Chapitre 81 / Abus de faiblesse ?

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Cette légèreté qu'elle cultivait soigneusement dans ses relations en avait pris un sacré coup, mais le regrettait-elle ? Non. Pas plus qu'elle ne regrettait d'avoir mis la main sur Jung Park, car les unes comme l'autre, lui apportait une satisfaction incommensurable, celle de ne pas être seule, celle de ne plus voir que le sombre dans l'âme nue des vestiges humains qu'elle photographiait. Grâce aux sentiments qu'ils faisaient grandir en elle, Aïko découvrait un pan entier de sa propre humanité, et même si cela pouvait lui paraître un peu effrayant ou douloureux parfois, comme aujourd'hui, elle aimait ça.

***

Emmanuelle avait appelé la mère de Lupita. Son amie serait sans doute furieuse, mais comment ne pas prévenir cette femme que sa fille avait failli mourir ? Comment aurait-elle pu la laisser dans l'ignorance ? Quels que soient ses défauts, Mercedes Cabrera Vargas avait le droit de savoir. Mais jamais Emmanuelle n'aurait pensé la voir arriver à la clinique, avec cet air défait.

— Maman ? s'exclama Lupita qui sortait de la chambre.

— Lupita Jones Cabrera Vargas ! s'esclaffa Mercedes en fondant sur sa fille pour l'enlacer avec la force que seule une mère effondrée peut avoir pour son enfant.

En règle générale, quand Mercedes interpellait sa fille de cette manière, en n'omettant aucun de ses noms de famille, la jeune femme pouvait s'attendre à une ribambelle de reproches et de leçons. Mais pas pour le moment. Pour le moment, la mère étreignait sa fille qui apprécia à sa juste valeur, cette marque trop rare d'affection.

— Tout va bien, maman, murmura Lupita se doutant qu'Emmanuelle était à l'origine de cette visite.

— Non, Lupita ! Tout ne va pas bien ! Tu as failli mourir noyée ! Non, rien ne va ! Je croyais qu'en restant à Paris, tu échapperais à ce genre de risque ! Mais tu es comme ton père ! Impossible de te protéger ! Tu t'arranges toujours pour te mettre dans des situations...

Lupita tiqua. Elle n'avait pas le souvenir d'avoir jamais pris de risque durant son enfance. Quant à la remarque sur son père, elle la trouvait tout aussi étrange.

— Maman ? Arrête... ça va. D'accord ! C'était un accident. Ne...

— Emmanuelle m'a dit qu'on t'avait jeté dans l'eau sciemment ! Ça n'a rien d'un accident...

— Emmanuelle a exagéré. Celui qui a fait ça ne savait pas que j'ai une peur panique de l'eau.

Lupita ne voyait pas l'intérêt de tout raconter. D'autant qu'elle ignorait ce que l'entreprise avait communiqué ou pensait communiquer sur l'affaire. Elle se détacha de sa mère et observa avec étonnement son visage crispé par l'inquiétude. Elle qui avait toujours pensé que sa génitrice avait un cœur de pierre, préférant l'efficacité aux débordement sentimentaux, elle s'étonna de cet épanchement soudain.

— Maman ? Je comptais rentrer à mon appartement. Tu veux m'accompagner ?

— Ton appartement ? Mais ils ne te gardent pas plus ?

— Je vais bien, maman. J'ai juste bu un peu la tasse... rien de dramatique...

Lupita n'arrivait pas à savoir si sa mère la croyait ou si elle faisait semblant. Une chose était sûre, elle ne la lâcherait pas si facilement. Mercedes attrapa le bras de sa fille et ronchonna sur le fait qu'ils auraient pu lui mettre un fauteuil roulant à disposition. Lupita eut un demi-sourire. La Mercedes Cabrera Vargas qu'elle connaissait était de retour.

***

Quand Lupita ouvrit la porte de son appartement, elle fut accueillie par un Pop-corn dont la vessie exigeait une sortie immédiate. Spontanément, elle attrapa la laisse qu'Aïko lui arracha des mains.

— Tu ne comptes quand même pas t'occuper du chien, là ?! J'y vais ! Emmanuelle, tu gères l'intendance ?

— Ok. Courses de réconfort et médocs.

Les deux jeunes femmes commencèrent à descendre les escaliers, accompagnées du chien, alors qu'une cavalcade se faisait entendre dans l'autre sens. Roméo Mendès et ses sœurs déboulèrent dans l'appartement en bousculant Mercedes, qui était restée dans l'entrée à observer avec étonnement l'environnement familier de sa fille.

— Lupita ! Lupita ! Est-ce que ça va ? C'est Darius qui a encore essayé de te noyer ? Je vais...

— Tu ne vas rien du tout. Ça n'était pas Darius cette fois. Par contre, c'est lui qui m'a sauvé... dit Lupita en ébouriffant les cheveux du garçon qui s'était agrippé à elle.

— Ah.

— Tu vois ! On te l'avait dit que c'était pas lui ? Tu es trop jaloux, Roméo ! dit Jasmina en obligeant son frère à se décoller de la jeune femme.

— Je ne suis pas jaloux ! Je sais parfaitement que Lupita n'est pas mon amoureuse ! Mais c'est aussi ma sœur, comme vous. Et je ne veux pas que quelqu'un lui fasse du mal.

La voix net du garçon fit frémir Lupita. Il était si sérieux soudain. Si sûr de ce qu'il ressentait pour elle. Elle aurait tellement voulu être aussi sûre que lui. Elle soupira et s'accroupit devant lui.

— Merci Roméo. Je suis heureuse de savoir que tu m'aimes autant qu'une sœur. Moi aussi je vous aime comme si vous étiez ma famille.

Sur ces paroles, elle étreignit les trois enfants qui conservèrent tout de même leur air grave. Ils avaient conscience que la jeune femme avait frôlé la mort, et leurs petits cœurs purs n'aimaient pas ce qu'ils avaient ressenti. C'était une première déchirure qui en annonçait d'autres inéluctables, car la finitude des choses et des êtres étaient un fait avéré contre lequel personne ne pouvait rien, même pas leur innocente naïveté.

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