Marqué Par Les Moires

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À l'avant d'une trière spartiate, qui voguait tant bien que mal sur les eaux tumultueuses de la Méditerranée, Kratos, aussi immobile qu'une statue de marbre, regardait fixement l'horizon. Sous la goélette, le monde furieux de Poséidon se déchaînait d'une manière inimaginable pour de simples mortels, projetant de violentes gerbes d'écume contre la fragile coque du bâtiment. De temps à autre, les embruns salés venaient fouetter le visage du serviteur d'Arès, mais celui-ci restait stoïque et imperturbable. Les cieux, quant à eux, s'étaient assombris et des éclairs violents déchiraient les nuages en illuminant brièvement la mer agitée, révélant les crêtes moutonneuses des vagues qui semblaient prêtes à engloutir le bateau à tout moment. D'ailleurs, le tonnerre de Zeus grondait de façon si assourdissante dans les oreilles de Kratos qu'il pensait se trouver aux portes du jour de l'apocalypse. Toutefois, les muscles tendus du capitaine de Sparte témoignaient de sa concentration inébranlable, alors qu'il se rapprochait progressivement de son but.

Cependant, assailli de toutes parts par le déluge, le bateau finit quand même par s'échouer sur la plage rocailleuse avec un bruit sourd. Les planches de bois du vaisseau craquèrent lugubrement lors de l'impact, tandis que des myriades de gouttes d'eau salée voltigeaient dans l'air iodé. Kratos, torse nu et saillant de muscles, dû à sa position résolument immuable à la poupe du navire, resta fermement campé sur ses jambes pour ne pas passer par-dessus bord. Une fois son équilibre retrouvé, son regard évalua les dangers auxquels il pouvait s'attendre en débarquant sur cette terre inconnue. Les Lames du Chaos, quant à elles, symboles de sa toute-puissance, s'enflammèrent sinistrement dans son dos, prêtes à sortir de leurs fourreaux et à être dégainées contre toute menace qui oserait se mettre en travers de son chemin. Le vent le faisait chanceler et les gouttes d'eau froide du récif s'accrochaient à sa peau, ce qui donnait une aura encore plus sauvage à sa présence, déjà très imposante.

Les marins, effrayés face au légendaire spartiate, se prosternèrent aux pieds de Kratos alors que celui-ci s'apprêtait à abandonner son bateau éventré. Leurs voix tremblantes et dévotes s'élevaient dans des murmures inaudibles, implorant le roi de l'Olympe de veiller sur le guerrier surhumain qui se tenait devant eux. Cependant, Kratos ne prêtait aucune attention à leurs prières désespérées. Sa concentration éclipsait tout le reste. Il sauta donc du navire, laissant son équipage à genoux derrière lui avec leurs vaines supplications. Alors qu'il avançait, ses sandales grecques claquèrent contre les galets rugueux. Soudain, mains sur les hanches, sa silhouette immobile se découpa dans la lumière des éclairs, les bourrasques et la pluie, devant les ruines d'un temple qui, jadis, s'était dressé ici.

Tel un titan, Kratos avança d'un pas résolu sur la plage isolée, laissant son regard errer sur les restes du temple. Les vestiges de l'édifice, détériorés par le temps et l'érosion, témoignaient pourtant d'une grandeur passée. Des colonnes brisées et des sculptures érodées par les éléments bordaient le chemin qui menait au centre, témoins silencieux d'un passé glorieux. Les pierres usées par les intempéries racontaient à elles seules une histoire ancienne et oubliée, mais un air de mystère s'en dégageait encore, accroché aux éléments. Le souffle du vent s'engouffrait avec violence, sifflant en traversant les crevasses et en se précipitant dans les trous béants, amplifiant le sentiment d'abandon. Kratos se tenait là, devant ce vestige du temps, sa stature imposante contre le décor dévasté. Puis son regard se leva vers le ciel obscurci et les nuages sombres qui dansaient dans un funeste ballet aérien. Les éclairs intermittents illuminaient brièvement le paysage, augmentant cette sensation de se trouver dans un monde au bord du chaos. Cette atmosphère tourmentée donnait l'impression que les cieux eux-mêmes partageaient la noirceur du cœur de Kratos. En effet, les épreuves incessantes et les batailles sanglantes qu'il menait au nom de la gloire de sa patrie avaient rapidement laissé leur marque indélébile sur son esprit et avaient assombri son âme.

