix, courroucée, venait de derrière eux, et Hector se retourna pour découvrir le principal intéressé, accompagné de deux de ses hommes : le baraqué qui semblait diriger le service d'ordre et Jeroen, qu'on avait manifestement arraché aux bras de Morphée. Le fait qu'ils ne soient que trois indiquait qu'ils ne s'attendaient pas réellement à du grabuge. Même si le soldat était musclé, Hector le neutraliserait avant qu'il ait pu esquisser un geste.

— Laissez-nous y aller, dit simplement Hector, sans se laisser impressionner. Votre intervention nous offrira la diversion rêvée. C'est sans doute notre meilleure opportunité. Sans quoi votre coup d'éclat va tomber à plat. Ils éteindront les écrans, ils crieront au scandale. Vous n'obtiendrez rien de plus, juste un instant de tumulte, qu'ils étoufferont aussitôt.

Max grimaça. Hector savait qu'il voyait juste. Il avait eu le temps de regarder deux films sur Légendes, qu'il avait décidé de considérer comme des documents et non des contes. Il en faudrait plus qu'un héros caressant un chat et épaulant une grand-mère pour renverser leurs murs.

— Vous le combattez avec vos armes, qui sont sûrement très adaptées à ce temps où on s'écharpe à grands coups d'invectives et de preuves, au nom d'une... éthique qui m'échappe. Mais Légendes est, dans le fond, une institution barbare. Qui pliera devant des méthodes barbares. Comme les miennes. S'ils se sont élevés par le sang, ils périront par le sang. Laissez-moi y aller. Avec Dame Dackitt si elle le désire. Leurs portes seront ouvertes, ils voudront festoyer.

— Que comptes-tu faire, au juste, une fois que tu seras à l'intérieur ?

— Torcher la cité, bien sûr. Détruire ce qui peut l'être. Libérer les prisonniers.

— C'est absurde.

— Délivrer Nina.

Il avait failli mentionner Arthur mais s'était retenu in extremis. Max en profiterait pour échapper à la conversation, pour réduire leur initiative à un délire mal inspiré.

— Non, annonça néanmoins l'érudit. Non, non, non, et non.

Il fit un signe et le gros bras s'approcha.

— Tu vas retourner dans ta chambre, et toi...

Il leva un doigt vers Leo.

— Je ne sais pas ce qu'on va faire de toi, Aliénor.

Les Héros de Rien (en cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant