Chapitre 12 - Fenghuangs, Fô et Dragons

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Les montagnes s'éloignèrent dans leur dos, emportant avec elles les secrets de la nuit passée. Lorsqu'elle s'était réveillée, Lance avait quitté sa couche, laissant un étrange sentiment d'abandon dans le cœur de la lunienne. Elle n'avait pas décroché un mot de tout le voyage, ravalant avec amertume son sarcasme et ses attitudes provocantes, se laissant submerger par un stress angoissant lorsqu'elle vit en contrebas de la montagne le temple des Fenghuangs. L'air était devenu plus doux mais n'aidait pas Moody à se détendre pour autant. La petite troupe d'Eel fit une halte pour laisser le temps à la lunienne de se changer. Il fallait qu'elle soit parfaite pour sa rencontre avec Oth, et cela la stressa davantage. Elle passa au-dessus de sa robe fendue de longues manches rouges, noires et dorées. Ses doigts coiffèrent sa chevelure de jais avant de maquiller ses lèvres d'un rouge profond, réhaussant ses yeux en amande d'un trait noir. Elle confia, à contre cœur, ses armes à l'Étincelant avant de remonter en amazone sur sa monture. Les lèvres pinçaient, elle suivit à nouveau la marche dirigée par Lance et Nevra.

Ses yeux se levèrent vers la grande arche rouge qui accueillait les nouveaux visiteurs au Temple en ruine, une odeur âcre vint saturer son odorat, comme si les événements passés ne s'étaient jamais effacés. Des riverains se brisaient le dos dans les rizières que la troupe dépassait, fouettés à sang par les barbares s'ils n'allaient pas assez vite ou s'ils avaient le malheur de prendre une courte pause pour reprendre leur souffle. Moody serra les mâchoires, tout cela était si injuste. Elle releva le menton, se promettant de sauver ce peuple des mains du tyran. Les murailles du Temple apparurent après quelques minutes. On sonna le gong et la lunienne adoucit ses traits pour afficher un air niais et candide. Les portes s'ouvrirent et dévoilèrent la grande place où la petite troupe s'avança. Devant eux se dressait un bâtiment d'une envergure impressionnante, l'entrée se trouvant en haut des grandes marches en pierre. De chaque côté de cet escalier se trouvait des Lions de Fô, maître et protecteur des Fenghuangs. Aussi puissant que les dragons, pensa la lunienne avec sarcasme. Ils n'avaient pas été capables de protéger le peuple et ses dirigeants. Quelques curieux s'approchèrent du spectacle et Moody balaya les alentours du regard.

« Nous sommes les représentants de la cité d'Eel. Je suis Ryfer, gouverneur de la cité. Jafer, garde personnel de Nurly, fiancée d'Oth. Rudras, son écuyer. » déclara d'une voix forte Lance. « Nous amenons Nurly à Oth et demandons hospitalité jusqu'au mariage. »

Personne ne broncha et cela devenait embarrassant, voire humiliant pour les Eeliens. Un silence gênant régna sur la place. Le temps semblait s'être arrêté. Un mouvement attira l'oeil des soldats, se tournant comme un vers un homme, sûrement un barbare, qui s'avançait vers eux, un sourire mauvais au coin des lèvres.

« Oth n'est pas prêt à recevoir sa dulcinée. Il est assez... Occupé. Mais nous pouvons nous en charger pour lui afin de lui vendre la marchandise. » railla-t-il, une lueur perverse dans le regard.

Moody le toisa, puis pencha son visage sur le côté, faussement incrédule.

« Je vous demande pardon ? » s'enquit-elle, feignant la surprise, puis la déception.

« Ce n'est pas ce qui était prévu. » dit Lance d'une voix étonnamment trop calme.

« Tout est prévu mon ami, c'est juste que vous n'êtes pas au courant. » rétorqua le barbare d'une voix à l'accent prononcé.

« Moi qui pensait que mon futur mari m'aurait accueillie. » marmonna la lunienne.

Elle eut une moue faussement triste en se glissant au sol, époussetant son pantalon avant de croiser ses bras dans ses larges manches. Les trois hommes qui l'accompagnaient ne firent qu'un en la foudroyant du regard. Un sourire enfantin ourla les lèvres de la petite femme qui s'approchait du garde avant de s'incliner respectueusement en avant.

𝕷𝖆 𝕱𝖆𝖈𝖊 𝕮𝖆𝖈𝖍𝖊́𝖊 𝖉𝖊 𝖑𝖆 𝕷𝖚𝖓𝖊Où les histoires vivent. Découvrez maintenant