Son regard avait retrouvé cette étincelle malicieuse, celle qu'Arthur avait contemplée dans ses prunelles au moment où ils s'étaient rencontrés.


Le maître des lieux les rassembla autour de la table ronde qu'ils avaient occupée la veille. Nina et Leo se joignirent à eux, mais aussi Alex et trois personnes – deux hommes et une femme – qu'Arthur ne connaissait pas. Du café fut distribué, un panier empli de pâtisseries légères circula, chacun se servit.

— Arthur a décidé de retourner chez Légendes pour les détruire de l'intérieur, annonça Max, sans attendre.

À cette déclaration succédèrent quelques exclamations stupéfaites. Nina écarquilla des yeux immenses en plaquant les mains sur sa bouche, Leo gloussa, incrédule, Alex demeura de marbre.

— Une part de moi trouve cette décision incroyablement stupide, poursuivit Max, l'autre y voit peut-être une opportunité colossale.

— Il ne rentrera jamais, intervint un homme d'un certain âge, le teint mat, le cheveu gris très court, la moustache fournie. Les lieux sont protégés par une technologie de pointe et un corps de vigiles particulièrement bien entraînés.

— Et pourtant, l'ADP a réussi à semer le chaos pendant une retransmission, il y a quelques jours.

Max se tourna vers Nina, qui secoua vigoureusement la tête.

— C'est très différent, s'exclama-t-elle. Ils ont réussi à passer les contrôles mis en place pour filtrer le public grâce au moratoire sur l'accès privé au fichier de la Sûreté. Ils ont juste protesté depuis les tribunes... Même si ça a eu des répercussions... Légendes n'a pas été menacée par l'intrusion d'une poignée d'agitateurs. Seuls... les héros qui étaient en studio à ce moment-là ont été affectés.

Aux regards humides qu'elle lui lançait, Arthur devina qu'elle parlait de lui. Des armées célestes combattant dans les cieux, il s'en souvenait, qui avaient forcé sa fuite précipitée dans les sous-sols, où il avait croisé Hector. Une erreur d'aiguillage, sans doute, qui avait menée deux EBAs à se rencontrer par hasard.

Quel que soit ce monde, ses règles, difficile de ne pas y voir la main du destin, d'une volonté supérieure. Le grain de poussière qui avait mis tout le reste en branle,, dans la souffrance et les possibles. Agir, combattre, libérer les opprimés, affronter le mal. Arthur était prêt.

— C'est bien la raison pour laquelle je vous ai rassemblés, répondit Max avec douceur. Comment pouvons-nous faire entrer Arthur ? Et que pourrait-il faire, une fois à l'intérieur ? Mon sentiment est que notre meilleure voie d'accès est de le ramener dans son rôle.

— Il va se faire tuer, lâcha Nina, atterrée.

— Un nouvel Arthur a certainement été activé, remarqua une jeune femme aux cheveux noirs et lisses qui lui tombaient bas sur le dos.

— Sans aucun doute, mais nous pouvons le neutraliser, je suppose, et procéder à une substitution.

Arthur sentit les poils se hérisser dans sa nuque.

— Je ne ferai pas de mal à... un semblable, indiqua-t-il.

— Neutraliser ne signifie pas tuer, répondit Max, le sourire tranquille.

Arthur frissonna sous son regard amusé. Il songea à Hector, endormi, immobile, attendant le baiser proverbial qui l'arracherait aux limbes.

— Je peux fournir le nécessaire, intervint Alex, d'un ton blasé, comme en écho aux pensées du jeune roi.

— Il reste qu'il faut le ramener jusque là, reprit l'homme aux cheveux de fer. Ce n'est pas comme si on pouvait le déposer, l'air de rien, dans leur boîte aux lettres.

Les Héros de Rien (en cours)Where stories live. Discover now