𝟹𝟶 - 𝙰̀ 𝚌𝚑𝚊𝚌𝚞𝚗 𝚜𝚊 𝚛𝚎́𝚜𝚘𝚕𝚞𝚝𝚒𝚘𝚗.

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𝐓𝐢𝐭𝐚̀𝐧.

Je vois Ashton se lever, puis la porte de leur sanctuaire s'ouvre à la volée. Une forte odeur de sciure, et de mélange d'huile de lin et de térébenthine s'évade de la pièce. J'ai l'impression qu'ils ont ouvert des fioles comme on brûlerait un cierge dans une paroisse. Il ne me laisse pas en placer une, sale habitude qu'il partage avec sa jumelle :

— T'as décidé de choper une pneumonie ? Y'a pourtant mieux à ramener comme souvenir de Paris...

Ses yeux se plissent pour détailler ma chemise humide, que je porte à même la peau. Je n'avais pas remarqué que la pluie s'était remise à tomber. Je me les gèle mais c'est le cadet de mes préoccupations. Moi, tout ce que je vois par-dessus son épaule, c'est que Rose a ressenti le besoin de s'enfermer ici. Avec eux. Sans moi.

Il ajoute, dans une nouvelle tentative de détendre l'atmosphère pesante qui nous englobe :

— Si c'est les remèdes de Kanda qui t'attirent, je me dois de t'avertir que c'est vraiment du costaud. Ça rend vite accro pour peu que tu sois pas dans un état mental optimum.

— Aucun risque que Titàn en abuse, lui oppose immédiatement Rose sans me quitter des yeux, les iris bordés de malice. On sait tous que notre cher Président fait tout pour garder les idées claires et écarter tout ce qui pourrait le distraire de son objectif. Sa seule drogue, c'est la nicotine.

Faux, c'est toi, et tu es bien plus addictive.

Son jumeau se retourne vivement pour lui balancer une phrase en français. Ben esquisse un sourire narquois tandis que ma tigresse hausse les épaules avec nonchalance, pas disposée à me traduire ce qui se passe. Je crois qu'il vient de la réprimander pour ce tacle, mais je n'en suis pas certain. J'ai besoin de deux ou trois secondes pour faire le tri dans mes pensées et trouver quoi répliquer pour reprendre la main.

Tu es mon unique objectif. Et ma priorité.

Sa langue claque contre son palais. Deux fois. Mauvais signe.

— Ah bon ? s'enquiert-elle ensuite avec intérêt en croisant les bras sur sa poitrine, depuis quand ? Parce que je n'ai pas vu de rames dans tes bagages, moi.

La peste me teste, mais j'aime ça. Je préfère ce petit jeu à son apparente indifférence. En étant honnête envers moi-même, je devrais admettre qu'au fond, je savais que les choses étaient bien trop calmes pour que rien ne me pende au nez un de ces quatre. Depuis qu'elle s'est assise sur le siège de Lonan, qu'elle a balancé ses grenades verbales et décrété une nouvelle ère au sein des Dark Evil Lions – et une nouvelle déco, sans commentaire –, Rose ne m'en avait pas encore trop fait baver. Mes absences ont contribué à cette paix relative entre nous, puis Noël s'est pointé sur le calendrier et Aya a monopolisé sa sœur non-stop, comme pour l'empêcher de sombrer tout à fait dans les ténèbres. Nos conversations tournent principalement autour du MC et de sa formation, on affiche toujours une entente cordiale mais on ne trompe personne : on évite simplement certaines questions. Parce que les réponses risquent de ne pas être celles espérées, j'imagine.

Les semaines ont encore filé, et voilà où on en est.

— J'ai de la ressource quand je veux vraiment quelque chose.

— Ça ne suffit pas toujours, c'est bien pour ça qu'il y a un adage qui dit qu'on n'a pas toujours ce qu'on veut dans la vie.

— Et un autre qui prône « mieux vaut tard que jamais », enchaîne Benjamin, telle une invitation à mettre de l'eau dans son vin.

— Rom', lui grogne Ashton, on ne s'en mêle pas.

Le diplomate du trio dresse les paumes au-dessus de sa tête. Ils s'expriment en anglais mais quelque chose m'échappe.

SAUVAGESWhere stories live. Discover now