- Ici c'est une tradition. Ils n'ont jamais laissé tomber cette coutume et ce soir aura lieu la célébration.

- Étonnant, fis je à moitié pour ma stupeur qu'une fête interdite par le roi Menevras puisse encore avoir lieu par le courage de ces villageois et à moitié devant mon étrange attraction pour cette rose noire.

Je la pris entre mes doigts et la tins devant mon visage.

- Cette fleur est magnifique, soufflai je, étrange pour une fleur de la couleur de la mort.

- Le noir n'est pas toujours la représentation de la mort, dit Abrax en venant laisser glisser son doigts le long d'un pétale.

Je levai les yeux sur lui.

- Le noir est pourtant la couleur des ténèbres, fis je, et les ténèbres apportent bien souvent la mort.

- Toutes les ténèbres doivent elles être porteuses du mal?, dit il d'une voix étrange.

Sa question n'en était presque pas une. Comme une affirmation dites à voix haute, pour lui seul. Je ne répondis rien, car le souvenir des ténèbres hurlantes de mon songe revenait à ma mémoire. Elles étaient terrifiantes, sombres et tumultueuses. Mais mauvaises... ? Je m'étais lovée dedans... J'avais trouvé un abri en leur sein. Je frissonnais, perdue quant à là réponse à cette question et cette même question étrange.

- Je l'ignore, répondis je finalement d'une voix étranglée.

Je reculai, tenant toujours la fleur entre mes doigts. Abrax me fixait, le visage impénétrable. Une fois encore, je n'avais aucun moyen de savoir ce qu'il ce passait dans sa tête.

- Venez, dit il soudain en me prenant la main pour m'entraîner derrière lui.

Il la lâcha aussitôt et elle retomba le long de mon flanc.

- Où allons nous ?

Son éternel sourire aux lèvres, il regarda la place qui s'ouvrait devant nous. Il écarta les bras en grand:

- N'avez vous pas envie de célébrer notre Déesse ?

- Ne devrions nous pas plutôt nous fondre dans la masse et ne pas nous faire remarquer ?

Nous nous engouffrâmes dans une rue perpendiculaire à la grande rue. Les pavés sous mes pieds, étaient étonnamment pour moi bien moins agréable que le tapis naturel d'une forêt.

- Qu'est ce qui nous empêche de le faire tout en nous amusant, me rétorqua t'il en s'immobilisant devant une petite boutique pleine d'étoffes qui semblait fermée.

Les mains sur les hanches, je décidai que ce n'était pas une mauvaise idée. J'avais posé la rose sur le parapet d'une fenêtre à côté de moi.

- Très bien, fis je à son encontre, mais cette boutique n'est pas ouverte.

Portant une main à son cœur, Abrax me retourna un regard incrédule. Je rougis aussitôt. Bien sûr qu'elle était fermée, nous ne pouvions pas rentrer dans un magasin et nous déguiser devant un vendeur qui aurait tôt fait de vendre la mèche aux première gardes royaux qui l'aurait interrogé.

- Vous êtes en présence de la flèche du grand roi, dit il en se frottant les mains.

- La flèche?, relevai je.

- Toutes les armes secrètes au service du roi revêtent leurs surnoms, me répondit il en agitant la main d'un geste dédaigneux.

Je le regardai scruter la porte et la serrure. Peut être était ce que l'horreur de son vécu l'avait désensibilisé ou bien cachait il ce qu'il ressentait en évoquant cela, mais il parlait de son vécu d'espion tantôt avec amertume tantôt avec dédain. Il poussa soudain un cri de victoire et se redressa.

Le Royaume perduWhere stories live. Discover now