Alt.

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Paul allait faire un pas en avant quand tout d'un coup, le sol trembla et quelques néons explosèrent, envoyant des éclats de verre sur eux. Des morceaux de plâtre tombèrent du plafond et une fumée grise commença à envahir la salle. Paul se baissa et leva les bras au-dessus de sa tête pour se protéger des débris.

La fumée, irritante, s'infiltra dans sa gorge et lui piqua les yeux. L'air était devenu étouffant. Il lança un regard vers la porte ; les coups de feu s'étaient arrêtés mais rien ne prouvait que les sentinelles étaient parties, qu'elles n'attendaient pas le moment propice pour les éliminer.

Paul entendit Ian murmurer de colère et il se tourna vers lui.

Le scientifique prit un tournevis et l'enfonça quelque part sur la console ce qui produisit des étincelles. Ian fronçait les sourcils et serrait les dents de frustration. Il continua à examiner la console, tourner des boutons, abaisser des manettes ou les lever sans même prêter attention à Paul, comme s'il n'existait pas, comme s'il essayait d'oublier sa présence, ou leur situation.

Paul détestait cette situation, cet endroit, ce monde. Il n'arrivait plus à le supporter. Peut-être qu'il devrait rester. Peut-être que c'était ça la solution. Ce n'était pas comme si Paul voulait rentrer. Son monde n'était plus le sien, il ne le considérait plus comme chez lui depuis un moment. Ian était devenu ce repère qu'il lui avait tant manqué quand il était arrivé. Et si Ian n'existait plus, alors Paul ne voyait aucune raison assez importante pour repartir. Ian était devenu son monde, et dans ce monde, il avait peu de chance de survivre. Les sentinelles allaient bientôt arriver et elles ne faisaient pas de prisonniers.

« Ian, appela-t-il en s'avançant quand une nouvelle tentative de réparation échoua.

- Attends. Bientôt, tu vas pouvoir rentrer chez toi. Je te l'ai promis, » répondit-il en le regardant, un sourire triste aux lèvres, se voulant rassurant.

Le cœur de Paul manqua un battement, un goût amer dans la bouche. Il n'arrivait pas se décider si c'était à cause de la fumée ou des mots de Ian car ces mots étaient tout sauf rassurants. C'était des coups contre lesquels Paul devait s'armer, des coups qui lui coupaient le souffle.

« Tu ne viens pas avec moi. »

Ce n'était pas une question. Il connaissait déjà la réponse et il ne voulait pas le reconnaître. Il ne voulait pas se dire que c'était fini et que Ian le renvoyait comme ça, le visage inexpressif et les mots vides de sens.

« Dès que j'aurai réussi à ouvrir le portail et réparé la console, tu pourras partir. Tu pourras rentrer chez toi, Paul, répondit Ian, en évitant son regard.

- Sans toi.

- Sans moi. »

Paul voulait lui faire changer d'avis. Il devait lui faire comprendre qu'il ne voulait pas retourner dans son monde. Ce n'était plus sa réalité, ce n'était plus sa vie. Il ne s'y reconnaissait plus. Il n'était plus le Paul qui avait débarqué quelques mois auparavant sans rien à perdre. Aujourd'hui, il avait tout à perdre, et il préférait perdre sa vie plutôt que de perdre Ian.

Paul s'avança vers lui, la main tendue. Ian l'esquiva et s'éloigna de lui pour s'occuper de la console. Le jeune homme n'en croyait pas ses yeux, blessé par la réaction de Ian. Tout d'un coup, il eut l'irrépressible envie de lui dire que c'était un idiot qui ne pensait jamais aux autres. Un idiot qui pensait trop aux autres, qui croyait que la seule solution viable était de se sacrifier pour le sauver et de mourir sans que Paul puisse l'en empêcher.

C'était injuste et Paul le détestait presque pour ça. Ian avait pris sa décision comme si Paul n'avait pas son avis à donner. Il ne pouvait pas l'accepter, pas maintenant, pas quand il commençait à peine à revivre. Il déglutit pour essayer de faire passer la boule dans la gorge mais aucun mot, aucun son ne voulait sortir. Paul ne savait pas s'il arriverait à dire quelque chose. Et évidemment, Ian le devança.

Alt.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant