02.

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Brooklyn.

Brooklyn

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***

Je peux la prendre celle-là ?

Quand je lève la tête pour lui faire face, je vaque presque tout de suite à mes occupations l'air de dire « tu me fais chier » dans tous les dialectes possibles et imaginables.

T'es grave reloue à nous faire la sentimentale du coin là, je crache en guise de réponse.

Sois pas aussi aigrie espèce de vieille meuf, elle gronde immédiatement. T'as pas envie que j'aie des souvenirs de vous ?

Mais je m'en fout moi, prends la ta photo. Prends juste pas cet air dramatique ! À t'entendre on va plus jamais se revoir, ça y est.

— De toute façon ce pays t'as rendu insensible... elle dit tout doucement avant de glisser le cliché du Polaroïd dans son portefeuille.

La grognasse a pris exprès une mine de chien battu. Je lève alors mon gros derrière du canapé pour venir l'enlacer. Mes mains viennent alors entourer son visage afin d'exercer une pression sur ses joues. Elle se retrouve paralysée, la bouche en cul de poule.

Bec ? je lui demande, sachant très bien que la prise de soumission que j'exerce exerce sur elle ne lui permet pas de répondre quoi que ce soit à part des sons difficilement identifiables.

Je me tords de rire et elle aussi par la même occasion, je finis pas poser mes lèvres sur les siennes  et naît alors un baiser furtif ou bec. Elle hurle de dégoût quand je libère enfin son visage de mon emprise et mon rire la contamine. Je l'aide à finir de coffrer les dernières affaires dans ses valises et Izaïdie s'assoit sur dessus pour nous aider à les fermer.

Mais tu vas partir où, papa ? mon neuf mois demande.

Bah je rentre chez moi mon amour de ma vie toute entière au caramel beurre salé supplément éclat de noisettes, elle répond sur cet air complètement débile qu'on prend quand on s'adresse aux enfants.

Izie ricane, elle adore qu'elle lui parle comme ça parce qu'à chaque fois, la phrase change.

Mais moi je suis loin, très loin de rire. Ma soeur est comme une plaie au cul quand on lui refuse quelque chose qu'elle désire. Et au lieu de cicatriser, elle gangrène.

T'as vraiment de la chance de te casser London, je te le dis, mon regard assassin vient la cueillir. La manière dont j'allais te botter là ? Bref.

Quoi ? elle feint de ne pas comprendre.

« Prends-moi pour une conne » mon regard lui hurle ! Mais impossible d'être aussi vulgaire, la petite arrive à un âge où elle répète tout.

Arrête de l'encourager à t'appeler papa dans mon dos ! Je te l'ai dit un milliard de fois, ça va la perturber !

Mais elle t'appelle déjà maman ! Il me faut mon nom à moi aussi !

Mais t'as un nom grosse... cruche ! je me tempère.

Mais je m'appelle comme une ville gros, c'est pas perturbant ça ? elle geint.

Fallait voir ça avec tes darons. Laisse ma fille en paix, je veux pas de problème avec Miguel.

Le SDF ? Izie demande.

Le quoi ? je la questionne pour être sûre de ne pas avoir entendu ce que je crois avoir entendu.

Papa m'a dit que Miguel, c'est le SDF le plus célèbre de France.

Je crois halluciner en faisant volte-face.

T'as pas fait ça ? Ne me dis pas qu'en plus de croire que t'es son père, elle pense que son véritable père est un SDF ?!

Est-ce que j'ai menti ? elle argue comme si sa défense était solide.

— Je vais tout casser London ? je menace.

He belongs to the streets ! elle argumente les mains brandies en l'air.

Je perds instantanément toute crédibilité quand j'éclate de rire à en pleurer. Qu'est-ce que je peux bien y faire ? La pouffiasse est trop drôle.

Quand je reprends mon souffle, je reviens à la dure réalité. On s'est préparé à ce moment. C'était le deal, depuis le début. Elle ne pouvait pas rester au Canada auprès de nous indéfiniment. Pourtant, le moment venu, c'est difficile d'accepter la séparation.

Même si c'est prévu, Izie n'a pas encore rencontré Miguel. Plus tard, j'ai compris que si London tenait tellement à ce qu'elle l'appelle papa, c'est parce que manifestement, elle ne connaît pas Miguel et qu'il n'est pas physiquement présent. En réalité, elle ne voulait pas qu'Izie se sente différente de ses camarades quand ils mentionnent leurs pères. Elle voulait qu'Izie soit en mesure d'assurer à quiconque lui poserait la question qu'elle aussi, elle avait un père. C'était une manière d'être son père par substitution, parce que finalement, elle l'aimait comme sa propre fille.

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⏰ Last updated: Jul 12, 2023 ⏰

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