1. Un réveil haut en décibels

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- Charlie ? Chaaarliiie ! Tu m'entends ?!


Je me réveille aussitôt, la respiration haletante, et regarde autour de moi, affolée.

Des cheveux châtains aux reflets roux, de grands yeux verts où je peux deviner une lueur agacée. Pas de doute à avoir, c'est bien ma petite sœur, Amber, qui m'appelle en hurlant à me briser les tympans. Je connais meilleure musique pour se lever...

Plus d'ombre, plus de voix d'enfants, plus de pleine lune, plus de forêt obscure. Les rayons du soleil qui passent à travers ma fenêtre m'aveuglent, m'obligeant à plisser mes pauvres yeux.


- Charlie, allô ! Ça va ?

- Hein ? Ah, oui... Pourquoi ?

- Ça fait un quart d'heure que tu cries à te casser les cordes vocales ! C'est un miracle que Hazel se soit pas réveillée !


Ah. Ainsi donc, je criais. Ce n'est pas comme si c'était la première fois, mais je comprends mieux pourquoi ma sœur a des bouchons d'oreilles et semble vouloir ma mort. D'ailleurs, je devrais peut-être m'éloigner un peu, simple mesure de sécurité...


- Tu faisais encore le même cauchemar, c'est ça ? me demanda Amber d'une voix adoucie.


Ma seule réaction fut de hocher la tête.

Cela fait trois mois que mon père, Adam Scott, a eu son accident de vélo, trois mois qu'il est plongé dans un coma profond et qu'il ne donne aucun signe de vie, trois mois que je vois les mêmes images dès que je ferme les yeux.

Les nuits sont sensées être reposantes, c'est ce qu'on me dit depuis que je suis toute petite. Pour moi, c'est tout le contraire, elles m'épuisent et je me réveille avec des cernes monstrueuses. Amber dit que je fais peur à voir.

Je regarde une nouvelle fois autour de moi les murs, la porte, les rideaux, mon lit, mon bureau. Je suis effectivement dans ma chambre.


- Ça va aller ? Tu veux que je reste avec toi ?


Un rapide coup d'œil à mon réveil-matin m'informe de l'heure actuelle : 8h12. Je soupire et me lève.


- Non, file au collège, ne t'inquiète pas pour moi.  Tu devrais déjà être partie.

- Mais, Charlie...


Je hausse légèrement les sourcils et lui sourit, de cet air un peu maternel qui signifie quelque chose comme "ne me contredis pas".


- Okay, j'y vais, finit-elle par capituler. À ce soir !

- À ce soir Amber !


Elle sortit de ma chambre aux murs bleu clair après un dernier regard vers moi.

Aussitôt que la porte se referme, je m'en approche, l'ouvre à nouveau et passe ma tête dans le couloir. Personne, parfait.

Je sors de ma chambre et file vers la salle de bain, à l'extrême opposé de la direction qu'Amber a emprunté. Je descends les escaliers en deux-deux, trébuche, me rattrape au dernier moment à la rambarde qui émet un grincement de protestation et me réceptionne parfaitement sur mes deux pieds, ni vu ni connu. J'entre en coup de vent dans la salle de bain, juste en face de moi. La pièce est tellement proche des escaliers tapissés de moquette jaune défraîchie que je ne compte plus le nombre de fois que je me suis pris la porte en manquant tomber.

Le Bal des OmbresWhere stories live. Discover now