Tatouage de Sang - Malédiction. Tome 1

9.1 r

　

La nuit était tombée. La rue n'était éclairée que par les lampadaires sur le trottoir et la chaleur de la journée s'évanouissait petit à petit, ne laissant qu'une moiteur sirupeuse vaguer dans l'air. Un vent tiède vint soulever ses cheveux libres. Assise à même le sol sur le balcon qui lui était alloué, Lorey fixait son regard sur le ciel étoilé.

Cela faisait une semaine. Une semaine entière de perdue. Le besoin de s'isoler complètement avait été bénéfique. Ses hématomes étaient quasiment partis, mais ce n'était pas comme cela qu'elle avait imaginé ses vacances.

Depuis le jour où elle avait découvert le vrai visage d'Emmet, elle remettait tout en question. Qu'était-il ? Quelles sortes de créatures foulaient cette terre pendant que la population vaguait à ses petites routines quotidiennes? Et surtout, que lui voulait-il à elle ?

L'idée même qu'elle avait rêvé ce qu'elle avait vu la hantait parfois. Car qui pourrait croire les divagations d'une pauvre folle　?

Et les réponses aux questions qu'elle cherchait lorsqu'elle l'avait confronté n'avaient pas été révélées, malgré l'entrevue forcée de sa part. Elle ne savait toujours rien de lui. Mis à part qu'il n'était finalement pas humain.

Elle visualisait la scène sans cesse dans sa tête, encore et encore. Jamais elle n'aurait voulu ne serait-ce que le toucher. Alors pourquoi s'était-elle laissée faire ? Il y avait beau avoir des choses chez lui qui ne la laissait pas indifférente, son comportement était juste incompréhensible pour qu'elle puisse ne serait ce que penser à avoir une quelconque approche.

Et pourtant, ses entrailles se tortillèrent lorsqu'elle repensa à la soudaine fièvre qui s'était emparée d'elle. Elle toucha ses lèvres du bout des doigts. Et la lourdeur de son baiser lui faisait plisser les yeux de convoitise.

Elle avait déjà eu l'expérience auparavant, d'autres garçons. Mais jamais elle n'avait ressenti pareil bouleversement. Elle ferma un instant les yeux et se laissa enivrer par son odeur particulière qui l'avait envoûté.

Le bruit de plusieurs portières qu'on claque la fit sursauter, presque honteuse de ce qu'elle s'imaginait. Elle se redressa d'un mouvement de sa chaise, pour voir qui rentrait en chassant toutes les images qu'elle avait dans la tête.

Tout le monde revenait du restaurant, ainsi qu'Emmet, chargé de boîtes de pizza partagées avec Jo. Elle avait oublié le petit rituel qu'ils avaient tous instauré des semaines plus tôt. Elle avait pensé que rester cloîtrée chez elle lui éviterait de le croiser, ou de provoquer encore une catastrophe.

Son coeur s'emballa soudain et elle fronça les sourcils. Elle ne voulait rien ressentir décida-t-elle lorsqu'elle l'aperçu. Sa gorge se noua à sa vue, ses longs cheveux noir porté en queux de cheval se balançaient au rythme de ses pas. Son expression était complètement neutre, comme un humain normal.

Les doigts crispés sur le rebord du balcon, elle le suivit des yeux, ne pouvant s'empêcher d'espérer quelque chose. Il ne porta pas un seul regard vers elle et cela la soulagea, sachant qu'il aurait eu du mal à la percevoir, car elle s'était faite tellement petite sur son balcon, qu'il n'y avait que ses yeux qui dépassaient au-dessus de la balustrade.

Ses poumons se remplirent à nouveau d'air lorsqu'elle entendit la porte se refermer derrière eux et elle se laissa glisser jusqu'au sol, ses muscles tendus soudain relâchés. C'était la première fois qu'elle l'apercevait depuis ce fameux jour.

Tout le monde était venu la voir la semaine passée, mettant son petit grain de sel pour tenter de lui remonter le moral. Elle n'avait pas besoin qu'on l'aide à ce niveau, elle voulait juste un peu de paix. Elle souffla en se réinstallant sur son transat.