Chapitre 1 : Emménagement

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Je me réveille difficilement en ce samedi matin sous des rayons de soleil aveuglants. Ma mère avait violemment tiré mes rideaux comme si ça ne lui suffisait pas de gâcher le restant de mon année. Et oui, aujourd'hui jour de départ pour la ville la plus perdue de France ; j'ai nommé La-Ferté-Sous-Jouarre. Si je savais qu'en épousant Ugo maman allait le suivre jusqu'au bout du monde je serais restée chez papa dans le 94. Mais bon elle m'a promis qu'après le lycée c'est-à-dire l'année prochaine, je pourrai faire mes études où je veux et je compte bien me casser de là-bas.

On se prépare et on embarque direction l'enfer sur Terre. Heureusement que la veille Ugo avait pris le soin de déposer nos affaires avec un camion de déménagement parce que ça allait pas le faire du tout. Arrivés sur les lieux y avait pas un chat, c'est plus que mort. On se croirait dans un vieux village d'avant guerre laissé à l'abandon. Y a que des vieux et des vieux et des vieux... En plus de ça, 0 diversité. On a croisé que des blancs, pas que j'ai quelque chose contre eux mais ayant grandis dans un 92 cosmopolite, j'étais déboussolée.
Ugo habitait une énorme demeure pas très loin de la gare avec vue sur une espèce de rivière. Il nous avait expliqué que c'était la maison de sa grand-mère et qu'il en avait hérité lors de son décès. Il a dû tout retaper à neuf et patati et patata. Bon je l'écoutais à moitié sur le trajet parce que faut dire que j'étais assez déjà énervée comme ça. Et on constate en arrivant qu'il avait pas tord, c'était une énorme maison et quand on y est entré elle était entièrement rénovée au goût de nos jours. Forcée d'admettre qu'il avait fait un sacré boulot et ça ne pouvait que témoigner de sa fortune à mon beau-père. Parce que oui j'avais oublié de préciser qu'en plus d'être un riche français de souche, il était le maire de ce trou à rat. Maman pensait que ça leur faciliterait leur vie de couple de vivre dans le lieu de travail de son nouveau compagnon.
On me montre ma nouvelle chambre et elle était si grande que j'en revenais pas, elle devait faire au moins la taille de notre ancien salon. La déco était neutre sans doute pour me laisser la personnaliser par la suite. Perso j'allais pas y accorder plus d'attache que ça vu comment je prévoyais déjà de quitter tout ça dans un an. On fait le tour de la maison et du jardin puis on prend un rapide petit déjeuner puisque nous étions partis aux aurores. Ugo propose de faire une balade à pied histoire de nous présenter la commune mais je le soupçonne d'y profiter pour raconter sa vie encore. Je décide de coopérer parce qu'il m'avait l'air tout excité et maman était contente de le voir comme ça et quand maman est contente, je me vois difficilement lui enlever sa bonne humeur.
Je m'habille en fonction du temps qu'il venait de faire en ces premiers jours de septembre. J'enfile rapidement une robe d'été et des savates du même thème et je rattrape mes parents qui m'attendaient devant le portail. On marche décidément jusqu'à la gare qui était à quelques mètres puis on rejoint le centre-ville qui était à quelques mètres encore, faut dire que c'était une miniscule commune. Un village carrément.
On se retrouve devant une vieille école toute moche et Ugo me sort fièrement : « Alors Sully t'as hâte pour ta rentrée ? » Je le regarde abasourdie. « Me dit pas que c'est là que je vais aller en cours ? Maman t'étais au courant ? » Elle baisse la tête comme pour fuir la question. J'étais tellement remontée d'un coup que je décide de rentrer sans rien dire. Je retrace mes pas et je regagne la maison aussitôt. Je retire mes chaussures et je m'affale sur mon lit le téléphone en main prête à snaper ma vie de merde. Je tiens au courant mes potes que c'est la ville la plus moche du monde et qu'en plus de ça je vais être dans une école catho privée...
J'étais même pas croyante et maman non plus, je me demande ce qu'ils allaient me sortir comme excuse cette fois mdr. Mes copines me répondent de tenir bon et que de toute façon je pourrai les rejoindre le week-end. C'est clairement ce que je comptais faire, il était hors de question que je reste ici à souffrir gratuitement.
La matinée passe et quelqu'un vient toquer à la porte de ma chambre, bah enfin merde. Je me lève et j'ouvre, c'est maman. Je la laisse rentrer et je me terre à nouveau dans mon lit l'air déprimé.

« - Écoute Sullyve-Anne, je sais que c'est compliqué pour toi. Si je pouvais je t'aurai laissé vivre chez ton papa mais tu sais qu'il a des dettes à rembourser et s'occuper d'un enfant, c'est la dernière des choses qu'il lui faut en ce moment. Dit-elle.

- Mais maman je ne suis plus une enfant, j'ai déjà mon compte en banque, je peux me débrouiller toute seule.

- On en déjà parlé plusieurs fois et je ne reviendrai pas sur ma décision. Ton papa est en grande difficulté et il a besoin d'être seul.

- Non, justement il a besoin d'être soutenu par des gens qui l'aiment. Bref, tout ce que tu ne fais pas.

- Ça suffit Sullyve-Anne ! Cria-t-elle. Si ton père nous aimait vraiment il ne se serait jamais mis dans une telle situation. »

Je gagne rapidement ma salle de bain sans dire un mot et je sanglote. C'était trop pour moi, ce changement de vie si soudain et maman qui refait sa vie avec un autre homme comme si papa et moi n'existions plus. Tout ce qui lui importait c'était d'avoir sa petite vie parfaite sauf qu'à son grand âge elle sait pas que c'est pas comme ça que ça se passe ? Quand quelque chose est brisé, il faut tout faire pour le réparer surtout quand y a un putain de gosse en jeu qui prend tout. Bref mes réflexions ne devaient sûrement pas la concerner comme j'étais encore qu'un enfant pour elle.
Je ressors après avoir bien pleuré ma race, je sèche mes larmes et je me rend au salon où Ugo et maman se trouvaient. Il n'y avait pas un seul bruit, pas une mouche qui volait. Je me sers un verre d'eau et pour briser la glace Ugo propose avec un large sourire de commander des sushi pour ce midi. Il me connaissait assez pour savoir que j'en raffolais. Je hoche la tête pour acquiescer et on se mit à regarder la télé ensemble.

Les garçons du 77 sont comme çaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant