Chapitre 83 / Confusion et merdier en cours

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— Exactement ? Je n'en sais foutre rien ! Tu sais comment il est ?! Mais une chose est sûre, il pense avoir assez pour te faire tomber et reprendre les rênes de la filiale française... Dis-moi que tu as ce qu'il faut dans ta manche pour l'en empêcher ?! Tu sais que j'aurai gain de cause jusqu'à un certain point, mais il a l'ancienneté pour lui. Les administrateurs n'ont pas conscience que, si durant son « règne », tout s'est bien passé, c'est que papa veillait au grain.

— Nous avons beaucoup, répondit alors Jung en s'approchant du smartphone resté sur le comptoir. Mais si Darius doit se servir de ce que nous avons, il doit le faire en privé. Certains éléments pourraient envoyer Deimos Yannopoulos en prison, si certains administrateurs en ont connaissance.

— Tu as raison. Darius ?! Il te faut combien de temps pour être opérationnel à New-York ?

— Je peux être prêt pour la fin de la semaine. Je dois régler certaines choses de manière urgente dès demain et colmater les brèches possibles.

— J'ai confiance, Darius... Jung, est-ce que tu pourras tenir l'entreprise durant son absence ?

— Oui. Pas de problème. Il ne part pas au bout du monde sur une île déserte. New-York est plus accessible que les Fidji.

— Ah... Et Darius ? Il faut que tu amènes ta petite-amie...

Un lourd silence tomba de part et d'autre de la ligne. Darius fixa Jung qui haussa les épaules. Il ignorait pourquoi Magnus avait besoin de Mlle Jones.

— Je ne vois pas le rapport. C'est une histoire de famille. Elle n'a rien à voir là-dedans, dit Darius sur la défensive.

— Moi, j'en vois un, Darius. Grand-père n'a pas seulement mis la société en danger. Il a failli être le complice d'un meurtre. Si ce Rochemer était sous ses ordres, alors il doit assumer les conséquences de ses actes. Je veux une confrontation familiale.

— Mais Magnus ! Tu sais bien que Lupita n'est pas vraiment ma... commença Darius avant de s'arrêter en repensant au baiser échangé à la clinique.

— Peu importe ce qu'elle est vraiment. Elle est l'actrice principale de cette histoire, et si vous avez vu juste, Deimos l'a dans le collimateur depuis longtemps. Je veux savoir pourquoi.

— Moi, je sais. Pas besoin de confrontation ! Elle est très douée et elle s'est trouvée en travers de sa route.

— Darius. Amène-là.

— Magnus ! Les conséquences vont être désastreuses !

— Et je suis sûr que tu vas t'en sortir comme un chef, p'tit frère ! Tiens-moi au courant de votre arrivée que je t'envoie une voiture.

La tonalité annonça que Magnus Ryker avait raccroché. Darius s'accouda au comptoir pour se tenir la tête.

— Putain ! Je suis dans la merde !

— Tu dis ça parce que Deimos veut te prendre l'entreprise, bien sûr.

Un grognement lui répondit, et Jung sourit discrètement avant de reprendre la parole.

— Est-ce que tu vas finir par me dire ce qui s'est passé à la clinique ?

— Rien ! Il ne s'est rien passé.

— Réponse trop rapide et ton limite affolé. Il s'est bien passé quelque chose.

— Putain ! Jung ! Lâche-moi ! lança Darius avec un mouvement d'humeur.

— Impossible. Je suis non seulement un assistant efficace et casse-couille, mais aussi un frère attentif et protecteur. Donc, tu vas me dire dans quel merdie rtu t'es mis, pour que j'évalue jusqu'à quel point c'est rattrapable.

— C'est vrai que t'es casse-couille, quand même, lança Darius en relevant le visage.

Jung avait déposé une assiette de riz blanc devant son frère en souriant.

— Si tu veux la garniture, il va falloir parler.

— Je l'ai embrassée.

— ça ne sera jamais que la troisième fois, si mes souvenirs sont bons...

—Pas comme ça. Pas comme ça... J'essayais de lui faire comprendre que...

— De lui faire comprendre quoi ?

—Rien... dit finalement Darius en fourrageant dans ses cheveux.

— C'est tout ? 

— C'est pas suffisant ?

— Ben, ça dépend. C'était comment ? Elle t'a giflé ? Elle t'a hurlé dessus ?

— Elle... Elle m'a embrassé aussi.

— Elle était donc consentante.

— Bien sûr ! Je ne la contraignais pas. Je pensais même qu'elle allait me frapper.

— Mais elle ne l'a pas fait. Intéressant.

— Intéressant ? Tu crois que...

— Je ne crois rien. Tu es effectivement dans la merde, finit par dire Jung.

— Pardon ?

— Je parie que tu es parti comme un voleur.

— Ses copines sont entrées dans la chambre.

— Et elles ont vu quelque chose ?

— Non.

Jung comprenait mieux pourquoi Aïko ne lui avait rien dit à ce sujet. Il déposa le bol de garniture près de l'assiette de riz.

— Mange et va dormir. Demain est un autre jour, et tu vas devoir faire face à deux problèmes d'envergure. Et crois-moi, la situation d'Anthéa ne sera pas la plus complexe à gérer.

— Super !

— Est-ce que tu as des sentiments pour Lupita Jones, Darius ? demanda alors Jung en s'asseyant face à lui pour manger aussi.

L'intéressé garda le silence un instant avant de répondre. Il prit le temps de mâcher ce qu'il venait d'enfourner dans sa bouche.

— Je viens à peine de prendre conscience qu'elle m'attirait. Je n'en suis pas encore à me demander si j'ai des sentiments.

— Quand tu l'as vue disparaître dans la Seine, à quoi as-tu pensé ?

— Je n'ai pas pensé. J'ai sauté.

— Vraiment ?

— Je me suis dit qu'il n'était pas question qu'elle meure. Je ne voulais pas qu'elle disparaisse, finit par dire Darius en reposant ses baguettes.

Il songea à ce qu'il avait ressenti quand il la portait après l'avoir involontairement terrorisée sur la plage, à ce pincement au cœur quand son voisin lui avait parlé à l'expo, à cette colère qu'il dissimulait sous un masque de froideur quand il la sentait indifférente, à cette distance qu'il s'était efforcé de garder entre eux, alors qu'il agissait pour qu'elle ne s'éloigne pas de lui. Il devait reconnaître qu'il s'était voilé la face sans en prendre conscience, bien sûr. Les sentiments étaient peut-être bien là avant même que le désir ne s'installe.

— Ce ne sont pas des réflexions d'un homme qui est juste attiré physiquement pas quelqu'un, ça, Darius, dit Jung calmement.

Il le savait.

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