– Voyez-le avancer sur la plage... La mort semble n'avoir aucune prise sur lui, chuchotèrent les marins avec une terreur palpable, tandis qu'ils observaient Kratos s'approcher du temple.

– Rebâtissez ce temple au nom du seigneur Arès..., cria Kratos d'une voix grave, ses mots portant une menace à peine voilée... et votre seconde mort sera rapide et sans douleur, ajouta-t-il, laissant planer une aura sinistre sur ses paroles, rappelant à tous ceux qui l'entendaient la cruauté implacable qu'il recelait.

En guise de réponse, le sol se mit à trembler, faisant subitement se réveiller de monstrueux morts-vivants. Ils émergèrent des entrailles de Gaïa, se frayant un chemin à travers les galets qui formaient cette plage. Leurs squelettes, macabres et déformés, se mouvaient avec une agilité déconcertante alors qu'ils cernaient rapidement Kratos. Leurs orbites vides brillaient d'une lueur rouge et maléfique, tandis que leurs os grinçaient sinistrement à chaque mouvement, comme des engrenages grippés et rouillés. Les restes de dents pointues et brisées dépassaient de leurs mâchoires effrayantes, ajoutant quelque chose d'encore plus diabolique à leur apparence, pourtant déjà si cauchemardesque.

Puis, sans hésitation, les morts-vivants se jetèrent sur Kratos, leurs membres osseux et effilés s'agitant à une vitesse surprenante. Les lames chaotiques de Kratos se mirent aussitôt en mouvement, tourbillonnant instantanément, fendant l'air dans une danse mortelle alors que Kratos contrait cette embuscade soudaine. Le fracas des os qui se brisaient et le grondement du combat résonnaient dans le silence nocturne. Ainsi se créa une symphonie macabre dans laquelle Kratos, animé d'une rage infinie, combattait ces viles créatures, venues tout droit d'outre-tombe, avec une férocité brutale.

Déployant toute sa maîtrise des arts de la guerre pour les anéantir les uns après les autres, Kratos se lançait dans la bataille avec une volonté acharnée de les briser. Ses exceptionnels talents au combat prenaient toute leur envergure dès lors qu'il maniait ses chaînes, forgées au sein même des Enfers. Chaque mouvement était parfaitement calculé et chaque coup porté avait une précision mortelle. Ses lames enflammées virevoltaient dans les airs, tranchant, perçant ou réduisant en miettes les sacs d'os qui osaient s'approcher de trop près. Des combos dévastateurs s'enchaînaient sans effort, semant la destruction dans leur sillage. La colère d'Arès embrasait le cœur de Kratos, alimentant ses armes d'une puissance redoutable. Il était une force inarrêtable, une tempête de violence qui s'abattait sur ses ennemis.

Les cris des morts-vivants se mêlaient aux clameurs de haine de Kratos tandis qu'il déchirait ses adversaires avec une sauvagerie sans égale. Ainsi, le sol se retrouva vite maculé de fragments d'os, témoins silencieux de la guerre qui s'y déroulait. Puis, enfin, un silence assourdissant s'installa et l'ensemble des squelettes jonchaient à nouveau le sol caillouteux, tandis que Kratos se tenait debout, le corps entièrement recouvert de poussière d'os.

– Par tous les dieux, murmurèrent les marins d'une voix empreinte d'effroi mêlée de crainte devant la vision saisissante du guerrier spartiate.

Debout, dans les flashs blafards de la foudre, soufflant sous l'effort qu'il avait dû fournir, un nuage de poussière d'os le drapait d'une pâleur maladive.

– Il ressemble à un fantôme...

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